Je vous soumets quelques extraits très édifiants d’une dépêche de ce jour de l’AFP sur la crise intitulée : « Nervosité sans précédent des marchés face à une crise appelée à durer ».

Cet excellent article résume parfaitement, à mon avis, la situation financière et économique actuelle et ses prolongements :

 

« Face à une crise économique qui s'amplifie et des fonds spéculatifs paniqués, les marchés financiers ont réagi en ordre dispersé vendredi, alors que plusieurs pays commençaient à manquer de capitaux et que se multipliaient les appels en faveur d'un nouveau « Bretton Woods »* […]

Et les hedge funds (les fonds spéculatifs) sont au banc des accusés, avec leurs actifs évalués à 1.800 milliards de dollars. « Une partie de cette industrie est en train de mourir, peut-être la moitié », insiste Eric Galiègue: « Et ils liquident leurs actifs en catastrophe, dans une peur animale ». Loin d'être passagère, la récession provoquée dans les pays riches par la crise financière « durera plus d'un an, entre un an et un an et demi », a affirmé vendredi le chef du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), Kemal Dervis. Et « le plus dur reste à venir », ont renchéri les économistes de BNP Paribas à Paris. Un pessimisme difficile à démentir devant la poursuite des accidents financiers.En France, la Caisse d'Epargne a ainsi annoncé avoir subi une perte de 600 millions d'euros liée à une prise de risques par trois de ses courtiers dans la semaine du 6 octobre. « Les responsables doivent en tirer les conséquences », a déclaré depuis Québec le président français, Nicolas Sarkozy.[…]Certains pays viennent à manquer de capitaux. L'Ukraine négociait vendredi un prêt de 14 milliards de dollars auprès du FMI. La Hongrie a été placée sous assistance respiratoire par la Banque centrale européenne avec un prêt de 5 milliards d'euros, le chef de la Banque centrale hongroise admettant au passage « la vulnérabilité considérable » de son pays.La Russie, elle, voit les capitaux spéculatifs déserter. Selon un haut fonctionnaire, 33 milliards de dollars ont fui le pays en août et septembre. Quant à l'Islande, elle décidera d'ici une semaine si elle sollicite ou non une aide du FMI, ce qui serait une première pour un pays occidental depuis 1976.[…]Vendredi, M. Bush a semblé écarter l'idée d'un sommet avant la fin 2008 en déclarant que la modernisation de la réglementation financière devait être une des « toutes premières priorités » de son successeur et en mettant en garde contre les effets indésirables de nouvelles régulations.

La Commission européenne a annoncé qu'elle allait faire des propositions d'ici la fin de l'année pour réduire les risques du marché des crédits dérivés, à l'origine de la crise financière. Un marché dont le volume mondial dépasse les 600.000 milliards de dollars par an. »

(AFP, le 17/10/2008 23h01)

 

Bush s’empêtre dans la crise. Il n’a toujours rien compris et persiste dans son idée de ne pas toucher au « SYTEME ». Et, pourtant, il semble évident que la situation est pire que ce que les plus avertis et même les plus pessimistes avaient envisagé. Nos chefs d’Etat gesticulent dans tous les sens, pour faire croire qu’ils s’activent à résoudre la crise et à relancer l’économie. Mais en réalité cela ne débouche sur rien d’efficace, ce que confirment les déclarations des analystes, économistes et aussi les représentants des grandes instances financières et économiques internationales de la planète.

Ce ne sont que plans débridés et inachevés, des leurres qui cachent la misère ou plutôt une vérité difficile à avouer ! Pourquoi provisionnerait-on de ce côté de l’Atlantique quelques 2000 milliards d’euros et sur l’autre rive 700 milliards de dollars ? Pour la bonne raison que les banquiers et les assureurs ont communiqué ces chiffres à leurs gouvernements respectifs. Car les politiques n’ont pas d’autres moyens dans l’immédiat d’estimer le montant des dégâts causés par les subprimes et les produits adossés à ces crédits, que de croire les banquiers. Mais qui nous dit que les banquiers nous disent la vérité ? la connaissent-ils seulement ? Bien sûr, ils savent parfaitement ce qui figure dans leur bilan, entre crédits et actifs financiers d’un côté, capital et dettes (dépôts des particuliers et des entreprises) de l’autre.

Malheureusement, la situation est telle qu’ils ne peuvent la révéler sans risquer de provoquer la panique ! et c’est pourquoi nous apprenons au compte-gouttes que Dexia est en grande difficulté, que BNP Paribas, Société Générale, Crédit agricole sont dans le collimateur des analystes financiers, et que la Caisse d’épargne a perdu 600 millions d’euros. Comme pour la crise des technologiques en 2000, on distille les mauvaises nouvelles pour que l’effondrement des marchés soit plus « soft », sans à-coups, pour que le public, les investisseurs aient le temps digérer les informations douloureuses, de s’habituer à cet état de choses (plutôt à l’état des marchés)…

En novembre 2007, la société générale annonçait 230 millions de dépréciations d’actifs dus aux subprimes. A peine trois mois après, mi-janvier 2008 – en dehors de l’affaire Kerviel qui lui a coûté 4,82 milliards de pertes (dont une partie avait sans doute une relation indirecte avec les subprimes…) –, elle évoquait un chiffre supérieur à 2 milliards (dix fois plus qu'en novembre 2007) de pertes dues directement aux subprimes. Ce fut le cas de toutes les banques américaines qui n’ont pas cessé de réviser à la hausse leurs pertes potentielles, parfois jusqu'à vingt fois plus !

A partir de ces faits, il est donc tout à fait cohérent et logique de penser que ce n’est pas 360 milliards (pourquoi d’ailleurs 360 et pas 400… si ce n’est le fruit de calculs) dont ont besoin les banques, mais peut-être de cinq, dix fois plus ou plus ! Mais cela on n’a pas le droit de le dire, du moins pas tout de suite. A mon avis, nous ne sommes pas au bout de nos surprises comme on peut en juger par la déclaration ambiguë suivante (où on ne sait pas s'ils parlent des marchés financiers ou des banques !) : « le plus dur reste à venir, ont renchéri les économistes de BNP Paribas à Paris » (AFP, 17/10/08).

Il y a une moralité à toute cette histoire : « tout le monde ne fait pas grise mine à la City de Londres. Les primes versées aux employés du secteur financier au Royaume-Uni ont plus que doublé en sept ans, culminant à 16 milliards de livres cette année. » (AFP, 17/10/08) NOTES

* BRETTON WOODS (ACCORDS DE) : Accords conclus entre les représentants de 44 Etats au terme de la conférence tenue à Bretton Woods (New Hampshire, Etats-Unis) du 1er au 22 juillet 1944, chargée de mettre sur pied un nouveau SMI (système monétaire international). Le système mis en place reposait sur trois piliers : système de parités fixes (exprimées en or ou en dollar) avec des marges de fluctuation de ± 1 %, étalon de change-or (gold exchange standard), convertibilité des monnaies en dollar, lui-même convertible sur la base de 35 $ l’once (31,1 g), soit 1 $ = 0,888671 g d’or, création du FMI chargé de veiller au bon fonctionnement du système et d’octroyer des crédits aux pays connaissant un déficit de leur balance des paiements et de la B1RD.

BRETTON WOODS (INSTITUTIONS DE) : Ce sont la Banque Mondiale (BM) composée de la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et de ses deux filiales et le Fonds Monétaire International (FMI) qui ont vu le jour avec les accords de Bretton Woods de 1944.

** AFP, 17/10/08 19h29 : « Le moral des ménages américains a accusé en octobre une chute inédite depuis les années 1950 – l'indice du sentiment des consommateurs Reuters-Université de Michigan est ressorti à 57,5 en première estimation pour le mois d'octobre, contre 70,3 en septembre, et une prévision moyenne des économistes et analystes interrogés par Reuters de 65,5 –, et, en septembre, les mises en chantier de logements sont tombées à un plus bas de dix-sept ans et demi…