Non à la rhétorique de la peur

Je l’ai écrit ici à plusieurs reprises, je déteste l’utilisation à outrance des thèmes identitaires et sécuritaires par Nicolas Sarkozy. La droitisation de son discours a certes permis de briser le FN mais, même en politique, j’ai encore la naïveté de penser que la fin ne justifie pas toujours les moyens.

Ceci étant dit, la campagne de diabolisation de Sarkozy est dangereuse et porteuse de graves dérives. La rhétorique de la peur n’est pas une arme démocratique. Je ne choisirai peut-être pas entre Sarkozy et Royal, mais jamais je ne dirai, comme je l’entends de plus en plus souvent que c’est un choix entre la peste et le choléra. Nous avons la chance de vivre dans une démocratie ou 85% des électeurs se déplacent pour voter, ou le choix du second tour opposera deux candidats républicains, il faut s’en souvenir. Nous ne sommes pas au Nigeria. N'en déplaise à Philippe Torreton qui nous confie : "avec Sarkozy, j’ai peur pour la démocratie".

Sur le plateau de TF1, Bernard Kouchner trouve que « le score de Nicolas Sarkozy est un beau score. Mais il reste 70%. » PPDA oriente alors le débat sur la personnalité de Nicolas Sarkozy. « Il fait peur », dit Kouchner. Et Ségolène poursuit dans ses meetings : il veut "prendre le pouvoir", il porte "le masque de la peur". Pas une émission de radio, pas un plateau télé depuis dimanche où la question « Sarkozy fait-il peur » ne revienne pas comme un écho. Tout le monde s’y met.

Sarkozy fait peur aussi bien aux célèbres qu’aux anonymes, du soutien de Séogolène Royal Thomas Piketty à la douce petite voix d’une bloggeuse inconnue, en passant par l'auteur Tristan Valmour sur Agoravox qui s’alarme : « Plus qu’une adhésion au programme de Ségolène Royal, il faut refuser le monde de Nicolas Sarkozy qui achèvera les valeurs républicaines de la France. » Et Sarkozy fait peur aussi à Daniel Riot : « Le journaliste que je reste a peur. Le citoyen que je suis a peur. Le Républicain que je suis a peur. »

Vous me direz sans doute que tout ceci n’est pas si grave, que cela fait partie du débat électoral et que finalement, on a bien le droit d’avoir peur d’un homme politique. Certes. Mais quand ce leitmotiv est repris en chœur, le danger n’est pas loin. Le danger, c’est Le Pen qui pointe du doigt les origines immigrés et juives du candidat. Je voudrais vous citer ici le texte de Jacques Attali dans sa dernière rubrique du blog de l’Express parce qu’elle est me semble-t-il importante :

« Dans cette campagne, on aura entendu bien des bêtises, bien des propositions absurdes, bien des méchancetés. Une des pires choses qui fut dites, une des plus honteuses, une des plus méprisables même, fut d’entendre un candidat proclamer qu’un autre n’aura pas du se présenter parce que ses parents étaient d’origine étrangère. Que Jean-Marie Le Pen ait souhaité interdire à Nicolas Sarkozy d’être candidat parce qu’il est d’origine hongroise n’est pas le pire : on ne peut rien attendre de décent de cet homme. Mais le pire est ailleurs : aucun autre candidat, aucun, n’a eu l’idée de protester contre cette ignominie et de manifester une solidarité simplement démocratique à l’égard d’un autre candidat honteusement ostracisé. (…) »

Juste pour vous faire vraiment peur, voilà ce que l’on trouve en surfant un peu sur le site pierre-bleue.net :

« Ce fils de légionnaire hongrois et de mère grecque israélite, égocentrique jusqu'au ridicule, haineux et impulsif, à l'évidence veut le pouvoir absolu… et il ne reculera devant rien pour l'obtenir. Provocations, mensonges, menaces, mises en scène médiatiques, … si rien n'est fait pour le stopper, avec ses complices dans les médias, il ira crescendo dans le populisme au seul but de radicaliser l'opinion, semer la haine, la division, encourager les confrontations entre les communautés, pour au final imposer sa politique du pire, mixant ultra-libéralisme sauvage à l'américaine et régime communautariste ultra-sécuritaire, raciste, à l'israélienne. »

Où est la haine ?

3 réflexions sur « Non à la rhétorique de la peur »

  1. Et bien moi je suis Française installée au Nigeria,j’ai du respect pour ce pays alors s’il vous plait n’utilisez pas des formules toutes
    faites comme « nous ne sommes pas au Nigeria » nous avons aussi des leçons à recevoir des pays africains.

  2. désolé de vous avoir choquée …
    Je n’ai évidemment rien contre le Nigeria mais le fait est que les dernières élections, si l’on en croit les observateurs internationaux, ne s’y sont pas déroulé de la façon la plus transparente.
    Il n’est pas question ici de donner des leçons : je voulais juste signaler que, ailleurs dans le monde, des élections libres et démocratiques, sans manipulations, cela ne va malheureusement pas toujours de soi.
    Désolé encore si mes propos ont pu vous choquer.
    Cordialement.

  3. Quel est le rapport?
    Je trouve un peu léger le rapport vite établi entre l’ensemble de l’électorat de gauche avec les propos de M. Le Pen et ses electeurs.
    Il y aura certes toujours des personnes pour détourner les idées des autres et y ajouter leur racisme/xenophobisme/antisemitisme.
    Le fait que M Sarkozy fasse peur à beaucoup a rarement avoir avec ses origines mais plutôt certaines déclarations limites pour certains.

    D’ailleurs, il existe certaines personnes qui ont peur de Mme Royal pour d’autres raisons et parfois de mauvaises basées sur la mysoginie(Meme si elle en a accusé plusieurs excesivement).

    Ce qui me fait peur moi, c’est le constat que dans la plupart des regions de l’electorat de M. Lepen de 2002 se retrouvent cette année électorat fort de M. Sarkozy.

Les commentaires sont fermés.