Quand on évoque Nagai Gô en France, les plus avertis vous répondent : " Goldorak ! " Les érudits du manga et de l’animation nippone nuanceraient par un " bien sûr, il a créé Goldorak mais ce n’est pas l’œuvre la plus emblématique du Maître ! " L’Univers de Nagai est bien trop vaste et éclectique pour se résumer au grand cornu.
Un des thèmes récurrents du mangaka est l’apocalypse. Gô, né un mois après Hiroshima, a grandi dans un Japon traumatisé par la Bombe A. Parmi ses séries les plus populaires dans ce pays, on compte Devilman ( 1972 ), peuplé de démons et Violence Jack ( 1973 ) qui se situe dans un monde ravagé par un tremblement de terre. Dans la première, le héros est Fudo Akira qui fusionne avec le diable Amon pour combattre des créatures qui menacent notre monde. Concernant la seconde, le protagoniste éponyme est à la recherche de quelqu’un de plus fort que lui et devra affronter le plus dangereux des seigneurs de guerre, Slum King. Par leur scénario solide, ces titres sont les plus accomplis du Maître et derrière l’outrance de certaines cases, se cache une réflexion sur les hommes et le fait que la société est basée sur les rapports de force.
Nagai Gô a, bien entendu, touché un genre apprécié dans l’Archipel, les Mechas. Certes, il y a eu Tetsujin 28-gô, Giant Robo de Yokohama Mitsuteru et bien d’autres dans les années 50-60 mais Mazinger Z, en 1972, est le premier robot géant piloté de l’intérieur. Sa nature, bienveillante ou non, est déterminée par son occupant. Kabuto Kôji, issu de la première catégorie, affronte les diverses créations du docteur Hell et ses sous-fifres, le baron Ashura, moitié homme-moitié femme ( thème récurrent chez Nagai ), et le comte Blocken. Mazinger est la première partie d’une trilogie : l’opus suivant, Great Mazinger ( 1973 ), raconte le combat entre Tsurugi Tetsuya et l’Empire sous-terrain de Mykène et le dernier épisode, Grendizer ( 1975 ), notre Goldorak, narre la lutte de Duke Fleed/ Prince d’Euphor, réfugié sur Terre sous le nom de Umon Daisuke/ Actarus, contre les Forces de Véga. Gô a également co-scénarisé Getter Robo ( 1974 ) avec Ishikawa Ken qui officie au dessin. Et on pourrait encore citer quantité d’œuvres du Maître consacré à ce sujet…
Enfin, Nagai aime dessiner des mangas comiques et osés. Il adore dénuder le genre féminin dans ses histoires. Les plus fameux sont Cutey Honey ( 1973 ), androïde sexy capable de changer d’apparence, en proie avec l’organisation criminelle Panther Claw ; on peut y remarquer, en pitre de service, Hayami Danbei, sosie du Makiba Danbei/ Rigel de Goldorak. Kekkô Kamen ( 1974 ), elle, est une parodie assumée de Gekko kamen, super-héros d’un programme télé des fifties. Ici, l’héroïne est juste vêtue d’un masque, de bottes et de gants et s’oppose à Toenail of Satan, directeur sadique d’un lycée pour filles : il humilie sexuellement les élèves qui ont moins de 19/20 à un examen. L’ambiance est très Pinku Eiga, cinéma rose japonais des années 60. À noter que Gô a été révélé par Harenchi Gakuen ( 1968 ) qui traitait déjà de sado-masochisme en milieu scolaire.
Actuellement, cet auteur n’est pas traduit en France. Par le passé, il y eut bien Goldorak, Devilman, une partie de Getter Robo Gô et une anthologie Mazinger aux éditions Dynamic Visions mais ce fut tout. En Europe, Nagai Gô est surtout distribué en Italie, depuis 2004, par d/visual, la branche internationale de son entreprise Dynamic Planning. C’est d’ailleurs grâce à la version transalpine que je lis le Maître. Pourtant, en 2008, certaines séries furent annoncées pour Japan Expo, mais on n’en vit jamais la couleur. Un malentendu entre les organisateurs de la convention et la compagnie qui devait acheminer les bouquins fut prétexté. Autant dire qu’après la fameuse affaire des DVD pirates de Goldo’ en 2005, cela n’arrange pas les relations de l’Hexagone avec les sociétés qui gèrent l’œuvre de Nagai…
Vous voulez en savoir plus ? Voici le lien d’un excellent forum, Go Nagai, Go ! du québécois Getter Mario :
http://gettermario.dynamicforum.net/forum.htm