Ours d’or du dernier Festival de Berlin, le film de Calin Peter Netzer, « mère et fils » se déroule en Roumanie. Amour maternel castrateur et corruption de l’élite sont les fils conducteurs de cette tragédie. Appartenant à l’élite, la mère, Cornelia, (Luminata Gheorgihu)  tient à mener son monde à la baguette et gare à quiconque ose lui résister. 

Tout allait pour le mieux ou presque dans le meilleur des mondes pour cette bourgeoise. Elle venait de fêter en grande pompe son anniversaire au milieu de ses amis, les gratifiant d’une grotesque danse en couple sur laquelle la caméra a eu la mauvaise idée de trop s‘attarder. 

Escortée comme toujours de sa sœur, elle enchaînera sur une répétition d’opéra quand soudain le monde s’écroulera : Barbu, (Bogdan Dumitrache) son fils, est en garde à vue au commissariat pour avoir renversé mortellement un gamin. Ostensiblement vêtues et décorées comme il sied à leur rang,  mère et sœur débarquent au commissariat après avoir ameuté leurs connaissances, gage d’un traitement de faveur. 

Pas de profil bas, ni même d’empathie pour les « petites gens » que sont les proches de la victime, postées à l’entrée des lieux. Cornelia n’a d’yeux que pour son Barbu et ne s’interdit rien pour le sortir des beaux draps dans lesquels il s’est mis : de la fausse déclaration au graissage de patte en passant par une foultitude de magouilles ! 

Pour cette fois, la maîtrise habituelle du cours des choses lui échappera, les parents de la victime n‘étant pas près de faire l‘impasse sur la justice ;  renforcée par le système en place, marqué par des clivages assez prononcés entre les classes sociales, cette méthode louche quelque peu reliftée a bel et bien survécu à l’ère Ceausescu. 

La crise aura toutefois pour effet de mettre à nu les problèmes familiaux laissés jusque là en état de veille : l’emprise de la mère à effet inhibiteur  sur le fils, avilissant sur son mari, semble avoir atteint ses limites. Cornélia n’en démordra pas pour autant. 

Elle poursuivra sa course effrénée dans l’ultime espoir d’obtenir un retrait de plainte, d’amoindrir la peine de prison à défaut de l‘annuler. Elle ira jusqu‘à exploiter la sensibilité des parents effondrés du môme perdu. 

Filmé en grands plans séquence le résultat est dérangeant ; surtout ce face à face extrêmement éprouvant entre les deux mères appartenant à deux classes aux antipodes l‘une de l‘autre. Difficilement regardable, cette scène de rédemption résume à elle seule la misère de cette Roumanie où la corrélation entre droits et statut social est cinglante. Malheureusement bien nombreuses sont les régions du monde où sévit dans la totale impunité ce détestable fléau…

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