Ah, voici donc une famille (un couple et deux enfants), éliminée par des tirs de mitrailleuses en tentant de fuir Syrte, la « ville de Kadhafi ». Selon l’Associated Press (AP), attribuer les responsabilités n’est «  pas clair ». Traduisez : il ne s’agit pas d’une frappe aérienne des appareils des pays coalisés, il est impossible de pointer du doigt les «  mercenaires étrangers » des forces loyalistes. Ce n’est donc que la « faute à personne ».

Remarquez qu’on ne fuit pas Syrte soumise à des bombardements aériens intensifs. Ni une ville où il n’y a plus de vivre ni d’eau potable, du fait notamment de ces mêmes bombardements. Non. On veut s’échapper de la « ville de Kadhafi ».
J’ai sciemment sucré « hometown » dans le titre (voir l’illustration), parce que c’est plus clair ainsi.

« En compagnie de centaines d’autres résidents… ».
Ah bon, il est donc possible à des centaines d’habitantes et d’habitants de Syrte de s’échapper d’une ville affamée, exsangue, sans subir les tirs des « mercenaires étrangers » et des tireurs fous et vicieux, et pourquoi pas lubriques loyalistes ? Nan. Est-ce seulement possible ? Ne nous avait-on pas seriné que tout fuyard était systématiquement abattu ?
Ou alors, c’est que j’avais mal lu.

 

Le docteur Nuri Naari rapporte que les deux adultes et les deux enfants ont été mitraillés alors qu’ils se dirigeaient vers les positions des « forces révolutionnaires » aux abords de la ville.
C’est où, les « abords » ? Cinq ou dix kilomètres du centre ?
N’exagérons rien. Ce n’est pas forcément un sombre assassinat, ni le tir au civils comme aux pigeons d’argile, de part et d’autre. Il se peut qu’il y ait eu méprise, ou bavure, due à la nervosité.

 

Ce que je relève, c’est que, lorsqu’une atrocité peut être attribuée à « ceux d’en face », soit aux loyalistes (parfois, c’est l’inverse, de la part de la propagande kadhafiste), nul besoin de se réfugier dans le clair-obscur. Et bien sûr, il n’y a pas de frappes aériennes visant des cibles collatérales, ni d’un côté, ni de l’autre.

 

Syrte, soit ses femmes, enfants, handicapés, impotents, vieillards déshydratés, blessées et blessés, &c., va donc pouvoir « bénéficier » de deux jours de « mieux » sans eau et sans vivres.
Encore un généreux bienfait des « révolutionnaires » et des dirigeants de Benghazi. 

« “We couldn’t leave our homes because of the shelling; we had to leave the city,” said Ahmed Hussein as his wife, mother-in-law and two children watched the fighters search their car. ». Traduisez : en raison des bombardements aériens et des tirs de missiles au hasard la malchance des assiégeants. Aussi, sans doute, des balles perdues des loyalistes qui, bizarrement, ne veulent pas trop massacrer des gens de leurs propres tribus.

Médecins sans frontières ne peut s’aventurer dans Syrte parce que ses volontaires n’ont pas la certitude d’être bien accueillis : « no guarantees that the Gadhafi loyalist would hold their fire. ». Traduisez : ne veulent pas non plus risquer de recevoir un missile « révolutionnaire » ou une bombe coalisée qui s’égarerait.

 

Tout est à l’avenant. De Reuters : « But the team of four aid workers, who also had security clearance from pro-Gaddafi forces, heard constant gunfire and so were not able to go into the hospital, the spokesman said. ». Il s’agit de la Croix Rouge. Tiens donc, la Croix Rouge a pu entrer en contact avec les loyalistes, mais pas Médecins sans frontières. Eh, Kadhafi (père ou fils), Kouchner n’est plus le dirigeant de MSF, et il n’est pas sûr que ses équipes soient infiltrées par les honorables correspondants habituels.

 

Après cela, on va conspuer Hugo Chavez qui véhiculerait de la propagande anti-impérialiste. Ce n’est pas tout à fait faux. Mais ne conviendrait-il pas d’abord de balayer devant sa « propre » porte, c’est toute la question.