Médecin de campagne de Thomas Lilti

On est loin des coulisses des hôpitaux  d’Hippocrate, ici le praticien exerce au coeur même de la  campagne française où la fraîcheur de l’air ambiant va jusqu’à traverser le grand écran. Jean-Pierre , (François Cluzet),le médecin de service en visite de ferme en ferme est souvent accueilli en grande pompe par tous les membres d’une famille comme par les chiens, les poules, les jarres ou encore les vaches. Un retour bien mérité pour quelqu’un qui jamais ne ménage sa peine et dont l’exercice quotidien s’apparente à un véritable sacerdoce. La dimension émotionnelle qui s’installe inévitablement entre lui et ses patients ne laisse pas de place à la stratégie de distanciation. 

A cause peut-être d’un rythme infernal de travail doublé d’une absence totale de vie privée, le corps de Jean-Pierre finit par accuser le coup. Même pas peur de l’héminégligence, symptôme de cette tumeur qui cible une partie du cerveau l’empêchant de voir ce qui se passe à gauche. Il mange la moitié de sa pizza, l’autre moitié lui étant invisible. Malgré ce lourd handicap, Jean-Pierre continue de prendre son volant de jour comme de nuit pour toujours voler au secours des autres !

Quand arrive une mystérieuse généraliste, (Marianne Denicourt) pour le seconder, il se montre peu disposé à passer la main convaincu de son "indispensabilité". N’empêche que l’arrivée  de Nathalie, en mode catalyseur, parvient à égayer ce film sombre, d’autant qu’entre ces deux confrères l’alchimie opère à merveille. 

Malgré tout l’attrait que peut exercer le charme de la ruralité, ce n’est pas ce film qui fera naître de ces vocations si chères à Marisol Touraine pour pallier aux déserts médicaux. Quoique…Il faut reconnaître que Thomas Lilti a comme une vision pessimiste de ce monde et de ce métier en particulier ce qui pourrait d’ailleurs expliquer sa reconversion dans le septième art. Derrière sa caméra tout n’est que brassage de misères que viennent à peine effleurer un ou deux moments de grâce ! Aucun détail au service de cette thèse ne nous est épargné même pas le lavage mortuaire. Comme le résume si bien le toubib en avouant être là sinon pour réparer du moins pour bricoler les dégâts causés par une nature impitoyable sans pour autant parvenir à vaincre l’inéluctable. Même les quelques notes d’humour censées contrebalancer le reste sont imbibées d’angoisse, élément consubstantiel au film : entre cet autiste obsédé par la première guerre mondiale, le yoga du rire, la country musique, la chanson finale, overdose ! 

A y regarder de plus près, trouver le juste milieu entre vie privée et vie professionnelle relève d’un exercice d’équilibriste pour un praticien… 

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