Rendons à César ce qui… C’est sur Agoravox et le site du frontiste Grégory Gennaro (FN Marseille) que j’ai découvert l’info : ce « patriote et progressiste », ce « rassembleur et solidaire », rejoint l’opinion du groupe communiste au Sénat qui n’a pas voté la loi « relative aux habitats légers de loisirs et à l’hébergement de plein air ». Je croyais qu’il avait déniché un lièvre avant de m’apercevoir que Marianne2 avait traité le sujet avant lui. Mais, bon, le « monopole du cœur », hein… Cette loi vise, selon lui, à « transformer 85 000 Français (…) ipso facto en SDF ».

C’est bien volontiers que je relaye l’indignation de Grégory Gennaro, du Front national. Je n’ai pas tout vérifié, et je me demande encore si, effectivement, « le Parti communiste s’est timidement abstenu », ne prenant même pas « la peine d’émettre des critiques ». En revanche, quand il dénonce « le silence médiatique le plus total », c’est ni oui, ni non, ou selon, comme on le sent. Mais allez voir l’original. Du texte. Aussi, consultez cet original qui doit bien penser que cette loi obligeant des personnes condamnées à vivre dans des caravanes, des fourgonnettes, sur des campings, vise aussi incidemment à fliquer des ‘estrangers’, des marginaux, que son parti ne défend guère d’habitude. Je me doute un peu que sa motivation est également de fustiger l’UMPS.

Voyez aussi les conséquences de cette loi, vues par Tefy Andriamanana, sur Marianne2. Lourdes. Il y a quand même au moins près de 16 000 résultats Google à propos de cette loi, dont celui menant au site d’Étienne Mourrut, UMP, qui semble fier d’avoir cosigné cette loi. É. Mourrut est pour « un Gard présent dans une France forte ». Et sans SDF, comme le promettait le candidat Sarkozy ?

Je n’ai pas trouvé de site de parlementaire PS approuvant cette loi, mais j’ai peut-être mal cherché.

En revanche, bien sur, République et socialisme, ou le Front de gauche, se mettent, dans la protestation, à l’unisson du frontiste Gennaro.

Effets pervers

Bon, cela va faire du travail supplémentaire pour des associations qui vont « domicilier » des gens en leur fournissant une boîte aux lettres. Mais vous verrez que cela ne suffira pas. Le préfet saura intimer aux brigadiers-pandores (j’aime bien la gendarmerie, mais parfois, elle est bien obligée d’obéir aveuglement) l’ordre d’exiger des factures d’électricité, d’eau, de je ne sais quoi, en sus d’un simple « justificatif de domicile ». Donc, la loi sera difficile à contourner et des gens devront trouver des particuliers pour leur concéder le droit d’occuper un bout de jardin contre du travail au noir. Pas facile à obtenir, l’aide des bons samaritains.

Cette histoire illustre encore fois la méthode Sarkozy : faire semblant de régler les problèmes en légiférant une fois de… quoi, plus, ou pire ?

C’est quand même bien lui qui a poussé à la consommation de BTP qui a ruiné des épargnants, avides de défiscalisation, à construire, comme en Espagne, des résidences « locatives » qui resteront vides, ou c’est un autre ? C’est bien lui qui pousse à la propriété privée au détriment de l’inévitable, car forcée, mobilité (souvent illusoire) des personnes en quête d’emploi ?

Bon, comme je ne sais comment illustrer, je pique à Slovar un visuel. J’aurais pu prendre une vieille couverture du bouquin de Steinbeck, Travels with Charley – In Search of America. Un idéal mature, en vue d’une retraite active : un camping-car, un ordinateur, plus de résidence principale, et des reportages… Peut-être pas de chien. Trop coûteux à entretenir correctement. Encore que… Pour draguer la retraitée à chien-chien qui consent à prêter la baignoire pour se changer un peu de la douche… Tiens, on vient, je crois, de transformer les bains-douches de Montbéliard en espace événementiel avec restaurant : du social, du vivant, de l’humain…

J’y allais deux fois par mois, ailleurs, aux bains-douches, avec maman, histoire de peaufiner le décrassage hebdomadaire alternatif : lessiveuse, juchée sur un tabouret, remplie d’eau chauffée sur le poêle et casseroles d’eau frissonnante sur la gazinière, tiédie, pour le rinçage du p’tiot que j’étais.

Qu’est-ce que c’était bien et moderne, le HLM ! Et pourtant, je ne venais pas tout à fait d’un taudis. On avait l’eau courante à tous les étages, le gaz aussi, et le charbon à la cave.

Même les immigrés…

Ce fut gratiné, la prime au retour de Giscard, pour les étrangers de Sochaux, logés en HLM, et travaillant à la « Peuge » : il a fallu les faire sauter, les immeubles, trop coûteux à entretenir après leur départ. C’était un temps où même les immigrés importés pour bosser étaient presque très correctement logés. Il a raison, Gennaro : même les Français dans la dèche (je ne parle pas des SDF d’Orwell qu’il fréquentait, à Paris, dans les asiles de nuit), sont de nouveau condamnés à de semi-taudis. Le FN m’en avait voulu d’écrire que ses électeurs commerçants s’arrachaient les cheveux, fermaient boutique. Bon, nécessaire rappel, sans rancune aucune… La preuve… Je fais de la réclame pour Gennaro. Comme aurait dit Barnum, je ne saisis pas de travers son patronyme.

Tout cela, c’est politique. Tant mieux.

Penser politique

Au moins, le FN aura peut-être réussi à faire que les militants PS se tapent des escaliers d’immeubles dont les ascenseurs ne fonctionnent plus. On aimerait y voir, redescendant du dernier étage, même en chaise à porteurs, des députées et des sénateurs socialistes, frappant aux portes. Tiens, en compagnie de, peut-être, Jacques Attali. Ou du sémillant Jack Lang.

Pour Dominique Strauss-Kahn, on avait déjà compris que ce n’était pas son style de campagne. Ni vraiment celui de sa femme-de-l’année de compagne. Qui va, à l’occasion, nous faire pleurer dans les chaumières avec sonHuffington Post « à la Framçaise ».
Exotique. Dépaysant. Un peu.
Pas trop…

Il n’y a pas de futures « Trente Glorieuses » en vue. On a déjà un peu trop épuisé la planète, fait trop suer sous les burnous. Va falloir s’y faire…

Alors, pour vous le dire très crûment : cette loi, demain, peut-être après-demain, pas vraiment à la Trinité ou la saint Glin-Glin, c’est peut-être vous qu’elle vise.
Ou moi.
Je n’en sais encore rien.

Bah, peut-être que, comme après la dernière, ils nous feront des logements d’urgence aux murs en carton. Pas sûr du tout.

Peut-être qu’« ils » nous entasseront dans des prisons privées, sous des prétextes quelconques, ou des centres de détention vaguement médicalisés pour les papys-mamys d’entre nous…

Ou qu’ils réviseront cette loi, devenue impossible d’application.

J’aimerais leur dire, à « elles » et « ils », ne poussez pas trop loin le bouchon, et la mémé expulsée de son camping-car dans les orties. Ce n’est pour l’instant qu’un avertissement : pensez politique autrement. Avant que celles et ceux qui vous font vivre renoncent à penser, et réagissent, inconsidérément.

C’est aussi valable pour Grégory Gennaro, qui m’a l’air d’un charmant garçon, rasé de frais et me semblant bien nourri. Quand, aux solidarités entre souchiens (rien de péjoratif, et je mute pour « souchins » si cela peut faire plaisir), se substitueront celles, difficultueuses, entre gueux, les discours racoleurs pour un camp ou un autre ne suffiront plus.

Pour te le dire, Gégé, tout de go, ta France, inspirée « de l’esprit césarien de la Grande Rome, imprégnée de culture républicaine », elle risquerait de vivre comme Rome, florissante grâce aux esclaves. Alors, celle-là : sans nous !