L’adoption, par la voie référendaire, du Quinquennat présidentiel aura renforcé dangereusement et "artificiellement" les pouvoirs du Président de la République.

 

Or, le Président Jacques Chirac aura su, lors de son premier et dernier Quinquennat, rester dans sa fonction présidentielle, qui veut que « le Chef de l’Etat soit le Président élu de tous les Français, l'Arbitre suprême de la Nation, le Gardien de nos Institutions dont il est la clef de voûte ». Il aura surtout su laisser le Gouvernement faire son travail…

 

 

 

Mais, pour le Président Nicolas Sarkozy, il en est tout autrement ! Se faisant tour à tour, Chef suprême de l’UMP, Premier Ministre, Ministre de l’Intérieur ou de la Justice…, il est sur tous les fronts, sur tous les dossiers, sur toutes les commémorations…, n’hésitant pas à politiser dangereusement les Elections Municipales et Cantonales des 9 et 16 mars 2008 !

 

 

Provoquant un tollé général dans le monde judiciaire, le Président Nicolas Sarkozy osera contester publiquement les décisions irrévocables du Conseil Constitutionnel[1], puisqu’il a demandé, à Vincent Lamanda, Premier Président de la Cour de Cassation, de coutourner purement et simplement la Constitution de la Vè République[2].

Cependant, il semble avoir oublié que la Cour de Cassation n’est pas là pour contester une décision du Conseil Constitutionnel… Puis, il semble n’avoir que peu de considération face au caractère non rétroactif de toute loi ou de tout décret !

 

C’est dire, si, pour le Chef de l’Etat, « ensemble, tout devient possible »[3], puisqu’il n’a pas hésité, en formidable communicateur qu’il est, à instrumentaliser ses petites vacances privées aux frais de son ami Vincent Bolloré, sa vie privée, son divorce et son remariage, qu’il livre sur un plateau d’argent à une "certaine" presse assoiffée de ‘’people’’, prête qu’elle est à fouiller dans des poubelles pour faire du ‘’sensationnel’’ plus que lucratif !

L’affaire du ‘’faux’’ SMS révélée honteusement par le Site Internet du ‘’Nouvel Observateur’’ en est la parfaite illustration !

 

 

Comme pour détourner l’attention des Français, le Chef de l’Etat, qui, décidément, est partout, s’en prend à la Shoah : provoquant la surprise, il annonce, lors du dîner du CRIF, que « chaque enfant de CM2 prendra en charge la mémoire d’un enfant juif mort dans les camps de concentration nazis »… Devant le tollé général, il maintient sa décision, tout en revoyant sa copie : « ce sera chaque classe de CM2 qui sera chargée de ce travail de mémoire »

Mais, cette décision, ne va-t-elle pas provoquer un repli identitaire, religieux et ethnique ? De plus, ne risque-t-elle pas de provoquer, chez les enfants, des sentiments de culpabilité ?

Pour louable qu’elle soit, la commémoration de la Shoah ne doit pas faire oublier qu’il y a eu d’autres génocides dont il convient de parler.

Il n'appartient pas aux Politiques d’instrumentaliser l’Histoire : seuls, les enseignants, les chercheurs, les historiens peuvent l’écrire, l’interpréter, l’analyser et la transmettre aux générations futures, ce, pour qu’on n’oublie et qu’on ne recommence jamais !

 

Se tournant vers l’Ecole de la République, le Chef de l’Etat veut réformer et ‘’dégraisser’’ le Mammouth en donnant des directives aux enseignants… Pour lui, « les fondamentaux que sont la lecture, l’écriture, le vocabulaire, la grammaire, les quatre opérations sont nécessaires pour une excellente scolarité… ».

Avec l’aide de Xavier Darcos, Ministre de l’Education nationale, il veut réintroduire la Morale et l’Instruction civique à l’Ecole.

Mais, actuellement, est-il possible de mettre tout ce programme en place, surtout dans des banlieues défavorisées confrontées aux problèmes liés à la précarité, au chômage, à la démission de l’Etat… ?

En effet, comment peut-on demander, à tout élève, de respecter les lois, les institutions, l’autorité de la République, alors que ce même élève est confronté à la précarité subie par ses parents ? La République, peut-elle exiger du respect à ses citoyens, alors qu’elle ne ‘’semble’’ pas respecter le droit, pour chacun de ses citoyens, de disposer d’un emploi, d’un logement salubre, d’un salaire décent ?

Avant la mise en place, ô combien nécessaire, de toutes les réformes voulues par le Président de la République

ne faudrait-il pas penser à éduquer certains parents démissionnaires ?

ne faudrait-il pas penser à faire en sorte que les emplois soient correctement rémunérés ?

ne faudrait-il pas penser à obliger les entreprises à humaniser les conditions de travail de tout salarié, de manière à ce que chacun puisse faire vivre décemment sa famille ou vivre décemment ?

ne faudrait-il pas repenser l’Ecole, ce, de manière à restaurer l’autorité de l’Ecole républicaine ?

ne faudrait-il pas réintroduire les Services de l’Etat dans les banlieues défavorisées ?

ne faudrait-il pas aider efficacement les personnes en situation de précarité ?

Que de questions restées sans réponses…

 

Comme pour confirmer ces interrogations, le baromètre Ifop livre, au ‘’Journal du Dimanche’’, les résultats d’un sondage ‘’désastreux’’ : le Chef de l’Etat, qui recueille 38 % d’opinions favorable, est devancé par François Fillon, son Premier Ministre, qui en obtient 57 %[4].

Pourtant, ils sont tous deux issus de la même formation politique : l’UMP ! C’est du jamais vu dans les annales de la Vè République : comment peut-il y avoir un tel écart, alors que notre pays ne se trouve pas dans une période de cohabitation forcée ? Ne sommes-nous pas près d’une révolution… d’un divorce sans consentement mutuel… annoncé ?

Le peuple français est au bord du ras-le-bol généralisé… Comme pour confirmer cette opinion, voilà qu’un badaud refuse spectaculairement de serrer la main au Président de la République venu visiter le Salon de l’Agriculture…La rue, ne se préparerait-elle pas à gronder avec force ? Les contestations sont multiples :

le pouvoir d’achat des ménages est au plus bas, les prix à la consommation[5] augmentant inexorablement,

le mini traité européen est adopté par la voie parlementaire, ce, malgré le rejet des Français, qui, lors du Référendum du 29 mai 2005, ont massivement rejeté le Projet de loi autorisant la ratification du traité établissant une constitution pour l’Europe,

les atteintes à notre Laïcité se font de plus en plus insistantes et pressantes,

le chômage ne cesse d’augmenter, la précarité également,

de plus en plus de personnes ont du mal à se loger,

les salaires du secteur privé n’ont toujours pas été revalorisés,

des mesures impopulaires, telles les franchises médicales… sont adoptées !…

C’est dire si le Président de la République ne semble pas se rendre compte de ce qui se prépare …

 

Fort de ce catastrophique constat, l’Hebdomadaire ‘’Marianne’’ ose lancer, à la face de la Majorité présidentielle et de ses Alliés du Nouveau Centre, « l’Appel du 14 février pour une Vigilance Républicaine »… C’est dire si, pour la Rédaction du magazine de Jean-François Kahn, « la République est en grand péril »

Dominique de Villepin, ancien Premier Ministre, François Bayrou, Patron du MoDem, Député et ancien Ministre, Ségolène Royal, Présidente de la Région Poitou-Charentes et ancienne Ministre, Jean-Pierre Chevènement, ancien Ministre de l’Intérieur, Maurice Leroy, Député du Loir-et-Cher[6], Corinne Lepage, Ancienne Ministre, Noël Mamère, Député, Bertrand Delanoë, Maire de Paris, Vincent Peillon, Député européen, Jean Christophe Lagarde, Député de la Seine Saint-Denis, Marielle de Sarnez, Conseillère de Paris, André Gérin, Député du Rhône, Christiane Taubira, Député de Guyane, Arnaud Montebourg, Député de la Saône-et-Loire, Jacqueline Gourault, Sénateur du Loir-et-Cher, Jean-Pierre Brard, Député de la Seine-Saint-Denis, Nicolas Dupont-Aignan, Député de l’Essonne, Pierre Lefranc, Administrateur de la Fondation Charles-de-Gaulle et ancien Chef de Cabinet du Général de Gaulle, Jean-Paul Bled, Président des cercles universitaires d’études et de recherches gaulliennes, faisant fi de leurs différences et sensibilités politiques, n’ont pas hésité à être les premiers à signer ce manifeste[7]

Comme pour constater toutes ces dérives du pouvoir, La liste des signataires risque de s’allonger de plus en plus[8]

 

Mais, là, il s’agit, non pas d’une révolte violente, mais d’un avertissement sans frais…, qui devrait être pris en compte par le Chef de l’Etat et son Gouvernement !

 

Des échéances électorales importantes vont être organisées les 9 et 16 mars prochains : les Elections Municipales et Cantonales ‘’2008’’

Pour montrer son accord avec ‘’Marianne’’ dans son « Appel du 14 février pour une Vigilance Républicaine »,  la masse ‘’silencieuse’’ des électeurs pourrait sanctionner le Gouvernement en se rendant massivement aux urnes : la Majorité pourrait perdre des villes, des départements, ce, au profit de la Gauche et du MoDem

Dès lors, il faudra bien se rendre à l’évidence : les Municipales ‘’2008’’ ayant été politisées par le Chef de l’Etat, « on devra tirer, de ces élections municipales et cantonales, des conséquences nationales »[9].

 

 

C’est dire si l’enjeu est de taille…

Que se passera-t-il au lendemain de ces élections locales ? Tout dépendra de la capacité du Chef de l’Etat à agir de manière à mener la politique économique et sociale, qui lui a été demandée par le Peuple français…

Si rien n’est fait, il est à craindre que beaucoup de nos compatriotes considèrent que « l’Appel du 14 février pour une Vigilance Républicaine » lancé par ‘’Marianne’’ ne soit plus du tout suffisant !

 

 

Alors, il se pourrait que nous assistions,

 

soit à un mai 68 en beaucoup plus grave,

      – soit, et ce serait préférable, à des élections législatives anticipées !

 

 

« Ensemble, tout devient possible », pourrait répéter le Chef de l’Etat… Seul, l’avenir nous le dira !

Pourvu que cela se fasse dans la paix et dans l’alternance démocratique !

 

 

 

Pour en savoir plus

 

  

« Appel du 14 février pour une Vigilance Républicaine »  

 

« Les soussignés se réclament de sensibilités très diverses, et ils ont sur un certain nombre de sujets importants des positions très différentes, mais ils ont malgré tout en commun un certain nombre de convictions et de valeurs qu'ils entendent réaffirmer.

– Leur attachement au principe républicain et, en conséquence, leur refus de toute dérive vers une forme de pouvoir purement personnel confinant à la monarchie élective.

– Leur attachement aux fondamentaux d'une laïcité ferme et tolérante, gage de la paix civile.

– Leur attachement à l'indépendance de la presse et au pluralisme de l'information.

– Leur attachement aux grandes options qui ont guidé, depuis cinquante ans, au-delà des clivages partisans, une politique étrangère digne, attachée à la défense du droit des peuples et soucieuse de préserver l'indépendance nationale et de construire une Europe propre à relever les défis du XXI° siècle.

Au-delà de leurs divergences, les soussignés tiennent à rappeler leur engagement à défendre, séparément ou ensemble, ces impératifs, comme toujours cela fut fait au cours de l'Histoire de la République. ».


[1] Le Conseil Constitutionnel a, comme on le sait, censuré certaines dispositions de la Loi sur la Rétention de sûreté, invoquant, au sujet des criminels, violeurs, pédophiles… dangereux, déjà condamnés, « la non rétroactivité de la loi ».

 

 

[2] L’Article 62 de la Constitution de la Vè République stipulant : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle ne peut être promulguée ni mise en application. Les décisions du Conseil Constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles », le Chef de l’Etat n’aurait jamais du saisir la Cour de Cassation !

 

[3] Cette phrase fut son slogan de campagne !

 

[4] Cf. ‘’Metro’’, dans son Edition du lundi 25 février 2008, Jérôme Vermelin : « Sarkozy : plus rien n’est possible ? ».

 

[5] Les produits alimentaires ont augmenté de manière significative depuis novembre 2007. Les prix de l’Immobilier (à la location où à l’accession à la propriété) flambent de manière exagérée…

 

[6] Il semblerait, selon l’Hebdomadaire ‘’Marianne’’, que Maurice Leroy, qui n’a pas demandé de « retirer sa signature », aurait fait savoir, qu’ « au moment de signer, il ignorait les noms des autres signataires »… Il est vrai que le Député du Loir-et-Cher est Membre du Nouveau Centre, Parti politique allié à l’UMP.

 

[7] Cf. ‘’Marianne’’, numéros 565 et 566 ou sur le site Internet : http://www.marianne2.fr

 

[8] En reproduisant « l’Appel du 14 février pour une Vigilance Républicaine » dans son n° 566, ‘’Marianne’’ souhaite que ses lecteurs rejoignent en masse les premiers signataires : il suffit, pour cela, de découper et de remplir le formulaire situé en Page 25 de ce Numéro, puis, de l'envoyer à "Marianne"Appel du 14 février – 32, rue René-Boulanger. 75484 Paris Cedex 10

 

[9] Au soir du Second Tour des Elections régionales ‘’2004’’, la Gauche, qui était pourtant divisée, avait créé la surprise en prenant la présidence de 21 régions françaises sur 22… Lors d’un débat télévisé, qui avait lieu ce soir-là, Jacques Barrot, à l’époque, Président du U.M.P. à l'Assemblée nationale, avait tout simplement déclaré à qui voulait bien l'entendre : « On doit tirer, de ces élections locales, des conséquences nationales ».