Depuis que le ministre bulgare des Affaires étrangères a révélé l’identité des deux complices présumés dans l’attentat anti-israélien de Burgas mettant le Hezbollah dans le collimateur, les yeux des Libanais se sont tous braqués vers Bruxelles. Hier s’est tenu le Conseil européen des ministres des Affaires étrangères au cours duquel devaient être examinées à la loupe toutes les informations relatives à cet attentat, préalable nécessaire afin d‘énoncer le verdict final tant attendu : oui ou non en leur âme et conscience, les ministres européens réunis, doivent-ils, à l’unanimité, condamner le Hezbollah à rejoindre la liste noire des organisations terroristes ? 

A priori, il s’agirait d’une incrimination qui souffrirait d’une « insuffisance patente de supputations », contre laquelle le seul fait d’engager des poursuites, relèverait du parcours du combattant, selon le procureur de Sofia. En effet, le Hezbollah réfute catégoriquement ces accusations qu’il considère comme  faisant partie d’un vaste complot destiné à le démanteler. 

Faire fi du contexte local et régional en marquant du sceau de l’infamie un acteur majeur de la scène politique représenté aussi bien à la Chambre qu’au gouvernement, ferait vaciller encore plus un pays pris dans la spirale infernale de l’instabilité ; un tel séisme aurait un effet comparable à la météorite qui s’est désintégrée dans le ciel de Tcheliabinsk, sinon plus !  

En tout cas, alors que des sanctions ont été prononcées par l’Union européenne contre la Corée du Nord suite à l’essai nucléaire du 12février par Pyongyang, et contre la Syrie, rien du tout n‘a filtré sur le Hezbollah ! Les pressions exercées sur l’Union européenne, par les Etats-Unis et Israël pour sanctionner ce dernier auraient apparemment échoué face à la réticence de certains pays au premier rang desquels, la France. 

La Force intérimaire des Nations-Unies au sud Liban  (FINUL), ainsi que la prise en compte d’autres éléments sans oublier l’honnêteté intellectuelle auraient sans doute conduit à une conclusion salutaire.  Même si cette décision de l’UE dérange les Haririens et compagnie, elle a pour mérite de libérer les méninges de certains responsables, en les rendant plus aptes à traiter le dossier épineux du moment qui porte sur la loi électorale. 

Il se trouve qu’à l’issue de la dernière réunion de la sous-commission ad hoc en charge de la lourde tâche d’élaborer une loi électorale en prévision des législatives du mois de juin prochain, son président, en l’absence de tout consensus avait fait un cuisant aveu d’échec. Le rapport,  fruit d’un labeur de cinq semaines, fait actuellement l’objet de débats virulents au cours des réunions des commissions parlementaires conjointes parmi lesquelles celles du Budget, des Finances, de l’Administration et de la Justice,  de la Défense et de l’Intérieur, de l’Information et des Télécommunications. 

En effet après la vaine bataille entre scrutin majoritaire et celui proportionnel, on était passé au scrutin mixte, une sorte de savant cocktail alliant  proportionnel et majoritaire. Sans grande surprise, ce dernier après avoir buté sur un certain nombre de modalités comme le pourcentage de répartitions entre majoritaire et proportionnel, le nombre de circonscriptions, a fini à son tour par rendre l‘âme. 

Désormais le projet du Rassemblement orthodoxe est mis sur le tapis : chaque communauté élit ses propres représentants sur la base de la proportionnelle. Encensé par les uns, ce projet de loi, véritable casse-tête, serait à bannir pour les autres car il aurait pour effet de fragiliser la paix civile. Selon ses détracteurs, il violerait aussi des articles de la Constitution et mettrait en péril la coexistence en favorisant le sectarisme. 

A la surprise générale, le projet de loi électorale du Rassemblement orthodoxe vient d’être approuvé par les commissions conjointes. Et voilà que Saad Hariri qui convoite toujours son ancienne place de premier ministre, tweete probablement de Paris pour exprimer sa peine par rapport à ce pas en avant :« jour noir pour le pouvoir législatif libanais »… Sans vouloir jouer les Cassandre, il est bien tôt encore pour crier victoire, et on peut s’attendre à tout avant le vote à l’Assemblée…