Tunisie : Cette situation est inacceptable

 

  Par : OBSERVATOIRE LYONNAIS POUR LA DÉFENSE DES LIBERTÉS FONDAMENTALES EN TUNISIE
 
Monsieur le Président,

L’Observatoire lyonnais pour la défense des libertés fondamentales en Tunisie, ami de la Tunisie libre et défenseur des droits de l’homme,  dénonce fermement les propos que vous avez tenus lors de votre récente visite officielle en Tunisie, notamment en déclarant que « l’espace des libertés progresse ».

Cette déclaration est une contre vérité, que confirment les rapports périodiques des ONG internationales crédibles comme Amnesty International, Human Rights Watch, la FIDH, l’OMCT, l’ACAT.

De même, le Département d’Etat américain ne cesse de dénoncer dans ses rapports annuels sur la Tunisie les violations des droits de l’homme et l’absence de toute perspective démocratique.

La France elle-même a dénoncé officiellement ces violations par l’intermédiaire de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme auprès du Premier Ministre le 14 novembre 1996 et le 19 octobre 1999.

Les recommandations à la Tunisie du Comité des Droits de l’Homme de l’ONU  (82e session – 4 avril 2008) soulignent sans ambiguïté ses doutes sur de nombreux points relatifs aux droits de l’homme ; pour exemple, cet extrait du § 12 « L’État partie devrait interdire l’usage d’aveux obtenus sous la torture, et ce devant toutes juridictions. Il devrait s’assurer en pareil cas que le fardeau de la preuve n’incombe pas aux victimes. ».

Le Parlement européen vote périodiquement des résolutions pour formuler ses inquiétudes sur les violations des droits de l’homme en Tunisie. En octobre 2007, la présidente de la Sous commission des droits de l’homme déclarait que « la situation des droits de l’homme en Tunisie était inquiétante »

Le Sénat français propose régulièrement des résolutions dans le même sens ; pour exemple, la proposition de résolution du 26 janveir 2005, faisant suite aux échanges initiés par la communication de Mme Alima Boumediene-Thiery, sénatrice.

Sur le plan judiciaire, Abdallah Kallel, actuel Président de la Chambre des Conseillers, a fait l’objet en Suisse d’une information judiciaire pour crimes de torture et il a dû fuir précipitamment la Suisse pour la Tunisie où le Général Ben Ali l’a nommé immédiatement Conseiller personnel.

Un autre grand criminel : le Général Habib Ammar a été protégé par le Président tunisien qui  l’a nommé président du Comité Préparatoire des Jeux Méditerranéens de Tunis en 2000.

De même, le Général Ben Ali a protégé un autre criminel, Khaled Ben Said qui a torturé de nombreuses femmes. L’une d’elles l’a poursuivi devant la justice française, mais il a pu échapper à la justice française dans des circonstances non encore élucidées alors qu’il résidait à Strasbourg en qualité de Consul de Tunisie.

Monsieur le Président,

Ce brillant palmarès, non exhaustif,  ne semble pas vous émouvoir outre mesure, pas plus que  la liste quotidienne des persécutions et harcèlements subies par la société civile tunisienne : les associations, les partis d’opposition, les syndicalistes, les journalistes, les militants des droits de l’homme, notamment les militantes féministes que Mme Rama Yade n’a pas pris le temps de rencontrer lors de votre visite en Tunisie.

L’Association des magistrats tunisiens (AMT) continue à être persécutée depuis le changement illégitime de sa direction en 2005, avec interdiction de voyager pour ses membres indépendants. Les avocats courageux défendant les persécutés du régime de Ben Ali paient un lourd tribut en harcèlements quotidiens, violences physiques et emprisonnements.

La liberté de la presse est totalement inexistante.

Pour exemple, l’Observatoire lyonnais rappelle le cas du journaliste Slim Boukhedhir qui croupit en prison depuis novembre 2OO7 pour avoir dénoncé dans ses articles la corruption entretenue par la famille présidentielle. La censure qui touche les médias a pris des proportions telles que les journalistes de La Presse, l’organe officieux du gouvernement, ont récemment protesté contre les pressions subies ; les journaux d’opposition, comme Mouatinoun et El mawkif, continuent de subir un sévère étranglement financier qui a motivé la récente  grève de la faim d’un mois de leurs militants Rachid Khéchana et Mongi Ellouz.

La répression violente des mouvements sociaux s’est récemment illustrée, lors de la révolte du bassin minier de Gafsa en réaction au traitement réservé aux jeunes diplômés et l’iniquité du recrutement des cadres miniers :  mouvement violemment réprimé, avec un mort et de nombreux blessés, suivi de nombreuses arrestations.

Mais si cette politique de terreur a pu continuer à être pratiquée contre toute velléité d’indépendance de la société civile ou de lutte pour ses droits élémentaires à la dignité, c’est surtout grâce à la torture brandie comme une épée de Damoclès sur la tête de chaque citoyen menacé à tout instant d’être arrêté par une police redoutable par son nombre et par ses méthodes brutales. Il est important d’affirmer clairement que la torture constitue la principale maladie dont souffre le corps social tunisien ; elle représente le principal obstacle à toute  amélioration dans le domaine des libertés individuelles et publiques.

Monsieur le Président,

 La torture constitue un fléau extrêmement grave en Tunisie, alors qu’elle a   ratifié la Convention contre la torture et autres traitements cruels inhumains et dégradants (le 23 septembre 1988). Vous ne sauriez ni le nier, ni le sous estimer, entre autres depuis la déclaration de la Cour européenne  (février 2008) dans l’Affaire de Nassim Saadi où elle a affirmé le caractère grave de la pratique de la torture en Tunisie. Cette déclaration européenne venant de son instance judiciaire la plus haute constitue un incontestable démenti à vos propos sur la situation des droits de l’homme en Tunisie, en soulignant non pas de simples abus, mais un « crime de droit international », systématiquement et massivement pratiqué dans tous les locaux de police du territoire tunisien et en particulier dans les locaux du Ministère de l’Intérieur à Tunis.

Alors Secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan ne déclarait-il pas, le 23 juin 2000 : « La torture est un CRIME CONTRE L’HUMANITE que rien en saurait justifier et que doit combattre la communauté internationale ».

Cette situation est inacceptable.

L’Observatoire lyonnais vous demande de déclarer, à l’occasion de la prochaine présidence française de l’Union Européenne, le gel des accords signés entre l’Union européenne et la Tunisie, conformément à et en application de l’Article 2 de l’Accord d’association qui conditionne celui-ci au respect des Droits de l’homme. Ce gel sera le seul espoir de pousser le régime de Ben Ali à mettre fin à une attitude criminelle que la conscience humaine universelle réprouve et condamne fermement.

Allez vous renier, monsieur le Président, «  l’Europe protectrice »que vous aviez  promise ?

Allez-vous reprendre à votre compte le propos de votre ministre des Affaires étrangères, parlant de « péché véniel … ».

Nous vous prions de recevoir, Monsieur le Président,  nos salutations respectueuses.

 

Source GENERATION TUNeZINE – (20minutes.fr/blog du 15 mai 2008)

Tunisie : Cette situation est inacceptable

 

  Par : OBSERVATOIRE LYONNAIS POUR LA DÉFENSE DES LIBERTÉS FONDAMENTALES EN TUNISIE
 
Monsieur le Président,

L’Observatoire lyonnais pour la défense des libertés fondamentales en Tunisie, ami de la Tunisie libre et défenseur des droits de l’homme,  dénonce fermement les propos que vous avez tenus lors de votre récente visite officielle en Tunisie, notamment en déclarant que « l’espace des libertés progresse ».

Cette déclaration est une contre vérité, que confirment les rapports périodiques des ONG internationales crédibles comme Amnesty International, Human Rights Watch, la FIDH, l’OMCT, l’ACAT.

De même, le Département d’Etat américain ne cesse de dénoncer dans ses rapports annuels sur la Tunisie les violations des droits de l’homme et l’absence de toute perspective démocratique.

La France elle-même a dénoncé officiellement ces violations par l’intermédiaire de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme auprès du Premier Ministre le 14 novembre 1996 et le 19 octobre 1999.

Les recommandations à la Tunisie du Comité des Droits de l’Homme de l’ONU  (82e session – 4 avril 2008) soulignent sans ambiguïté ses doutes sur de nombreux points relatifs aux droits de l’homme ; pour exemple, cet extrait du § 12 « L’État partie devrait interdire l’usage d’aveux obtenus sous la torture, et ce devant toutes juridictions. Il devrait s’assurer en pareil cas que le fardeau de la preuve n’incombe pas aux victimes. ».

Le Parlement européen vote périodiquement des résolutions pour formuler ses inquiétudes sur les violations des droits de l’homme en Tunisie. En octobre 2007, la présidente de la Sous commission des droits de l’homme déclarait que « la situation des droits de l’homme en Tunisie était inquiétante »

Le Sénat français propose régulièrement des résolutions dans le même sens ; pour exemple, la proposition de résolution du 26 janveir 2005, faisant suite aux échanges initiés par la communication de Mme Alima Boumediene-Thiery, sénatrice.

Sur le plan judiciaire, Abdallah Kallel, actuel Président de la Chambre des Conseillers, a fait l’objet en Suisse d’une information judiciaire pour crimes de torture et il a dû fuir précipitamment la Suisse pour la Tunisie où le Général Ben Ali l’a nommé immédiatement Conseiller personnel.

Un autre grand criminel : le Général Habib Ammar a été protégé par le Président tunisien qui  l’a nommé président du Comité Préparatoire des Jeux Méditerranéens de Tunis en 2000.

De même, le Général Ben Ali a protégé un autre criminel, Khaled Ben Said qui a torturé de nombreuses femmes. L’une d’elles l’a poursuivi devant la justice française, mais il a pu échapper à la justice française dans des circonstances non encore élucidées alors qu’il résidait à Strasbourg en qualité de Consul de Tunisie.

Monsieur le Président,

Ce brillant palmarès, non exhaustif,  ne semble pas vous émouvoir outre mesure, pas plus que  la liste quotidienne des persécutions et harcèlements subies par la société civile tunisienne : les associations, les partis d’opposition, les syndicalistes, les journalistes, les militants des droits de l’homme, notamment les militantes féministes que Mme Rama Yade n’a pas pris le temps de rencontrer lors de votre visite en Tunisie.

L’Association des magistrats tunisiens (AMT) continue à être persécutée depuis le changement illégitime de sa direction en 2005, avec interdiction de voyager pour ses membres indépendants. Les avocats courageux défendant les persécutés du régime de Ben Ali paient un lourd tribut en harcèlements quotidiens, violences physiques et emprisonnements.

La liberté de la presse est totalement inexistante.

Pour exemple, l’Observatoire lyonnais rappelle le cas du journaliste Slim Boukhedhir qui croupit en prison depuis novembre 2OO7 pour avoir dénoncé dans ses articles la corruption entretenue par la famille présidentielle. La censure qui touche les médias a pris des proportions telles que les journalistes de La Presse, l’organe officieux du gouvernement, ont récemment protesté contre les pressions subies ; les journaux d’opposition, comme Mouatinoun et El mawkif, continuent de subir un sévère étranglement financier qui a motivé la récente  grève de la faim d’un mois de leurs militants Rachid Khéchana et Mongi Ellouz.

La répression violente des mouvements sociaux s’est récemment illustrée, lors de la révolte du bassin minier de Gafsa en réaction au traitement réservé aux jeunes diplômés et l’iniquité du recrutement des cadres miniers :  mouvement violemment réprimé, avec un mort et de nombreux blessés, suivi de nombreuses arrestations.

Mais si cette politique de terreur a pu continuer à être pratiquée contre toute velléité d’indépendance de la société civile ou de lutte pour ses droits élémentaires à la dignité, c’est surtout grâce à la torture brandie comme une épée de Damoclès sur la tête de chaque citoyen menacé à tout instant d’être arrêté par une police redoutable par son nombre et par ses méthodes brutales. Il est important d’affirmer clairement que la torture constitue la principale maladie dont souffre le corps social tunisien ; elle représente le principal obstacle à toute  amélioration dans le domaine des libertés individuelles et publiques.

Monsieur le Président,

 La torture constitue un fléau extrêmement grave en Tunisie, alors qu’elle a   ratifié la Convention contre la torture et autres traitements cruels inhumains et dégradants (le 23 septembre 1988). Vous ne sauriez ni le nier, ni le sous estimer, entre autres depuis la déclaration de la Cour européenne  (février 2008) dans l’Affaire de Nassim Saadi où elle a affirmé le caractère grave de la pratique de la torture en Tunisie. Cette déclaration européenne venant de son instance judiciaire la plus haute constitue un incontestable démenti à vos propos sur la situation des droits de l’homme en Tunisie, en soulignant non pas de simples abus, mais un « crime de droit international », systématiquement et massivement pratiqué dans tous les locaux de police du territoire tunisien et en particulier dans les locaux du Ministère de l’Intérieur à Tunis.

Alors Secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan ne déclarait-il pas, le 23 juin 2000 : « La torture est un CRIME CONTRE L’HUMANITE que rien en saurait justifier et que doit combattre la communauté internationale ».

Cette situation est inacceptable.

L’Observatoire lyonnais vous demande de déclarer, à l’occasion de la prochaine présidence française de l’Union Européenne, le gel des accords signés entre l’Union européenne et la Tunisie, conformément à et en application de l’Article 2 de l’Accord d’association qui conditionne celui-ci au respect des Droits de l’homme. Ce gel sera le seul espoir de pousser le régime de Ben Ali à mettre fin à une attitude criminelle que la conscience humaine universelle réprouve et condamne fermement.

Allez vous renier, monsieur le Président, «  l’Europe protectrice »que vous aviez  promise ?

Allez-vous reprendre à votre compte le propos de votre ministre des Affaires étrangères, parlant de « péché véniel … ».

Nous vous prions de recevoir, Monsieur le Président,  nos salutations respectueuses.

 

Source GENERATION TUNeZINE – (20minutes.fr/blog du 15 mai 2008)

Lire la suite : http://tunisiawatch.rsfblog.org/archive/2008/05/15/lettre-ouverte-a-nicolas-sarkozy.html.