Les Portugais se prononcent sur la dépénalisation de l’avortement

Les électeurs portugais ont commencé à se rendre aux urnes dimanche pour se prononcer par référendum pour ou contre la dépénalisation de l'avortement qui permettrait aux femmes d'interrompre librement une grossesse au cours des dix premières semaines.

De petits groupes ont commencé à affluer vers les bureaux de vote à leur ouverture, à 08H00 locales (même heure GMT), malgré la pluie. Les derniers sondages ont laissé prévoir une majorité de "oui" mais une faible participation pourrait jouer en faveur des adversaires de la dépénalisation, comme lors d'un précédent référendum sur la question, en 1998.
Une abstention de 68% avait alors permis la victoire du "non" à une faible majorité de 50,7%. Lors des messes célébrées dimanche les prêtres ont rappelé dans leurs homélies la doctrine de l'Eglise catholique qui, dans les dernières semaines, a mobilisé tous ses moyens pour persuader les électeurs de se prononcer contre "le crime abominable" de l'avortement, dans un pays qui se déclare catholique à plus de 90%.



Dans la paroisse Sao Joao Brito, à Lisbonne, le père Lorenzo Sebastiao Dias a souligné "la valeur absolue et inviolable de la vie de la conception à la mort". "Que personne ne manque, que personne ne s'abstienne de remplir son devoir civique", a-t-il demandé, invitant les fidèles à "suivre le chemin du Seigneur" et non celui des "impies", sans pour autant donner explicitement de consigne de vote, ce qui enfreindrait la loi électorale.
La loi portugaise, une des plus restrictives de l'Union européenne, prévoit actuellement des peines pouvant aller jusqu'à trois ans de prison pour les femmes qui pratiqueraient une interruption volontaire de grossesse (IVG), sauf en cas de viol, de danger pour la vie de la mère ou de malformation du foetus.

La dépénalisation de l'avortement a fait l'objet de débats animés dans la presse, sans guère passionner la population.

Alors que douze organisations d'inspiration catholique formées pour l'occasion ont défendu le "non", les partis de gauche et cinq mouvements de citoyens ont milité pour le "oui".
Ces derniers ont notamment souligné la nécessité de mettre fin à "la honte nationale des avortements clandestins" et leur cortège de "souffrance, d'humiliation et de risques" pour les femmes d'origine modeste notamment.

Selon l'Association pour le planning familial, 18.000 avortements ont été pratiqués illégalement en 2005 au Portugal et ont conduit 10.000 femmes aux services des urgences des hôpitaux pour diverses complications.

Le Premier ministre socialiste, José Socrates, est personnellement intervenu en faveur de la dépénalisation, qui, a-t-il dit, ferait passer le Portugal du conservatisme à "la modernité et au progrès".

Pour que le résultat du référendum soit contraignant la participation doit dépasser la moitié des 8,7 millions d'inscrits. M. Socrates a cependant annoncé qu'en cas de majorité du "oui" la loi serait modifiée même si ce seuil n'était pas atteint. Les électeurs ont à répondre à la question : "êtes-vous d'accord avec la dépénalisation de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) si elle est réalisée, à la demande de la femme, dans les dix premières semaines de grossesse, dans un établissement de santé légalement autorisé ?"

Les bureaux de vote doivent fermer à 19H00. Les premières estimations ne devraient être annoncées qu'à 20H00, dans l'attente de la fermeture des bureaux aux Açores, une heure plus tard que sur le continent.