Souvenons nous, en juin dernier,  le chef de l'État français et le président américain, ont fait assaut d'amabilité lors d'une conférence de presse commune après un entretien d'une heure et demi au Palais de l'Élysée.

"Nous avons pu vérifier que nous avons de nombreuses convergences, sur beaucoup de sujets. Nous avons parfois des nuances, c'est normal", avait déclaré Nicolas Sarkozy, en soulignant entre eux «  un dialogue confiant" : "L'amitié et l'alliance n'empêchent pas la France de déterminer ses positions en toute indépendance mais elles permettent de gérer de façon apaisée nos différences."

 Et George Bush avait   réaffirmé que la France était "le tout premier ami de l'Amérique" et  qu’à l’occasion de sa visite à Paris  il avait "conforté son  amitié personnelle" avec "Nicolas".

 Très élogieux le Président Américain  s’était plu à   déclarer devant la presse  : "C'est un homme intéressant, il a beaucoup d'énergie, il est très sage", et après avoir dîné avec son épouse Laura au  Palais de l'Élysée, Georges Bush très galant  s’était incliné dans un vibrant hommage pour célébrer les qualités de la nouvelle Madame Carla Bruni Sarkozy en déclarant  à son ami : "Nous avons pris beaucoup de plaisir à rencontrer votre épouse, une femme intelligente, très compétente et je comprends pourquoi vous l'avez épousée, et je comprends également pourquoi elle vous a  épousé.

Note : exit Cecilia !

À l'issue d’une conférence de presse, Nicolas Sarkozy avait  tenu à   conforter  en prenant le soin, sur une centaine de mètres,  de  raccompagner  à pied George Bush à l'ambassade des États-Unis,  proche  de l'Élysée et dont la façade arborait un gigantesque drapeau français.

 Enfin Nicolas et son épouse, étaient venus radieux  y retrouver le jour suivant  le couple présidentiel américain  pour un nouveau dîner et célébrer une nouvelle fois leur parfaite entente.

Depuis leur amitié n’a jamais été démentie, et c’est tout naturellement préséance exige,  alors que le président américain a confirmé en début juillet qu’il serait présent  le 8 août à Pékin à la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques. que Nicolas a  tout de suite fait savoir,  après l’annonce de Georges Bush,  qu’il répondrait à l’invitation la « semaine prochaine », laissant ainsi supposer sans l’affirmer,  qu’il s’y rendrait, alors que certains dirigeants européens  la boycottent et que d'autres l'évitent .

 Le chef de l'Etat français, qui porte depuis début juillet et pour six mois la Présidence six de l'Union européenne, multipliait depuis l’annonce de Georges Bush des  signes laissant supposer  qu'il serait  présent à Pékin et il avait laissé entendre  que sa réponse serait  conditionnée par les progrès réalisés au Tibet et certains médias prématurément avaient prétendus que  Nicolas Sarkozy aurait depuis début juillet  annoncé aux dirigeants de l'UMP sa participation à la cérémonie. Cette information avait été immédiatement  démentie par l’Elysée.

 Mais le suspens n’a pas duré longtemps,  tout aussitôt  après, (« mettant ses pas dans ceux de son  ami américain » selon les médias) Nicolas Sarkozy a annoncé par voie de communiqué et sans la moindre allusion à la situation au Tibet, qu'il assisterait à la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Pékin, le 8 août prochain.

Nicolas Sarkozy peut se sentir conforté par le vote des eurodéputés: ils avaient  renoncé, lors d'un vote, à demander le boycottage des JO de Pékin, comme ils en avaient brandi la menace, en avril, en pleine répression des émeutes de Lhassa. Puis,  le Parlement européen s’est  contenté d'appeler la Chine à respecter sa promesse d'améliorer les droits de l'homme, promesse faite en 2001 lorsque Pékin a obtenu les JO.

 "Le président a pris une décision sage, responsable. Les conditions sont remplies pour que le dialogue avec un pays de plus d'un milliard d'habitants continue", a estimé le Premier Ministre François Fillon.

Mais à l’opposé, la décision de M. Sarkozy, qui se rendra aussi à Pékin en tant que président en exercice de l'Union européenne, a été aussitôt critiquée tant  par l'opposition de gauche, que d’autres intervenants politiques et associatifs :

Monsieur  François Hollande Chef du parti socialiste, a estimé que M. Sarkozy avait "cédé aux pressions chinoises" et dans un communiqué, le PS a demandé à M. Sarkozy de "recevoir le dalaï lama au cours de sa visite en France".

De son côté, Robert Ménard, président de Reporters sans Frontières (RSF),  a  critiqué Nicolas Sarkozy sur LCI : "J'ai une autre conception d'un chef de l'Etat. Ce n'est pas un VRP  ………  On n'aura pas plus de contrat parce qu'on fait des courbettes"

 

Venu présenter devant le Parlement européen les priorités du semestre de présidence française de l'UE, Nicolas Sarkozy a été pris à partie par Daniel Cohn-Bendit, le coprésident du groupe des Verts, qui lui reproche sévèrement d'assister à la cérémonie d'inauguration des Jeux olympiques, le 8 août prochain à Pékin.

Le 10 Juillet au Conseil du Parlement  Européen, revêtu pour la circonstance du tee-shirt noir de Reporters sans frontières, où les anneaux olympiques sont représentés  en menottes,

Daniel Cohn Bendit, l'eurodéputé vert a pris à partie Nicolas Sarkozy en lui reprochant très sévèrement d’assister à la cérémonie d’inauguration des Jeux Olympiques. C’est avec colère, en parlant de scandale,  que Dany le Rouge indigné,  retrouvant les accents de sa jeunesse,   a tonné d’une voix très forte   : "Quand vous rédigerez votre autobiographie, vous regretterez ce que vous avez fait ….. Monsieur le Président, c’est une honte, c’est minable d’aller à l’ouverture des Jeux olympiques",  … vous aviez "une occasion en or" de dire : "Je ne participerai pas à la mascarade du Parti communiste chinois".

 Monsieur Graham Watson lui aussi eurodéputé dans la même séance avait argumenté : "La France nous a donné les droits de l'Homme, maintenant la France doit être au premier plan dans leur défense, chez nous mais aussi à l'étranger en utilisant l'Union pour la Méditerranée et en condamnant les atteintes de la Chine envers les dissidents"

"Chacun a le droit d'avoir un regard sur la meilleure façon" de défendre les droits de l'Homme, a répondu le président français, tout en en expliquant  que "ce n'est pas par l'humiliation de la Chine que l'on fera progresser la question des Droits de l'Homme" et tout en soulignant qu'il entendait "y aller, et parler des droits de l'Homme, et les défendre", Monsieur  Sarkozy a précisé qu'il ne pensait "pas qu'on puisse boycotter un quart de l'humanité".

Entre temps, la chine qui attendait patiemment que le Président confirme son intention,  s’était préalablement  positionnée immédiatement au plan politique, et   l'ambassadeur chinois à Paris  avait promis des « conséquences graves » en cas de rencontre entre le chef de l'Etat français et le leader spirituel tibétain qui «serait contraire au principe de non-ingérence des États dans leurs affaires intérieures».

En clair, par « conséquences graves », des commentateurs avertis avaient  interprété qu’il  faudrait choisir entre cet entretien et des contrats portant sur 56 rames de TGV et plus d'une centaine d'Airbus.

 Tout à la suite,  l’ambassadeur de Chine à Paris posant maladroitement ses pieds dans le plat  avait  déclaré que la Chine  déniait au président français le droit de recevoir le dalaï-lama lors de sa prochaine visite en France, mi-août.

Note : Tiens donc ! De quoi me mêle-je ?

Convoqué  immédiatement au Quai d'Orsay par Monsieur Bernard Kouchner surpris de cette déclaration, l'ambassadeur chinois en France a maintenu son opposition à une entrevue entre Nicolas Sarkozy et le leader tibétain. Monsieur  Kong Quan, à peine sortie du Quai d’Orsay, a remis ça devant la presse : «Nous sommes fermement contre ce genre de rencontre», a répété l'ambassadeur sans évoquer les «conséquences graves» dont il avait parlé la veille ……

 "Le Tibet, c’est une affaire purement chinoise et le dalaï-lama, c’est quelqu’un qui a une double face, un double langage. Il ne faut pas s’ingérer dans les affaires intérieures d’un pays, en l’occurrence du mien, dans cette affaire »

Ainsi en dépit de la présence confirmée  à l’ouverture des Jeux olympiques du Président Français, la Chine peut considérer  un   éventuel tête-à-tête entre Nicolas Sarkozy et le leader tibétain comme une sorte de soutien  et en  clair, la Chine  qui dans son expression traditionnelle « oui ou non »   ignore les nuances  prévient implicitement : si la France accueille le dalaï-lama, elle est avec lui et  si elle est avec lui, elle est contre la Chine.

 Le Quai d'Orsay  dubitatif et soucieux de « polir » l’incident  a ensuite répliqué  que la France déciderait  «en toute indépendance».

 Monsieur Sarkozy lui-même a protesté en déclarant : « Ce n’est pas à la Chine de fixer mon agenda et de fixer mes rendez-vous"  et il a averti  la Chine que personne ne pouvait lui "interdire" de rencontrer un prix Nobel comme le dalaï lama ».

Mais il n’a pas jugé bon de préciser   s'il le verrait. "J'aurais l'occasion de prendre d'autres initiatives et je les communiquerai le moment venu", a-t-il  ajouté.

(Rappelons que Monsieur Sarkozy  interrogé a lors d'une conférence de presse au Parlement européen à Strasbourg sur une rencontre avec le leader spirituel tibétain  avait déjà soutenu cet argument : «est-ce qu'il serait interdit de rencontrer un prix Nobel ? Je me demande bien qui pourrait interdire une chose pareille" et en ce sens il n’a pas tort de remettre les choses au point. )

Enfin le Président Français  s’est exprimé sur l’incident  en déclarant :

"J'ai dit que les propos de l'ambassadeur de Chine étaient maladroits, étaient déplacés. Je rajoute qu'ils ont donné le sentiment d'une brutalité que je n'accepte pas" ….. "Il s'est excusé. L'incident est clos", a ajouté le chef de l'Etat.

A l’étranger les réactions n’ont pas manqué  et pour ne citer qu’un exemple  le «  Právo » (République tchèque) commente :

« Après Bush, Sarkozy aussi se rendra aux JO

«  ……………….le boycott de la cérémonie d'ouverture "devait être un geste clair « par lequel les puissants du monde démocratique devaient montrer qu'ils ne considèrent pas « les droits de l'homme comme un simple aparté dans leurs discours. George Bush ne « manquera pas le grand spectacle à Pékin car, apparemment, il ne veut pas vexer le peuple « chinois. Sarkozy fait désormais la même chose. On verra bien qui d'autre se manifestera « pour que les loges d'honneur du stade olympique ne restent pas vides. Comme le dit la « devise : ce ne sont que des Jeux. Pourquoi faudrait-il prendre en compte les droits de « l'homme ? … Toute cette affaire fait penser à un bouton de chemise. Si l'on a boutonné le « premier au mauvais endroit, l'ensemble de la chemise sera boutonnée de travers." « (10.07.2008)

 Note : le 10 juillet  treize pays sur  les vingt sept de l’Union Européenne devaient  se trouver représentés à l’ouverture des JO de Pékin.