Vues du dixième arrondissement de Paris, ou le taux d'abstention est inférieur à 48 %, les élections européennes 2009 consacrent l'enracinement de Gaspard Delanoë, toutefois devancé par la liste Cannabis sans frontières, mais de très peu… Pour le reste de la France, et de l'Europe, on en vient à se demander si on ne nous fait pas prendre des vessies pour des lanternes. Une France « bleue de Bleu » dans une Europe outre-mer ? Allons donc !

Surprise, surprise ! Avec 71 voix sur près de 23 000 exprimées, la liste Pour une Europe de Gibraltar à Jérusalem, de Gaspard Delanoë – le vrai ! – soutenue résolument par le Pffttt (Parti faire un tour) et formellement mais guère davantage par le PrRoUt (Parti de rien, revenu de tout), a été devancée par la liste Cannabis sans frontières. Celle-ci, avec une voix de plus, emporte 0,31 % des suffrages, soit 0,04 points de plus que la liste Gib-Jér (comme nous l'appelions familièrement). Pour l'ensemble de Paris, en revanche, l'écart est incontestable. La liste menée par Farid Ghehouieche, Cannabis sans frontrières cumule 1379 voix (0,2 %), l'Europe de Gibraltar à Jérusalem ne totalisant que 360 voix, loin cependant devant la liste Communistes, trois voix pour tout Paris. 

Ce n'est pas tant l'absence d'un accord programmatique entre Gaspard Delanoë et le PRrOuT (représenté par son præsident-propagandiste-maréchal, votre serviteur) que l'incertitude du sort qui explique ce résultat. Il fallait télécharger sur Facebook les bulletins de la liste menée par Gaspard Delanoë. Une panne dans un cybercafé (pas malin de surcharger le compteur de la sorte) est à l'origine de cet échec tout relatif. Et non pas, comme on l'a cru un instant, les menées frauduleuses de la liste Cannabis sans frontières qui avait certes tenté d'intercepter les votantes et votants pour Gaspard en leur proposant des tapis en chanvre et divers objets tressés. Dans cet arrondissement, on relève que la liste Communistes a recueilli une voix et la liste pour l'Esperanto 33 suffrages. Voilà pour l'essentiel. Pour le reste, relevons que la liste Dany-Bové-Joly d'Europe écologie est arrivée en tête, très largement, avec 8 316 voix (soit 35,78 % des suffrages).

Une page de réclame propagandiste éhontée…

Demain, soit ce 8 juin 2009, hormis quelques politilogues n'ayant pas droit aux tribunes de la presse écrite ou audiovisuelle, tout le monde aura retenu que la France est bleue, tout comme peut l'être l'Europe. Par quelle magie y parvient-on ? D'abord, en coloriant en bleu UMP des départements où cette formation fait jeu égal avec des formations soit nettement de gauche, soit de sensibilité de gauche. Il fallait que, après la crise financière, la confiance soit rétablie, du moins en façade. C'est bien vu. Les cartes de France bleutées de Libération et du Parisien (ex-Libéré) vous dictent ce qu'il faut penser.
Le Monde a préféré, et c'est quand même visuellement plus proche du réel, donner un demi-camembert établi sur la base d'une projection en sièges. Et que voit-on ? Que gauche traditionnelle et écologistes d'Europe écologie (majoritairement de sensibilité de gauche, sauf erreur ou cécité partisane de ma part, ce qui serait étonnant car le PRRouT est au-dessus des partis) font jeu égal avec la droite traditionnelle, soit le MoDem, et les partis frères de l'UMP et du FN.
L'important n'est pas ce qui est mais ce qui est perçu. Dans le genre, Le Figaro a fait très fort. Les 8,5 % estimés des toutes petites listes (donc listes de Gaspard Delanoë et Cannabis sans frontières incluses) se retrouvent classées à l'extrême-droite. Du très grand art. Du coup, la droite, MoDem inclus, se retrouve largement majoritaire.

Et si on nous avait fait le même coup au niveau européen ?
Là, j'attends de voir les résultats, tous les résultats. Ce que je sais, c'est que les toutes petites listes ont manifesté un vrai rejet des formations traditionnelles. Si on considère que les abstentionnistes l'ont majoritairement fait parce qu'elles et ils n'ont plus la moindre confiance dans les élus des partis traditionnels, et que des votant·e·s ont voté sciemment n'importe quoi, et que les petites listes sont une manière de dénoncer les jeux politiciens, c'est près de 70 % des électrices et électeurs qui laissent les formations traditionnelles et leurs marges « jouer à la politique ». Dans cet arrondissement de Paris, j'ai même vu une « extrême-centriste » de sensibilité vaguement de gauche voter NPA. Histoire de voter. Et de renvoyer dans leurs cordes le PS, l'UMP et Dany le Rouge dont les positions en Bavière confortent souvent la majorité conservatrice.
70 % des électrices et électeurs français·e·s, excusez du peu !

Au Royaume-Uni, il était amusant de voir The Independent (Is it? Was it ever?), le grand quotidien libéral, mettre l'accent sur l'avance des conservateurs et des gouvernements de droite en Europe tandis que The Guardian (centre-gauche) mettait en avant l'avancée du SNP, le Scottish National Party. Tout comme le MoDem en France, les Liberal Democrats ont accumulé revers ou déceptions. Et pourtant, ils représentent, en voix, un courant relativement tenace. Ce n'est que le résultat en sièges qui les fait passer pour des perdants. Le Plaid Cymru (Gallois) aurait un siège, mais on focalise, en Grande-Bretagne, sur l'entrée du British National Party au parlement européen (avec un siège aussi). Bref, pays par pays, d'ici quelques jours, on y verra plus clair. Pour le moment, continuez à penser que le plus fort de la crise est derrière nous et que la droite libérale a été confortée dans ses choix. S'il n'en était rien réellement, aucune importance, le message est passé. Et qu'importe si l'UMP n'est approuvé que par 12 % environ des Françaises et des Français, le pourcentage de 28 % des suffrages exprimés est ce qui doit marquer les esprits, le reste étant superflu puisque, de toute façon, tout était joué d'avance, à quelques nuances près.