Tout le monde a désormais bien en tête ce geste si caractéristique du président Sarkozy, malicieusement repris par tous les humoristes et imitateurs, qui consiste à rouler des épaules tout en projetant sa tête en avant dans une sorte de torsion du cou, comme pour mieux souligner la force de ses arguments. Une petite tentative d’interprétation psycho-comportementale de ce geste peut donc se révéler aussi amusante qu’instructive.
Il serait évidemment facile de voir là l’indice d’une espèce de complexe du « petit » qui cherche à tout prix à se hausser du col. Facile et… assez tentant. Toutefois, la vérité est sans doute à chercher ailleurs. Car on est bien forcé de se dire que s’il s’agissait d’un tic véritable, pouvant éventuellement nuire à son image, il y a bien longtemps que ses conseillers en communication auraient obtenu de Sarkozy qu’il s’en débarrasse. Puisqu’il n’en est rien, ce soi-disant tic doit forcément avoir son utilité.
Tout compte fait, on a plutôt le sentiment que ce roulement d’épaules fait partie intégrante de l’arsenal rhétorique du président, aussi bien gestuel que verbal. Il est l’expression achevé de son « style », lequel repose avant tout sur un volontarisme affirmé, un caractère théâtralement « rentre-dedans ». Cela fait un peu penser à la mimique d’un représentant en aspirateurs utilisant toutes les ficelles dont il dispose pour convaincre le chaland de lui acheter sa camelote. C’est celle d’un homme carré, sans façons, qui va droit au but et qui ne s’en laisse pas compter. Bref, un cliché.
Mais ce cliché colle à la perfection à l’image d’homme pragmatique que Nicolas Sarkozy veut donner de lui, à mille lieues du langage abstrait et de l’attitude guindée des énarques. Du coup, on comprend que cette mimique un peu ridicule a surtout pour vocation de le rendre proche des gens, proche du peuple. Par ce geste, il cherche à nous signifier qu’il nous parle « d’homme à homme », comme dans la vraie vie, et qu’il nous comprend d’autant mieux qu’au fond il est comme nous. Tout cela s’avère donc n’être au final qu’un vulgaire truc de tribun populaire, et dont il aurait eu certes grand tort de se débarrasser, car en réalité il lui doit beaucoup.
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Ce geste à répétition doit lui donner du courage. Quand il se sent fléchir : hop un coup d’épaule et c’est reparti……………C’est l’impression que ce geste me donne.