aux causes multiples, mais la principale ne serait-elle

pas le chômage et le manque d’avenir ?

Pour les sociologues souvent remplis de certitudes sur les causes des émeutes y voient bien souvent des causes racistes ou des rivalités de bandes qui au moindre incident se déchaînent et cassent tout. Mais, ce que l’on peut regretter c’est le manque d’analyse du phénomène de bandes qui résultent d’un désœuvrement permanent qui s’est accentué au cours du temps. La mort de Mark Duggan n’a pas soulevé de polémiques ce qui montre bien que la couleur de peau n’est pas en cause. Le problème est plus profond pour ces exclus du monde moderne sans travail, sans avenir, mais aussi sans possibilité d’une instruction leur permettant de sortir de l’ornière dans laquelle ils ont été refoulés. L’étincelle que l’on allume fait éclater ce qui était enfouis dans le cœur de ces jeunes, les oubliés de la société moderne, n’attendant que cette occasion pour exprimer leur colère. N’allez pas croire que je soutiens les violences, pillages, la mise à feu de véhicules et d’immeubles, et que j’approuve les blessées de la police et tout le reste, mais c’est malheureusement le lot à payer dans ce genre d’émeutes. Les casseurs se réveillent. Voir dans le même contexte «75 – Clichy-sous-Bois», «Clichy-sous-Bois encore», «Les bandes et la délinquance».

Notre société du nanti est coupable de cet état de faits qui forcément les condamne et les répriment par la force. Ce qui, dans une société comme la notre, accentue encore plus les soutiens aux conservateurs qui ne connaissent que le bâton. Chaque émeute, et nous en avons l’expérience, renforce ces partis, ce qui ne résout rien. Mais c’est également vrai dans une gouvernance de gauche qui ne peut admettre ces violences. Tony Blair, prédécesseur de David Cameron qu’a-t-il fait pour soulager cette misère ? Il est évident que le commerçant qui a vu son magasin pillé n’aura aucune considération pour ces voyous et c’est bien logique. Ces émeutes sont donc contre productrice en termes de démocratie. Ces jeunes n’ont donc aucune chance de voir leur situation s’améliorer. Ils sont condamnés à être en marge de la société qui elle devra s’habituer à vivre avec une poudrière prête à exploser. La politique très libérale de David Cameron qui ferme de nombreuses associations locales de soutien et d’entraide, la fermeture de nombreux clubs de jeunes également, ces centres très fréquentés et destinés à la jeunesse désœuvrée est en cause. Lorsqu’on fragilise le tissu social, le risque de tension s’accroît, une politique de gauche n’aurait pas fait cela !

Après quatre nuits de pillages et de violence la situation à Londres semble se calmer pour s’étendre à d’autres villes et cinq personnes sont mortes, dont le dernier Richard Mannington Bowes, un homme de 68 ans, agressé lundi à Ealing, dans la banlieue ouest de Londres, est mort des suites de ses blessures, a annoncé la police.

Selon l’analyste Alain Bertho les émeutes de Londres seraient les relations entre les forces de l’ordre et la jeunesse, mais c’est toujours comme cela qu’elles s’expriment. La police est là pour faire respecter l’ordre, mais pas pour résoudre. Et ce que sait faire David Cameron c’est d’augmenter les forces de l’ordre de 6.000 dans la capitale et 10.000 à venir, mais que faire d’autre lorsque l’on n’a aucune considération pour ces quartiers déshérités ?

«Il fallait une riposte et la riposte est en cours», a annoncé sur un ton très offensif David Cameron depuis le perron de Downing Street, ce 10 août 2011. REUTERS/Suzanne Plunkett.

Alain Bertho qui est professeur d’anthropologie à l’Institut d’Études Européennes et directeur de l’école doctorale de Sciences sociales de l’Université de Paris 8-Saint-Denis, a publié en octobre 2009 «Le temps de émeutes» chez Bayard Centurion.

Pour lui, les témoignages sortis de la presse montrent que nous sommes en Angleterre «dans des phénomènes de tensions extrêmes, de violences symboliques ou réelles vis-à-vis des classes populaires, qui s’apparentent à la situation Française. Si des milliers et des milliers de gens se sentent concernés par la mort d’un jeune dealer alors qu’eux-mêmes, ne sont pas forcément dealers, c’est que le contentieux est très grave et le vécu quotidien vraiment insupportable». Certes mais cela tout le monde le sait et le supporte n’apportant rien d’autre qu’un constat. Par contre quand il écrit dans «l’Action littéraire» «les États, quelle que soit leur couleur politique, sont aujourd’hui obligés de mener des politiques d’austérité. Ils finissent par perdre leur légitimité en négligeant les intérêts de leur peuple. La logique sécuritaire, c’est ça, une recherche de légitimité dans la peur, dans l’affrontement, dans la tension», je suis totalement de son avis.

Mercredi 10 août, David Cameron, «c’est un triste spectacle auquel sont confrontés les habitants de Manchester, Liverpool ou encore Nottingham. Vitrines cassés, magasins pillés et même un commissariat incendié, les émeutes se sont encore étendues en Grande-Bretagne pour la quatrième nuit consécutive».

Les forces de l’ordre ont été attaquées à coups de briques, bâtons et autres bouteilles, elles sont dépassées par la fluidité des émeutiers encagoulés communiquant par une messagerie gratuite sur blackberry.

A Londres les habitations sont mêlées entre les quartiers très aisés et les logements sociaux, ce qui rend difficile la sécurité. Ce n’est donc pas dans les quartiers les plus pauvres qu’ont eu lieu les pires saccages. Tottenham, Hackney, Clapham, Croydon ou Enfield, théâtres des plus graves violences, sont des quartiers types de la mixité sociale qui est la norme dans la capitale. Ce mélange traditionnel entre riches et pauvres qui offre l’avantage d’éviter les ghettos «de pauvres» marque probablement trop la différence sociale et en période de forte récession. Les coupes sombres dans les budgets sociaux et la forte poussée du chômage des jeunes qualifiés ou pas qui n’ont rien à perdre à fait le reste.

London’s Croydon is a war zone !!!

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Tout a commencé le jeudi 4 août avec la mort de Mark Duggan, 29 ans père de quatre enfants, dans le quartier multiethnique et défavorisé de Tottenham lors d’une opération de police contre la criminalité au sein de la communauté noire. Une partie de la capitale Britannique fut donc plongée dans le chaos. Les choses dégénérèrent après une manifestation pacifique, le samedi soir 06 août à Tottenham, organisée par ses proches pour réclamer «justice» suite à la mort de ce jeune, victime d’un échange de tirs avec la police. Depuis les émeutes se sont étendues à d’autres villes d’Angleterre.

Le problème qui se pose pour la police, outre le maintien de l’ordre, est la police a-t-elle agi en état de légitime défense lorsqu’elle a tiré sur Mark Duggan ? La Commission indépendante chargée de l’enquête, IPCC, et au vu des expertises balistiques conclut, «il n’existe à ce stade aucune preuve que l’arme retrouvée sur la scène du tir a été utilisée» pendant l’intervention de la police. Une balle qui s’était logée dans une radio de la police a en outre été tirée par un policier, selon les premiers résultats de l’enquête. Mais selon la police scientifique, il ne serait peut-être pas possible de «dire avec certitude» si l’arme de Mark Duggan a fait feu. Mark Duggan a été abattu par balles par un policier.

Comme on peut le penser, c’est bien la situation économique qui est montrée du doigt. Les tensions sont principalement attribuées au ras-le-bol général et particulièrement aux difficultés économiques. Les émeutiers viennent le plus souvent de quartiers où le chômage est très élevé. Une situation qui, pour certains, n’est qu’un début après le plan d’austérité lancé par le Premier ministre David Cameron en octobre dernier. Parmi les mesures décriées, des coupes dans les dépenses sociales et une augmentation des impôts dans l’espoir de réduire le déficit budgétaire du pays, par RFI / Roya Mohsen-Khah.

Les émeutes gagnent d’autres villes

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Le ton monte entre la police et le gouvernement. Sont mises en cause les coupes sombres dans la police qui sont fortement critiquées. David Cameron a refusé de revenir sur la réduction des services de police alors que le chef de l’opposition travailliste, Ed Milliband, l’a interpellé pendant la réunion d’urgence, l’appelant à «réfléchir» à sa décision. Le président de la Police Fédération estime que David Cameron refuse de voir la réalité «les 16 000 policiers supplémentaires qui ont été envoyés dans les rues de Londres, c’est exactement le nombre d’agents qu’il veut retirer, c’est ça la réalité», peut-on lire dans le Guardian. Le plan d’austérité se traduit sur le terrain, par 16 200 policiers en moins, outre 16 100 postes supprimés dans l’administration d’ici à 2015.

Un climat social très tendu ou presque 2,5 millions de Britanniques sont sans emploi avec une inflation supérieure à 4 % qui devrait atteindre 5 % fin 2011. Le taux de chômage s’élève à 7,7 %, et chez les 16-24 ans il touche un jeune sur cinq, soit 20 %. Pour de nombreux observateurs les restrictions budgétaires sont les plus drastiques de l’après guerre, et le parti conservateur a annoncé 80 milliards de livres, 92 milliards d’euros de réduction de coûts pour venir à bout d’un déficit public de 156 milliards de livres, 180 milliards d’euros, l’un des plus élevés de l’Union européenne. La suppression d’un demi-million de postes dans le secteur public et l’augmentation de l’âge de la retraite à 66 ans d’ici à 2020 sont tout aussi controversées.

Qui sont les émeutiers.

Des gamins, des jeunes, mais aussi des personnes plus âgées : qui sont les émeutiers qui font trembler l’Angleterre ? Document RTL.fr / AFP

Des pauvres des quartiers pauvres, pas des nantis, eux ne manifestent jamais, ils n’ont aucune raison. Ils sont pauvres de partout, errant, ayant quitté l’école, désœuvrés pour la plupart. Mais il y a aussi, parmi ceux qui sont amenés à comparaître au fur et à mesure des arrestations, un cuisinier dans un restaurant bio âgé de 43 ans et son frère de 47 ans pour avoir dévalisé une enseigne de restauration rapide, des frères jumeaux de 19 ans pour avoir participé au pillage d’un magasin électroménager à Brixton un quartier cosmopolite de Londres, un ouvreur dans un opéra de Londres ou encore un gamin de 11 ans, un homme qui s’apprête à intégrer l’armée, un chauffeur de chariot élévateur ou encore un graphiste. Nombre d’entre eux ont un casier judiciaire vierge. Le problème est aussi pourquoi ces personnes qui ne sont pas encagoulées ont pillé ?

«C’était les pires scènes que Manchester ait jamais vues, des jeunes de 9, 10 ou 12 ans, cagoulés, brisant des magasins», d’après Pat Karney, porte-parole de la mairie de cette ville du nord-ouest de l’Angleterre, prise à son tour dans la tourmente mardi soir. «Il y a un certain nombre de jeunes très en colère, qui se sentent marginalisés depuis longtemps», a expliqué Gus John, professeur à l’Université de Londres et spécialiste des relations intercommunautaires.

Le prochain article sera Takieddine