le bitumage.

 

 

Le procédé de bitumage, largement utilisé en France pour conditionner en ligne les boues résultant du traitement des effluents liquides par précipitation chimique est un procédé éprouvé qui bénéficie d’un large retour d’expérience.Toutefois, la mise en œuvre de ce procédé pour conditionner des boues anciennes entreposées en silos a nécessité des études dédiées, d’une part pour garantir la sûreté du procédé en présence de déchets de composition variée et susceptibles d’initier des réactions exothermiques, et d’autre part pour augmenter l’activité spécifique de chacun des colis produits, et donc réduire le nombre total de colis, tout en garantissant le non-débordement du colis après cinquante ans, dû à la production de gaz de radiolyse.

Les études conduites sur la maîtrise du risque incendie ont abouti à la définition par simulation d’un domaine de fonctionnement sûr. Cette simulation s’appuie sur les paramètres cinétiques des réactions exothermiques au sein de l’enrobé, lesquels sont déterminés par mesures micro-calorimétriques avant enrobage. Parallèlement, l’optimisation de l’activité maximale admissible par fût s’est appuyée sur une modélisation du gonflement des enrobés et sur la maîtrise du phénomène de piégeage de l’hydrogène de radiolyse par des sels de cobalt. Elle conduit à une division par trois environ du nombre de colis. L’ensemble de ces résultats permet d’envisager que des opérations de reprise industrielle des boues anciennes de La Hague soient effectuées en 2006.

 

Le procédé de bitumage.

Le procédé d’enrobage par bitumage consiste à mélanger à chaud des déchets sous forme de boues à du bitume. Le mélange obtenu est déshydraté et coulé dans un conteneur où il est refroidi. L’enrobage bitume assure à la fois la déshydratation du déchet, sa dispersion homogène et l’immobilisation des radionucléides au sein de la matrice. Le bitume a été choisi comme matériau d’enrobage des déchets radioactifs pour son pouvoir agglomérant élevé, sa grande inertie chimique, son imperméabilité, sa faible solubilité dans l’eau, son pouvoir de confinement important, sa faible température de mise en œuvre, son coût modéré et, enfin, sa disponibilité.

En France, le procédé de bitumage a été développé dès les années 1960 pour conditionner les boues de précipitation résultant du traitement des effluents liquides.

Cogema a produit quelques 70.000 fûts de 220 lites de bitume chacun. Pour fixer les idées la production de ce type de déchets pour 40 ans d’exploitation du parc actuel de centrales est estimée à 100.000 colis. Cela peut paraître beaucoup mais c’est une quantité à peine suffisante à celle nécessaire pour construire 10 kilomètres d’autoroute !

Sa mise en œuvre industrielle en ligne s’est faite en 1966 à Marcoule dans la station de traitement des effluents et en 1989 à La Hague dans l’atelier STE3. Cette dernière installation est constituée d’une unité de préparation et d’alimentation en boues, d’une cuve d’agent tensioactif, d’une installation de production et distribution du bitume, d’une extrudeuse-sécheuse, voir la figure C.2-12 ci-dessous, d’un poste de coulée, d’un poste d’enfûtage et d’une installation de traitement des vapeurs et distillats. Le volume des colis de bitumes prévus par le MID [LAG-02], voir ici , est de 36 000 m3, soit environ 100 000 colis.

 

Document C.E.A., figure C.2.12 , Schéma d’unité d’enrobage Cogema/La Hague : Werner VDS VT 120, référence voir ici.

 

Parce que la gestion actuelle des effluents vise à minimiser le nombre et la diversité des colis de déchets produits, le bitumage est réservé aux effluents sodés et à divers effluents de laboratoire non vitrifiables ou stabilisables dans le ciment. Éprouvé, le procédé bénéficie d’un large retour d’expérience et ne nécessite pas, pour le traitement en ligne des effluents, de développements complémentaires.

 

Le bitumage des boues STE2.

Avant la mise en œuvre du bitumage en ligne à La Hague, l’exploitation de 1966 à 1989 de la première station de traitement d’effluents de La Hague, l’atelier STE2, a généré environ 9 300 m3 de boues entreposées dans sept silos en attente de conditionnement. Il existe de nombreuses similitudes entre les boues aujourd’hui traitées dans l’atelier STE3 et les boues STE2. C’est pourquoi Cogema, compte tenu des qualités de confinement du bitume et du retour d’expérience significatif sur l’atelier STE3, a retenu le bitumage comme procédé de référence pour ce déchet.

Toutefois, les boues STE2 présentent certaines spécificités, liées notamment à la présence de carbonate de calcium et de sels de magnésium issus du traitement d’effluents résultant de la séparation des gaines des combustibles de réacteurs de la filière UNGG. La centrale nucléaire de Chinon regroupe 3 réacteurs de la filière graphite-gaz (UNGG), arrêtés depuis respectivement 1973, 1985 et 1990.

En outre, pour réduire la quantité de colis produits, Cogema a souhaité augmenter les activités spécifiques incorporables dans chaque fût. Ces deux points ont nécessité des études spécifiques pour compléter le procédé mis en œuvre dans STE3 afin de l’adapter au traitement de déchets anciens tout en garantissant la sûreté du procédé et en conservant les performances du colis.

 

Le premier objectif de R&D, maîtriser la sûreté du procédé, s’est traduit par la mise en place d’une démarche robuste permettant de prévenir tout risque d’incident lors de l’élaboration des enrobés. En effet, la présence de composés oxydants et réducteurs peut conduire, lors du refroidissement des fûts, à l’initiation de réactions exothermiques pouvant entraîner l’auto combustion de l’enrobé. La première étape a consisté à identifier les composés réactifs aux températures d’enrobage, les nitrates et les sels de cobalt, et à caractériser la puissance thermique dégagée puis la cinétique de réaction, à l’aide de mesures par microcalorimétrie.

En parallèle, le refroidissement des fûts d’enrobé a été modélisé. Des valeurs pénalisantes ont été choisies pour les données d’entrée, afin de simuler de manière enveloppe la température maximale atteinte dans le fût. La seconde étape a donc consisté à réaliser une étude paramétrique afin de définir un domaine de fonctionnement sûr du procédé en fonction des paramètres cinétiques. En exploitation, la détermination des paramètres cinétiques sur les boues réelles avant enrobage et leur confrontation avec l’abaque du domaine de fonctionnement sûr permettra de garantir l’absence d’emballement thermique.

 

Le protocole de détermination des paramètres cinétiques est en cours de transfert industriel.

 

La faisabilité de chacune des étapes de fabrication d’un enrobé dopé en sels de cobalt a été démontrée à l’échelle laboratoire. Une campagne expérimentale de bitumage des boues STE2 a été mise en œuvre à partir de novembre 2005. L’ensemble de ces résultats, qui seront confortés par cette campagne expérimentale, permet d’envisager que des opérations de reprise industrielle des boues STE2 de La Hague puissent commencer dès 2006 dans l’atelier de bitumage STE3.

 

Le prochain article sera la cimentation.