Lu dans la Tribune du jeudi 29 mars 2012: "Les Brics veulent créer leur banque"

 

(cf. http://www.latribune.fr/actualites/economie/international/20120329trib000690906/les-brics-veulent-creer-leur-banque-.html )

 

Synopsis de l’article :

 

A l’issue de leur quatrième sommet, les Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ont plaidé pour la création d’une banque d’investissement visant à renforcer leurs relations commerciales. Ils s’inquiètent également "des excès de liquidités" dans le système financier mondial.

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On assiste là au réveil des pays émergeants puisque ceux-ci, grâce à la mise sur pied d’une banque d’investissement commune, sont en train de créer des relations sud-sud qui visent, à terme, à faire plus que contrepoids aux relations nord-sud qui était la règle jusque là.

 

En fait, ces pays, qui étaient des pays du Tiers Monde à l’époque où le monde libre et capitaliste se querellait avec le monde communiste, sont en train de devenir de très sérieux concurrents, avec leur industrialisation à outrance, des pays du premier monde. Et comme ils comptent,  pour leur propre développement, exporter plus, tout en continuant à s’ouvrir aux capitaux et aux tecnnologies étrangères, ils ont besoin de payer, sur leurs emprunts à l’étranger, des taux d’intérêt minimals.

 

Or ils ont besoin, pour cela, d’une monnaie qui ne soit ni réévaluée ni dévaluée, laquelle souffre aujourd’hui, à court terme, d’une réévaluation par rapport à celle du dollar américain ou à celle de l’euro, en raison du fait que les banques centrales américaine et européenne sont en train d’inonder le marché bancaire en offrant, aux banques privées, des taux d’intérêt entre 0 et 1%. Avec le risque d’inflation que cela présuppose en ces pays, puisque, à terme, l’injection des nouvelles liquidités risquent de déboucher sur une hausse des prix et sur la hausse subséquente des taux d’intérét.

 

Qui plus est, ces injections nouvelles ont pour effet, en réévaluant, relativement, la valeur des monnaies des pays du BRIC, de réduire les exportations de ces pays, comme le souligne la présidente brésilienne Dilma Rousseff qui a accusé (si l’on en croit le journal l’Express du 2 mars 2012)

 

les pays riches d’avoir déclenché un "tsunami" monétaire en abaissant le coût du crédit pour faire face à la crise économique mondiale, ce qui pénalise les pays en voie de développement tels que le Brésil.

"Nous sommes  préoccupés par ce tsunami monétaire (que causent) les pays développés", a déclaré jeudi Mme Rousseff dans un discours aux chefs d’entreprises et aux dirigeants syndicaux.

La chef de l’Etat brésilien a déploré que les pays riches répondent à la crise en abaissant le coût du crédit et en maintenant des taux d’intérêts bas. Selon elle, ces capitaux bon marché prennent le chemin du Brésil, dont la monnaie est forte et les taux d’intérêts élevés. Le Brésil estime que cette "guerre des changes" renchérit ses produits tout en diminuant les prix de ceux venus d’Europe ou des Etats-Unis. La dirigeante a affirmé qu’elle se battrait pour défendre l’industrie brésilienne et qu’elle s’assurerait que les méthodes utilisées par les pays riches "ne vont pas cannibaliser les marchés émergents"…..

 

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Et quand (selon l’article de la Tribune du jeudi 29 mars 2012) les responsables des pays du BRIC

 

appellent, dans leur réunion, ces pays [les Etats Unis et l’Europe] à adopter "des politiques macroéconomiques et financières responsables" en privilégiant des "réformes structurelles pour aider la croissance, créatrices d’emploi".

ils pensent surtout à la vague spéculative qui est en train d’agiter les finances publiques de la Grèce, de l’Italie, de l’Espagne ou du Portugal, puisque de nouvelles vagues de ce type obligeront des institutions internationales comme le FMI a intervenir également afin d’empêcher la mise en faillite de ces pays, ce qui nécessitera une participation accrue, à cette institution, des pays du BRIC. D’où la demande, formulée par ses responsables, pour que les pays en question résolvent eux-mêmes la question de leurs dettes souveraines en restructurant, sur un mode néolibéral, leur économie.

 

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Tout cela est de bonne guerre, puisqu’un pays comme le  Brésil a assez connu, par le passé, les effets de l’inflation et de la dévaluation de sa monnaie nationale (cruzeiro, cruzado) avant l’arrivée du real, pour ne pas revivre de pareils événements à une époque cruciale pour son propre développement.

 

Mais ce que Mme Dilma Rousseff ne dit pas, c’est que le Brésil va vivre une embellie, sur le plan économique, grâce à la Coupe du Monde de foot en 2014, et aux Jeux Olympiques d’été en 2016, qui va provoquer un boom, dans le secteur du bâtiment et des travaux publics et des secteurs adjacents, qui, s’il est financé par le marché international des capitaux plutôt que par l’épargne intérieure (et notamment par la part de l’impôt associé à cette épargne), risque de créer une très forte récession, au Brésil, qui va durer plusieurs années. Or cela, Madame Rousseff ne va pas le crier sur les toits.

 

De même, les responsables actuels du BRIC ne crient pas sur les toits la misère et le degré de corruption qui existent, aujourd’hui même, dans leur propre pays.

 

Si donc il existe, aujourd’hui, des gens très riches, dans ces pays, grâce au capitalisme – puisque les gestionnaires de certaines entreprises de ces pays disposent d’un quasi monopole dans l’exploitation des ressources (mines, électricité, bâtiment et travaux publics, etc.)  et grâce à la corruption (puisque les attributions des licences d’exploitation desdites ressources reposent sur la corruption de politiciens qui d’ailleurs forme une seule et même élite avec les entrepreneurs), il y existe également – et c’est là le revers de la médaille – de la pauvreté ou de la misère, même si celle-ci a fortement diminué, au Brésil, depuis la présidence de Lula, sans parler d’une classe moyenne qui y est encore bien moins développée, en pourcentage de la population totale, qu’au sein des pays du premier monde.

 

Toujours est-il que les pays du BRIC sont ceux qui, dans le monde, disposeront, durant les prochaines décennies, des meilleures opportunités en matière de développement économique et de prospérité, ce que prouvent d’ailleurs les taux de croissance affichés par eux ces dernières années.