Les aveux de l’un des accusés

Elle était venu témoigner  au procès en septembre, par visioconférence, seul son visage était apparu, un visage agréable, un visage épargné par le feu dans l'attaque du bus où 62% de son corps avait été atteint, brûlé au 2ème et 3ème degré. Mama Galledou disait  à l'attention des assaillants du bus « Pourquoi n'avez-vous pas attendu que tout le monde soit sorti du bus pour mettre le feu ? », « Pourquoi m'avez-vous laissée brûler ? », « A quoi pensiez-vous lorsque vous vous êtes enfuis ? » devant des jeunes gens muets, "Ils ont la tête dure comme des murs de prison."  dira devant leur attitude renfrognée l'avocat du conducteur du bus. Et puis ce mercredi, l'un des accusés a parlé, et décrit le rôle de chacun… c'est lui tenait le chiffon qui a enflammé le bus…

Le père de l'un des accusés avait été lui-même choqué par l'attitude de son fils, expliquant « Depuis qu'il est en prison, il a beaucoup changé. Même à moi, lorsque je vais le voir au parloir, il ne me dit rien. Il s'est refermé sur lui-même. » comme pour expliquer cette attitude incompréhensible, muette devant le drame vécu par la jeune femme. La mère de Mama Galledou s'était exprimée auprès de la mère d'un des accusés, pour qu'il dise ce qu'il savait et une des mères avait donné un commencement d'explication  sur ce mutisme: "Si on dit la vérité, on meurt dans les quartiers Nord". Comme pour lui donner raison, la soeur de l'un des accusés avait eu la chance d'échapper à une agression peu de temps après, "On va te tuer. Tu es la soeur de Béchir-la-Balance!" lui avait lancé la petite bande avant de s'échapper, en apercevant une personne alentour.
Ce silence, et cette attitude, était d'autant plus incompréhensible pour l'assistance, que la violence de l'attaque du bus a choqué les témoins. L'un d'eux s'en était ouvert , "On a tous les images de Mama en flammes, des images qui nous empêchent de dormir" racontait l'étudiant, traumatisé, et qui avait sombré dans l'alcool, tentant de passer des nuits "normales" à coup de cachets et d'antidépresseurs, "Je vis avec ce drame chaque jour et j'ai du mal à prendre le bus. Chaque fois, c'est l'alerte. Je fais attention à chaque passager". C'est incontestablement la vision de la jeune femme se débattant dans les flammes, et hurlant très certainement d'une façon terrible tandis qu'elle brûlait vive, qui mine ce témoin.
C'est après le témoignage de la mère de l'infortunée que l'un des incendiaires est passé aux aveux  . Etait-ce la mère de Mama Galledou qui a réussi à le convaincre en le réclamant à la barre, ou ses propres parents? Toujours est-il que lorsque l'adolescent s'est confié, il a tout dit. Le poids devait être trop lourd à porter, c'est lui qui tenait le chiffon enflammé et qui l'a jeté dans le bus préalablement arrosé d'essence, avant de décrire les gestes de ses camarades, le blocage des portes, et la dispersion de l'essence. Puis d'ajouter qu'il a honte, qu'il est désolé… Son père derrière lui, conscient que cet aveu le condamne, proteste, disant qu'il ne serait pas spontané…
Mais les faits sont là, le jeune homme a avoué, et il faut lui reconnaître ce courage, qui semble être en même temps une libération pour le jeune homme, mineur au moment des faits, c'est aussi un commencement de réponse pour Mama Galledou, qui a déjà exprimé son besoin de trouver un sens  à ce qui s'est passé dans ce bus, le 28 octobre 2006, jour où elle s'est trouvée prise au piège de l'incendie.
Les accusés encourent une peine de 15 ans de réclusion criminelle, si l'excuse de la minorité n'est pas retenue.

Une réflexion sur « Les aveux de l’un des accusés »

  1. Malheureusement, dans notre pays, les témoins ne sont pas protégés… Puis, tous ces voyous, qui se prennent pour des truands d’honneur (alors qu’ils n’ont aucune fierté), peuvent menacer en toute impunité : la justice laxiste leur trouvera bien des excuses !

    Pendant ce temps, le pauvre automobiliste, qui n’aura pas mis sa ceinture de sécurité ou qui aura été flashé par un radar routier, subira les foudres de la justice : là, pour lui, aucune excuse, aucune explication sur sa vie ; on lui demandera de payer, de repasser éventuellement son permis, puis, de se taire…

    Notre justice aurait bien besoin d’être refondue, non pas par le biais de la carte judiciaire, mais par celui de ses institutions !

    Puis, il faudrait rétablir l’autorité de l’Etat républicain dans nos banlieues, en sévissant quand il le faut, mais surtout en ne laissant pas sur le carreau (et dans la précarité) des milliers de personnes dans le chômage et dans la spirale du RMI !

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