Deux versions du Horla, suivies de Lettre d’un fou. Nul doute que ce livre, mince au demeurant, se joue sous le signe de la folie. Comme quoi, l’épaisseur d’un ouvrage ne justifie nullement sa qualité.
Ici, Maupassant assiste au naufrage de sa propre raison.
La première version du Horla a été écrite en 1886, avant de paraître dans un journal, Gil Blas, le 26 Octobre de la même année. La seconde a été publiée dans un recueil éponyme en 1887, et se révèle beaucoup plus élaborée que la précédente. En effet, le côté fantastique devient plus intense.
C’est sur cette seconde version que nous nous attarderons ici.
Présentée sous la forme d’un journal intime, le narrateur y fait état d’une série d’évènements fantastiques. En l’espace de quelques mois, sa vie bascule dans l’incompréhension et le néant. Il y a ce cauchemar qui se répète inlassablement chaque nuit et qui l’empêche de fermer l’oeil. Il y a cette fièvre, au tout début, alors qu’il se repose dans sa maison de campagne sur les bord de Seine. Un malaise continu s’installe, mais le docteur ne décèle rien d’alarmant.
Un petit voyage de quelques semaines s’impose. Et là, le personnage guérit miraculeusement. Autant rentrer. Les malaises reprennent alors et vont même jusqu’à empirer. Il cherche une explication. Il a peur, de plus en plus peur. Il se demande ce qui lui arrive, que se joue-t-il autour de lui ? De quoi est-il le témoin ? Il finit par penser l’impensable. Pire encore, il constate, s’en aperçoit. Une présence invisible cohabite avec lui, elle vide notamment sa carafe d’eau pendant qu’il dort.
Il s’enfuit à Paris. Une quinzaine de jours. Il se rétablit et assiste à une séance d’hypnose.
De retour chez lui, la présence se manifeste à nouveau, et en plein jour ! Un rosier se brise sous ses yeux. Plus le temps passe, plus il est persuadé qu’une volonté supérieure tente de le manipuler et de le maîtriser complètement. Il tente la révolte. Mais ce qui vit chez lui appartient à une espèce de créatures appelées les Horlas, et ayant déclaré la guerre à l’Humanité.
Le narrateur fait ici part d’une confession limpide, mais l’on ne saurait y déceler le vrai du faux. L’écriture, fluide, exprime à merveille la notion de démence. La descente aux enfers du personnage retranscrit une implacable logique qui, dans le cas présent, paraît bien éphémère.
Les passages autobiographiques vécus par Maupassant font de ce texte un petit chef-d’oeuvre d’authenticité.
[b]Quelle gaité, quelle joie de vivre, quel bonheur ! La Horla n’est ce pas un roman d’amour et d’eau fraiche ?[/b]