Reprenons le sujet. Environ 10% des élèves disent être victimes de harcèlement et/ou de violences.

      Mais, je reprends ce commentaire qui m’a choqué : « histoires de préau ». Non, les situations dont on parle sont de la violence (sous toutes ses formes, même les plus humiliantes) répétée dans le temps sur la même personne, de façon arbitraire, en groupe ou isolé, dans lesquelles les victimes s’angoissent plus à échapper aux situations qu’à vivre sa scolarité ou sa vie sociale.

      Concrètement, baladez vous en ville, en croisant 10 enfants, il y en a un parmi eux qui est susceptible de ne pas se sentir en sécurité à l’école. Cela reste encore évasif, dans la rue les enfants paraissent souvent joyeux.

 

Changeons de position : imaginez-vous professeur des écoles, vous entrez dans la classe, devant vous, 20 élèves prêts à vous écouter. Seulement parmi eux, 2 élèves ne se sentent pas bien et sont probablement angoissés, voire victimes de violences mais ils ne laissent rien paraître.

 

 

    

Pourquoi un tel retard dans la prise de conscience ?

      Cette violence a été banalisée et considérée normale même si on dit parfois aux élèves ce qui est bien et ce qui ne l’est pas. La violence est logiquement sanctionnée, mais dans le cas d’une violence répétée, quand l’enfant trouve la force de se plaindre à plusieurs reprises, les encadrants banalisent la souffrance et ont tendance à dire « à un moment il faut qu’il se défende tout seul ».

      C’est ainsi que parfois soit l’enfant se repli sur lui-même et ne dira plus jamais rien, soit il réagit violemment  de façon soudaine alors qu’il était considéré auparavant comme quelqu’un de « très calme ».

Une autre situation déconcertante se produit quand un enfant d’un coup craque en révélant ses angoisses, ses peurs par rapport à des faits que personne n’aurait imaginé…

 

Pourquoi ne détecte t-on pas cette violence ?

    L’étude menée par l’UNICEF n’a pas pour but de dire ce qu’il faut faire, ni de faire un jugement de valeur sur la situation mais dire ce qu’il est !

      1 enfant sur 10, c’est peu, on peut être fier ce n’est pas 5 sur 10…Cela traduit quand même que les enfants ne sont pas tous angoissés, et que le système scolaire fonctionne relativement bien. Il ne nécessite pas un dépistage et fichage de délinquance dès l’âge de trois ans tel que le préconisait récemment M.BOCKEL.

       Cependant pour la victime, c’est déjà trop. Cette disparité est simple, tant qu’un élève sert d’exutoire d’un ou de plusieurs camarades, les autres sont « épargnés » et donc ne subissent pas cette angoisse permanente et peuvent vivre leur scolarité sereinement et tisser des relations sociales.

      Attention, ce comportement peut être conscient ou inconscient de leur part, n’accusons pas ces élèves qui se sentent bien et qui ne savent pas que leur camarade souffre.

 

      Il est bien évident que ces actes de violences entre pairs sont commis bien souvent à l’abri des regards des professeurs, dans la cour de récréation, avant l’arrivée à l’école, pendant un trajet pour aller à la piscine, à la cantine…

      A ce jour, seules les violences avérées ou ayant entraînées des dommages majeurs (blessures, vol, racket, discrimination) sont relevées et font parfois l’objet d’un conseil de discipline ou de sanction.

 

"Comment je vais faire?" :

      L’obsession pour l’enfant dans ces situations, c’est « comment les éviter ? ». Il va falloir jouer de ruse, avoir un temps d’avance sur les autres pour anticiper les violences. Or comme les violences changent ou sont inattendues, il n’est pas aisé de toujours y parvenir. D’où l’angoisse.

      Quels comportements l’enfant peut-il peut adopter ? Pareil ils seront variés en fonction de l’enfant et des situations si cela se passe en groupe ou non, et en fonction de l’efficacité temporaire :

   -subir passivement mais douloureusement les violences

   -subir mais savoir l’exprimer en aboutissant sur un résultat

   -tourner autour des professeurs lors de la récréation pour s’en servir comme protection

   -se cacher durant toute la récréation dans les toilettes, dans un coin discret, derrière un arbre

   -toujours bouger dans la cours pour éviter de se faire repérer

   -toujours se mettre au fond de la classe pour ne pas se prendre des boulettes de papier ou des coups par derrière

   -toujours se taire ou réfléchir avant de parler pour éviter que cela ne se retourne contre soi

   -vérifier 50 fois avant de s’asseoir pour s’assurer que des punaises ou des chewing-gum n’y soient pas

   -toujours contrôler son sac

   -toujours savoir si l’interlocuteur ne fait pas parti du « clan » des persécuteurs

   -observation de qui entre dans le clan des persécuteurs

   -chercher un moyen de défense qui ne l’amène pas à se faire punir lui-même.

   -subir la violence psychologique en devant utiliser l’objet de la violence physique (trousse déchirée ou taggée, lunettes fendues, dent cassée, hématome) symbole de réussite pour le persécuteur.     

    

    Vous aurez compris, un enfant victime de violences ou de harcèlement se range dans la défensive et vit dans l’angoisse de comment va arriver la prochaine situation, et surtout comment va-t-il s’en sortir ?

 

      Pour lui, comment pourrait-il se sentir bien à l’école dans ces conditions ?