Très controversé, ce mode d’accession à la propriété est pourtant en pleine progression. Alors que certaines agences immobilières se spécialisent sur ce type de transaction, les avantages fiscaux liés à ces opérations vont sans doute attirer plusieurs de nos séniors. Au risque de faire grincer les dents de ceux qui considèrent le viager comme une option sur la mort.
Certains d’entre nous se souviennent peut-être du film Le viager de Pierre Tchernia dans lequel Michel Serrault survivait à une famille entière à qui il avait cédé sa maison en viager. De même, l’incroyable Jeanne Calment, la doyenne des français, est décédée en 1997 à l’âge de 122 ans, bien après son créancier. Ces exemples parfois drôles, parfois inquiétants mettent en évidence l’un des risques majeur du viager. Payer toute sa vie une rente pour devenir propriétaire et finalement ne pas en bénéficier. Si on y regarde de plus près, c’est tout de même un peu la même chose quand on est locataire. On règle, tous les mois, à notre propriétaire, un loyer, sans pour autant qu’à notre mort nous puissions transmettre quoi que ce soit à nos héritiers. On n’attend (n’espère) la mort de personne me direz-vous ? Cela n’est pas faux.
Pour autant, on peut envisager les choses d’une manière différente. Les séniors aujourd’hui propriétaires sont souvent amenés à déménager pour trouver une habitation plus adaptées à leurs besoins. Une petite maison de plain-pied sera préférée au pavillon à étage acheté il y a 30 ans et la petite commune agréable et riche en commerce de proximité, semblera plus rassurante que la ferme familiale isolée au fin fond du Larzac.
C’est également pour nos anciens, une manière simple de compléter une retraite estimée trop juste qui oblige, certains d’entre eux, à reprendre une activité professionnelle tardivement alors que les trimestres de cotisations sont largement acquis. Je considère plutôt cela comme une preuve de solidarité où les deux parties sont gagnantes. Les vendeurs, parce qu’ils pourront disposer d’une somme leur assurant une meilleure qualité de vie, les acheteurs parce qu’ils bénéficient dans ce genre d’opération d’avantages fiscaux pour devenir propriétaire.
Il serait naïf de croire qu’en spéculant, d’une manière ou d’une autre, on ne parie pas sur le malheur des gens.
Spéculer sur les produits agricoles, c’est parier sur la faim dans le monde, spéculer sur l’immobilier, c’est parier sur le nombre de SDF, ect.
Ce qui change avec le viager, c’est que le pari est clairement formulé, suffisamment pour qu’il n’y ait aucun échappatoire pour se donner bonne conscience : quand le type meurt, on devient propriétaire et on ne paie plus. Pas d’autre manière possible de voir les choses : financièrement, l’acheteur a intérêt à ce que le type meure le plus vite possible.
Il va donc le souhaiter, voire faire en sorte que ce soit rapide.
Il est vrai qu’avec les autres types de transactions, on peut toujours dire que l’on investit dans l’immobilier et bla bla bla. A condition de ne pas trop réfléchir, ça permet de mieux dormir la nuit.
Mais en creusant un peu, on découvre bien vite que, dans ce système, le malheur des uns fait le bonheur des autres. Si cette réalité vous dérange, vous savez ce qu’il vous reste à faite.