Le pouvoir et les hommes de pouvoir

On peut aimer le pouvoir pour plusieurs raisons, et une fois qu’on a ce pouvoir, perdre la tête.

En revanche, on ne peut pas faire passer une idée, ou un projet, dans ce monde, sans posséder un minimum de pouvoir. 

A titre d’exemple, le Christianisme n’aurait pas la place qu’il occupe en ce moment, au sein du monde, sans le milliard et demi de Chrétiens habitant ici et là.

 

Si donc un individu – qu’il soit philosophe ou humaniste, ou socialiste, ou utopiste, ou communiste, ou pour la protection de l’environnement, ou pour celui des droits de l’homme, ou pour des entreprises autogérées, ou pour quoi que ce soit d’autre, désire voir son projet devenir réalité, ou ses idées être concrétisées,  qui sont en concurence avec d’autres, il est bien obligé d’avoir un minimum de pouvoir.

ET le premier pouvoir qu’il doit posséder consiste à convaincre ou à persuader les autres que son projet est le meilleur, ce qui fait de lui,  s’il a besoin des voix de toute une population – pour mener à bien son projet – un populiste.

 

Mis à part cela, pour parvenir au pouvoir, en politique, il n’y a pas trente-six solutions : ou bien on tente d’obtenir la majorité des suffrages déposés dans les urnes (ce qui présuppose que le régime sortant est déjà une forme de démocatie), ou bien on prend les armes et on fait la révolution (ce qui ne veut pas forcément dire qu’une fois cette révolution faite, la démocratie sera supprimée au profit de la dictature, puisqu’au contraire le but de  certaines révolutions fut d’introduire,  de force, la démocratie en mettant bas des régimes (monarchie, dictature militaire, oligarchie, régime parlementaire censitaire, etc) qui voulaient la nier.

 

Quoi qu’il en soit, on peut élucubrer ou cracher contre le pouvoir sortant, au nom de n’importe quelle idée ou projet de société qui n’est pas celui des hommes au pouvoir, on est bien obligé de renverser ce pouvoir-là pour faire passer l’idée ou le projet de société que l’on désire voir appliquer. Le reste n’est que bavardage de salon.

 

Ce n’est pas tout : quand Kadhafi prit le pouvoir en Libye en s’appuyant, soi-disant, sur les milices socialistes, ce même Kadhafi, qui était jeune colonel à l’époque, prit le pouvoir au moyen d’un putch militaire et s’appuya ensuite sur les grandes tribus du pays afin de gouverner. Car en Libye, le régime date d’un temps immémorial où l’homme était à peu près partout nomade et se déplacait, comme tel, dans les grands espaces.

C’est dire que  la rhétorique de Kadhafi (anticapitalisme, antiaméricanisme, etc) ne fut que du blabla émanant d’un tribun qui, comme tout les tribuns et les futurs tyrans, fut doué pour la parole et pour une mise en scène qui consiste, toujours et partout, à diaboliser l’ennemi du pays ou du peuple de ce pays, afin de mieux contrôler le peuple et l’avoir derrière lui.   

 Et quand ce même Kadhafi, une fois au pouvoir, nationalisera la rente du pétrole, ce ne sera pas pour développer son pays, mais pour développer son propre pouvoir et celui de son clan sur le reste du pays (étant précisé que Kadhafi va diriger la Libye, ainsi  qu’on l’a vu tout à l’heure, en compagnie des autres tribus du pays, qui elles aussi vont boire au baquet de la rente pétrolière).

Et d’entre termes, si Kadhafi amassa une fortune colossale dans cette Libye restée sous-développée, c’est en nationalisant une rente pétrolière qui ne profita qu’à lui et aux siens.

 Et comme  les dirigeants des autres pays arabes (en Tunisie, en Egypte, en Algérie, au Maroc, etc), suivirent en gros le même chemin qui consista à s’empiffrer sur le dos de leur propre peuple, ces peuples-là, et notamment les plus jeunes parmi eux, se soulevèrent et mirent fin (en Egypte et en Tunisie tout au moins) à la tyrannie sortante, ce qui ne veut pas dire que les pays dont ils sont les ressortissants sont devenus entre-temps des démocraties.

 

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En conclusion, si les nostalgiques du communisme, en France ou ailleurs, désirent que le monde devienne, ou redevienne communiste, ils sont bien obligés de faire la Révolution, sans quoi ils n’auront aucune chance de faire passer leurs  idées.

Mais là est la différence par rapport au temps passé : ils ne pourront plus compter sur l’URSS ou  la Chine, et ce pour la simple et bonne raison que celle-ci va devenir (ou redevenir, si l’on se réfère à des temps immémoriaux) la première puissance du monde, et qui, plus est, sous la bannière du capitalisme.