Metteur en scène, comédien, directeur du théâtre des Carmes et indissociable du festival "off" d'Avignon, André Benedetto est décédé dans la nuit de dimanche à lundi des suites d'un accident vasculaire cérébral, à la veille de ses 75 ans…
Le dramaturge André Benedetto est né le 14 juillet 1934 à Marseille. Il présidait l'association Avignon Festival et Compagnies, qui avait restructuré en 2007 l'organisation du festival "off" et qui en reste la cheville ouvrière, encore cette année avec 985 spectacles qui se déroulent en marge du festival officiel.
Fou de théâtre et ancien instituteur, André Benedetto avait créé en 1963 le théâtre des Carmes à Avignon, dont il était toujours le directeur.
En 1964, après une première participation au festival, la compagnie avait publié deux ans plus tard un manifeste clamant "les classiques au poteau et la culture à l'égout", avant de présenter pour la première fois une pièce, Statues, en marge du programme officiel du festival.
En juillet 1967, André Benedetto avait récidivé avec Napalm, la première pièce sur la guerre du Vietnam.
Auteur, metteur en scène mais également poète, il a publié et joué de nombreuses œuvres dont une pièce écrite et jouée en 1999, San Jorgi Roc.
André Benedetto (centre) sur scène à Avignon le 4 juillet 2000.
Le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, lui a rendu hommage ce lundi, en déplorant la disparition d'une "grande voix dans l'histoire du théâtre".
Il salue la mémoire du "compagnon de route de Jean Vilar et Gabriel Monnet", un "enfant terrible de la décentralisation théâtrale (qui) avais pris son envol dès 1966, en marge du festival officiel, en créant son propre festival : le 'off' ".
"Il avançait à grands coups de provocations devenues historiques", "c'était une révolte féconde, une grande voix dans l'histoire du théâtre", ajoute le ministre de la Culture.
"Les pas et la voix d'André Benedetto résonneront longtemps encore dans cette Cité des Papes (Avignon) qu'il avait fait sienne depuis qu'il était né au théâtre", conclut le ministre.
André Benedetto aurait eu 75 ans ce mardi 14 juillet…
Un dramaturge et écrivain iconoclaste, qui a contribué à la démocratisation du théatre, pensant que tout le monde pouvait devenir plus intelligent et capable de réfléchir!
Je n’ai pu resister à l’envie de copier ses mots; pour lui, le theatre servait à ….
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A quoi sert le théâtre ?
Je n’ai jamais eu aucune envie de m’exhiber où que ce soit, ni même de me faire remarquer de quelque manière que ce soit. Je souhaite passer inaperçu, ne pas attirer l’attention et ne jamais faire aucun bruit.
Je suis prêt cependant à monter chaque soir sur une scène pour m’exposer en pleine lumière devant un public et jouer. Je fais même tout ce que je peux pour cela. Il me semble que (malgré tout!) c’est bon pour ma santé et il me semble aussi que j’ai quelque chose de très intéressant à dire et à montrer à mes congénères.
Quoi exactement je dis et je montre, je ne le sais pas bien et ne peux guère l’expliquer. Ca me parait être d’une absolue nécessité. Si nécessaire même qu’il se trouve toujours au moins quelques personnes pour venir me voir et m’écouter.
Elles m’assistent en quelque sorte et alors le théâtre a lieu. Après quoi soit dit en passant, mes chers amis, il vaut mieux ne point trop s’attarder à manger et à boire.
Ces personnes qui viennent savent peut-être mieux que moi à quoi sert et à quoi leur sert le théâtre. De même que la lumière leur donne une ombre et que le miroir leur donne un reflet, de même le théâtre leur donne un double et même plusieurs : le petit bonhomme dedans qui crie au secours, et toute une foule de sosies bien différents les uns des autres.
Ce reflet, cette ombre, ces doubles qui bougent et se modifient sans cesse fournissent à ces gens des indications précieuses sur leur corps, sur leur situation dans l’espace et dans le temps, sur leur apparence, leurs airs, leurs gestes, leurs pensées secrètes, leurs sentiments cachés…
Elles savent ainsi beaucoup mieux où elles sont, qui elles sont, d’où elles viennent et même où elles vont ! Elles ont du moins l’impression de le savoir intensément un bref instant.
Plus la tempête est grande sur la scène, plus le héros est malmené, et plus il sert de phare pour faire le point à tous ces immobiles dans le silence de la salle, très agités à l’intérieur d’eux-mêmes et très désemparés.
Le théâtre ça les apaise, ça les soulage et ça les éclaire dedans. On peut alors penser qu’ils deviennent un peu meilleurs tous ensemble