Les étapes géologiques du Campi Flegrei.
Il est communément admis, par les hautes autorités volcanologiques, que trois périodes géologiques distinctes, – ou phases -, sont à considérer pour appréhender le complexe volcanique de Campi Flegrei : l’Archiflegreo, 42.000 à 37.000 ans, le Flegrea, 35.000 à 10.500 ans, et le Campi Flegrei, 10.000 et toujours actif, – dernière période éruptive du 29 septembre au 6 octobre 1538 -, au Monte Nuevo.
Il est aussi convenu, par les mêmes instances, qu’à l’origine, formé de tufs et de laves trachytiques alternées, appelé Archiflegreo, environ 42.000 ans avant Christ, le Campi Flegrei était un volcan, à bâti unique, comparable, en taille, au Vésuve. Légèrement postérieur aux débuts éruptifs d’Ischia, 56.000 ans, mais antérieur au volcanisme Summa-Vesuvio, 17.000 ans, il serait, en outre, contemporain de la dernière glaciation de Würm, – 75.000 à 10.000 ans -, troisième tiers du Pléistocène supérieur, – 130.000 à 10.000 ans -, plus particulièrement de Würm III, – 50.000 à 30.000 ans -.
Avant l’Archiflegreo, aurait-il existé un Paléo-Archiflegreo ?
En vérité, le début du volcanisme du Campi Flegrei n’est pas connu avec précision mais il serait largement antécédent aux 42.000 ans communément avancés comme plausible. En effet, des séquences de laves andésitiques et de pyroclastites(1) recouvrant des strates de laves basaltiques, datées de 2 millions d’années environ, ont été recensées dans les carottes(2) prélevées lors d’un forage privé effectué sur la commune de Villa Literno(3), une commune située à 20 kilomètres au nord de Puzzuoli. Ces produits volcaniques stratifiées sont signes de la présence d’au moins un «volcan gris», aux éruptions explosives, émettant des laves pâteuses et des cendres sous la forme de nuées ardentes ou coulées pyroclastiques et de panaches volcaniques. Elles paraissent être l’expression d’une éruption explosive majeure, super-colossale, –VEI 7 -, voire méga-colossale, – VEI 8 -, qui se serait produite en un lieu indéterminé, proche ou au cœur du Campi Flégrei, dans le Golfe de Puzzuoli, voire dans celui de Naples, donnant naissance à une première structure caldeirique complexe, de dimension indéterminée, mais de toute évidence conséquente.
Les produits volcaniques, découverts à Villa Literno – des produits qui devaient avoir atteint d’autres sites tout aussi éloignés sinon plus, –laissent supposer qu’au Gélasien, 2,588 à 1,806 Millions d’années -, un événement de type Plinien/Ultra-Plinien ou Ultra-Plinien, – vers 2 millions d’années -, contemporain au Yellowstone, Huckleberry Ridge, aux États-Unis, et au Cerro Galán, en Argentine, deux éruptions méga-colossales, – 2.2 millions d’années -, avait enterré une grande partie de la Campanie sous d’épaisses couches inter-stratifiées de laves et de pyroclastes. Et seuls des carottages, l’éruption d’ignimbrite campanienne, – 39.000 ans -, et celle de tuff jaune napolitain, – 15.000 ans -, toutes deux liées à des incidents de subsidence, ayant tout recouvert sous plusieurs strates successives, permettraient d’en déterminer l’étendue réelle.
Le Paléo-Archiflegreo aurait-il connu, ensuite, une longue période d’inactivité ?
Après cet épisode majeur, éruption explosive super ou méga-colossale avec formation plausible d’une caldeira, une période d’environ 1,9 millions d’années s’écoule sans que ne soit visible, au sol, – ni dans les affleurements, ni dans les falaises côtières, ni dans les collines autour de Puzzuoli -, des manifestations volcaniques matérialisées par des dépôts pyroclastiques ou des coulées laviques. Le Paléo-Archiflegreo serait-il resté un si long temps sans activité? Cela paraît peu crédible d’autant que l’éruption de tuff jaune napolitain, – 15.000 ans -, faisant suite à celle d’ignimbrite campanienne, – 39.000 ans -, avait couvert une superficie de plus de 1.000 kilomètres carrés, une superficie conséquente mais bien inférieure à la précédente qui avait entièrement détruit l’Archiflegreo.
Et c’est d’autant moins vraisemblable qu’au Pléistocène inférieur, – 1,806 millions d’années à 781.000 ans -, et au Pléistocène moyen, – 781.000 à 126.000 ans -, le volcanisme et la séismicité étaient intenses en cette portion de l’arc volcanique campanien. Le complexe caldeirique de Roccamonfina, – 1.006 mètres -, le quatrième volcan italien par ses dimensions, considéré comme le plus ancien volcan de Campanie, de 900.000 ans d’âge environ pour certains, a connu des phases éruptives explosives attestées entre 549.000 et 376.000 ans, une seconde entre 374.000 et 323.000 ans et une troisième entre 317.000 et 96.000 ans, les dernières éruptions étant référencées vers 70.000 ans, 50.000 ans et 290 avant J.C. Les Paléo-Époméo, – sur l’Île d’Ischia -, Paléo-Posillipo, – dans le Campi Flegréo -, et Paléo-Summa, – Summa-Vésuve -, présentent, eux, des strates horizontales de laves trachytiques surmontées de couches de tuff, minces et régulières, contenant des fossiles de coquillages et de mollusques, – Cerastoderma glaucum, Artica islandica… -, datés du Calabrien et de l’Ionien(4), étaient actifs, au cours de ces deux époques géologiques, en milieu marin.
Une étude approfondie des laves des volcans sous-marins qui tapissent les fonds du «Circeo Terrace », – Marchi...-, du «Ponza-Salerno Terrace », du « Napoli Canyon » et du « Salerno Basin », – Palinuro, Vavilev, Marsili et ses 3.000 mètres de haut, Magnaghi… -, endormis ou éteints, et des îles volcaniques de Palmarola, de Ponza, de Zannone, ou une source d’eau chaude, du moins un « fumoir » sur le plateau marin est toujours actif, de Ventotene et de Santo Stefano, aiderait à mieux comprendre le volcanisme campanien au Pléistocène inférieur et moyen.
Notes.
(1) Sous le vocable pyroclastite, sont désignés les produits volcaniques éjectés lors de l’éruption d’un volcan et définis suivant leurs diamètres: cendres, lapilli, scories, tufs volcaniques et ignimbrites.
(2) Carotte, prélèvement cylindrique obtenu par carottage du sous-sol à l’aide d’une tarière.
(3) Villa Literno est une commune, dans la province campanienne de Caserta, située à 25 kilomètres au Nord-Ouest de Naples, à 25 kilomètres à l’Ouest-Sud-Ouest de Caserta et à 20 kilomètres au Nord de Puzzuoli.
(4) Calabrien, ou Pléistocène inférieur, de 1,806 Millions d’années à 781.000 et de l’Ionien, ou Pléistocène moyen, de 781.000 à 126.000 ans.
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Après on s’étonne que notre pauvre terre ait autant de cicatrices…..Entre les séismes, les éruptions volcaniques et les tsunami, il faut reconnaitre que ça fait beaucoup. En même temps voilà une planète bien vivante et c’est, vu de ce coté, plutôt rassurant.
Mais quelque part cela peut aussi faire peur et faire pronostiquer à certains des fins du monde programmées à partir d’une simple vision inqualifiable à défaut de constats bien réels basés sur le « caractère bien trempé » de notre planète.
Merci pour le clin d’œil aux volcans sous-marins.
Mon autre remarque ira sur cette notion du temps entre la perception que nous hommes en avons, et celui qui a vu se dérouler toutes les péripéties actives de la terre.
On surfe sur des millions d’années et surprenant, des personnes se plongent dans cet univers passé impalpable pour comprendre la formation de notre planète depuis sa naissance ainsi que la vie et son évolution au fil de toutes ces années.
Les volcans n’étant qu’une des pistes de ces recherches et là aussi tout aussi surprenant, à partir d’éléments « morts » que sont les rejets depuis les entrailles de la terre et plus vivant en ce qui concerne leur activité.
[quote]Ludo a dit : Les volcans n’étant qu’une des pistes de ces recherches et là aussi tout aussi surprenant, à partir d’éléments « morts » que sont les rejets depuis les entrailles de la terre et plus vivant en ce qui concerne leur activité.[/quote]
En fait, Ludo, si la vie existe sur Terre, c’est grâce à l’activité volcanique…, c’est grâce à elle que s’est créée l’atmosphère… et c’est elle, avec la tectonique des plaques, le moteur de la vie