Le muet, le sourd et l’aveugle. On ne présente plus les Singes de la sagesse, symbole de la mythologie asiatique également appelé « Les trois petits singes ». Combien d’entre nous en possédons d’ailleurs une représentation « biblotisée » quelque part dans une vitrine ou sur une étagère de salon ? Si l’Histoire ne dit par ailleurs pas si ces derniers appartiennent à la famille des Bonobos, Laurent Baffie se permet un astérisque de choix en le précisant.
Ainsi, connus pour leur activité sexuelle très développée, l’animateur de radio et télévision fait de cette caractéristique le nerf de sa pièce, jouée pour la première fois le 9 septembre 2011 au Palais Royal de Paris.
« Ne rien voir, ne rien entendre, ne rien dire ». Laurent Baffie se joue des codes théâtraux afin de mettre en scène et en relief cette maxime picturale. Entouré de comédiens de talent (Caroline Anglade, Camille Chamoux et Marc Fayet pour ne citer qu’eux), l’auteur et acteur s’emploie à mettre tous les sens des spectateurs en éveil dans une pièce au rythme très soutenu, finalement aussi drôle et « Baffienne » que touchante et humaine.
Prenez trois amis d’enfance, chacun affublé d’un handicap et partageant tous une envie que l’on comprend très vite appartenir au domaine de l’obsession : le sexe. Pour ces Caliméro de la vie – et de l’amour – leur solution toute trouvée résidait en l’achat (romantique au possible) de relations de chair. Jusqu’à ce qu’Alex (Marc Fayet), le non-voyant de la bande expose à ses deux confrères le plan qu’il a élaboré et qui va plonger notre trio testostéronés dans une joyeuse aventure de haute voltige. Dévoiler plus de détails serait de l’ordre du crime théâtral. Chaque surprise ayant parfaitement sa place au fil des scènes, contentons-nous de saluer le talent d’écriture et de mise en scène de Laurent Baffie, parfaitement indissociable du grand jeu d’acteur des comédiens partageant l’affiche. Entre clins d’œil à l’actualité et belles trouvailles humoristiques, ces trois singes nous font passer un excellent moment, invitant le rire franc et sincère au cœur d’un sujet sensible à l’humour.
Ainsi, si Laurent Baffie partage et ne fait en général pas l’unanimité quant à sa personnalité haute en couleurs (beaucoup souriant à l’idée qu’il se soit octroyé le rôle du personnage muet), cette pièce lui permet d’enterrer la hache de guerre pour mieux ressusciter des stéréotypes qu’il décortique avec finesse et grande plume.
« Les Bonobos », salué par la majorité des critiques, est donc à prescrire à toute personne souhaitant passer un excellent moment de rire où l’ennui ne trouve aucune brèche par laquelle s’introduire.
Disponible en DVD et à consommer sans modération (ni respect de la posologie), ce traitement culturel se ponctue par l’approbation du médecin lui-même : offrant une banane à l’une des spectatrices après le tomber de rideau final, Laurent Baffie précisera que « Vous pourrez dire : je suis allée voir « Les Bonobos » et je suis ressortie avec la banane ! »