J’adore les histoires, lues, vues, racontées : des restes de mon enfance surement. Après m’être plongée dans une nouvelle histoire, apprendre que c’est tiré d’une histoire vraie me marque davantage. Et lorsque cette même histoire vraie a une portée historique importante, j’en reste d’autant plus bouleversée.

J’ai regardé l’adaptation cinématographique du destin tragique de Sarrtjie Baartman par Abdellatif Kechiche: La vénus noire sortie en octobre 2010.


Film historique qui se situe au 19ème siècle,  je découvre au milieu de la foire aux monstres, ancêtre de nos cirques et fêtes foraines actuelles, l’existence de la Vénus Hottentote. Femme noire dans un monde de blancs, femme soumise à la méchanceté, curiosité, et bêtise de l’homme en échange d’une promesse d’un retour au pays. Tout au long de ce film bouleversant, on suit le chemin de vie de cette femme tantôt bête féroce, tantôt actrice d’un spectacle, tantôt opportunité scientifique. Une femme que l’on sent et ressent malheureuse et souffrant à chaque fois que la caméra s’arrête sur son visage, sur son regard… Une femme au milieu d’hommes qui profitent de son physique pour gagner de l’argent, mettant à mal sa dignité, sa féminité, son humanité.

L’alcool, la violence, l’humiliation, la prostitution, la maladie et la mort… telle est la triste destinée de cette femme de 27 ans.  Parfois, elle croise un regard de douceur, une parole d’amitié, et on se met à croire à la personne qui va lui tendre la main sans arrière pensée… mais jamais elle n’arrive, si ce n’est post mortem, lorsqu’en 2002 sa dépouille est enfin restituée à l’Afrique du Sud pour être inhumée dans sa Province natale du Cap.

Son histoire, souvent prise pour exemple, est révélatrice de la manière dont certains  considéraient à l’époque ceux qu’ils désignaient comme appartenant à des « races inférieures ».


Un film bouleversant où la science est mise à mal, dans sa brutalité, dans son irrespect de la volonté des personnes, dans sa comparaison brutale de cette femme à l’espèce animale et son ultime offense lorsque sa dépouille sera charcutée contre sa volonté par Georges Cuvier, l’un des pères de l’anatomie moderne. Son squelette, ses fesses et ses organes génitaux seront conservés au musée de l’Homme jusqu’à la fin des années 70. Ce n’est qu’en 1974 qu’ils furent retirés de la galerie d’anthropologie physique et relégués finalement dans les réserves du musée (le moulage étant encore resté exposé durant deux ans dans la salle de préhistoire).

En 1994, il est fait appel à Nelson Mandela pour demander la restitution des restes de Saartjie afin de pouvoir lui offrir une sépulture et lui rendre sa dignité. Cette demande se heurte à un refus des autorités et du monde scientifique français au nom du patrimoine inaliénable du muséum et de la science. Ce n’est qu’en 2002, après le vote d’une loi spéciale, que la France restitua la dépouille à l’Afrique du Sud.

Une histoire commencée au 19ème siècle, et qui ne voit son issue que très récemment.

Un film à voir, pour ne pas rester sans ignorer l’histoire de cette martyre Sarrtjie Baartman, l’existence de ce peuple, les Khoïkhoï, considéré à une époque pas si lointaine comme "sous race". Il y a des pages de l’Histoire qu’il est important de ne pas ignorer….