La vie est née d’un orage. Quelques milliards d’années plus tard, sur la pIanète Terre, l’Homme est né … d’une sorte de petite taupe apparue au début de l’ère tertiaire ! Entre les premiers mammifères et l’Homme, l’évolution a longtemps tâtonné avant de trouver le « bon» modèle. Voilà qui devrait nous Incliner à un peu plus de modestie sur notre position à l’Intérieur de la longue chaîne du vivant .

S’II est aujourd’hui plus qu’un animai, l’Homme peut également, demain, n’être plus qu’un mammifère parmi d’autres … Réfléchir aux origines de l’Homme, c’est poser plusieurs questions fondamentales sur son destin.

En fait aujourd’hui on ne sait toujours pas grand choses de plus

La scène se passe au début de l’ère tertiaire, il y a soixante-cinq millions d’années. Les grands dinosaures sont en train de disparaître  d’une façon très mystérieuse  de la , surface de la Terre.

Qui pourra bien leur succéder? … Certainement pas ce petit animal chétif, gros comme une taupe, qui se faufile prestement à travers la végétation tropicale, dans l’épaisseur moite des vignes ou dans la touffeur  complice d’un figuier millénaire  Ce serait impensable un si petit animal pour remplacer ces terribles sauriens qui, depuis des millions d’années, règnent en maîtres inconstestés sur toutes les terres émergées! 

Et pourtant… le purgatorius sera bien notre lointain aïeul. Cet étrange mammifère,  qui tient plus de l’insectivore que du singe,  est incontestablement le tout premier représentant de l’ordre des Primates.

Le premier indice de son existence – une seule et unique molaire – a été découvert sur une colline du Montana, aux ÉtatsUnis  depuis, en raison de la rareté des fossilles sur ce site et des difficultés éprouvées par les paléontologistes, on a baptisé cette colline la « colline du Purgatoire ».

En fait, on dispose aujourd’hui d’une bonne centaine de dents isolées de ce purgatorius, d’une trentaine de mandibules et de deux maxillaires. Un examen attentif de ses molaires montre qu’elles diffèrent quelque peu de celles des insectivores ordinaires  les tubercules de leurs couronnes sont, en effet, beaucoup plus arrondis, ce qui pourrait faire croire que notre curieux petit ancêtre avait déjà une nourriture mixte, mi-végétaux mi-graines.

Dès cette époque, les Primates se distinguent des autres mammifères. Certaines de leurs particularités sont révolutionnaires  accroissement exceptionnel du volume de leur encéphale, aptitude très caractéristique à saisir les objets grâce à leur pouce opposable, amélioration sensible de la vision et, enfin développement de la clavicule, ce qui  permet une augmentation de la portée du  membre supérieur …

En ce qui concerne les plus anciens fossilles il est cependant très difficile de vérifier si ceux-ci répondent ou non à l’ensemble de ces critères. Par voie de conséquence, il est délicat d’établir avec certitude si telle ou telle espèce appartient bien à l’ordre des Primates.

Les singes ne feront leur apparition qu’un peu plus tard il y a «seulement » trentecinq ou quarante millions d’années. On a retrouvé leurs traces dans le bassin du Fayoum, en Haute-Égypte, sur un site autrefois recouvert d’une végétation luxuriante et parcouru d’immenses cours d’eau, mais actuellement désertique.

Tout comme leurs prédécesseurs, ces simiens sont armés de mâchoires munies de trente-six dents. Les nombreux vestiges retrouvés dans le bassin du Fayoum laissent supposer que le premier primate à posséder, comme nous, trente-deux dents a été l’ oligopithèque  ce frêle animal, qui ne mesurait guère plus de 30 cm de haut, est considéré comme l’ancêtre quasi direct des petits singes actuels. Il vivait à l’abri de l’impénétrable frondaison des forêts africaines, il y a près de trente-cinq millions d’années.

Sont venues ensuite, il y a trente millions d’années, de nombreuses espèces de singes, aux mandibules également garnies de trente deux dents, dont quelques-uns ont vraisemblablement donné naissance à certains groupes hominidés contemporains. Parmi ceux-ci, on en distingue généralement trois principaux  les œolopithèques, les propliopithèques et les œgyptopithèques …

Le destin de la lignée humaine s’amorçait. Pourtant, à ce stade de l’évolution, il convient de se poser quelques questions  quelle est l’essence véritable de la nature humaine? Qu’est-ce qui fonde vraiment l’humanité? Malgré son étonnante habileté, sa  remarquable intelligence et son extraordinaire faculté d’adaptation, l’Homme ne serait-il donc rien de plus qu’un vulgaire animal?

On pourrait considérer que la créature qui a su se tailler un royaume à l’échelle d’une planète et, demain peut être, à l’échelle du cosmos, se différencie absolument de toutes les autres créatures terrestres et que l’Homme occupe une place unique et privilégiée dans la longue chaîne du vivant.

Ce problème capital a fait collier énormément d’encre au cours des siècles passés. Il a suscité de nombreuses controverses entre théologiens, naturalistes, biologistes et autres scientifiques, qui se sont livrés à de furieuses polémiques sans jamais parvenir pour autant à s’accorder.

Tout laissait croire, en effet, que l’Homme, conquérant victorieux de la nature et maître de la Terre après Dieu, détenait une place à part dans l’Univers. Une place dont la qualité rendait sacrilège toute tentative de comparaison avec n’importe quel autre représentant du monde animal, même évolué.

Ainsi, au Moyen Age, sous l’influence de la théologie chrétienne, on hissait l’Homme au rang de demi-dieu et on ne lui accordait qu’un très lointain rapport avec le monde du VIvant.

En 1758, le naturaliste suédois Carl von Linné porte un premier coup de boutoir à ce dogme séculaire. Il renoue heureusement avec les idées d’Aristote et de Galien et replace à nouveau l’Homme à l’intérieur du règne animal, en lui accordant toutefois une place d’honneur. La dixième édition de son célèbre ouvrage, Systema Naturae, soulève un concert de prostations chez les plus éminents savants de l’époque  frappé par la ressemblance qui existe entre la structure morphologique de l’Homme et celle des animaux supérieurs, Carl von Linné vient, en effet, de classer les Homo sapiens (les humains, ses contemporains) au côté … des autres « animaux à mamelles »! Et, qui plus est, dans l’ordre des Primates.

C’est un beau scandale! Malgré tout, cette conception sera très rapidement adoptée par l’ensemble de la communauté scientifique. D’autres théories vont suivre  presque toutes s’acharnent à démontrer les origines animales de l’homme. On mesure mal, aujourd’hui, la portée révolutionnaire de tels propos à une époque où la science et la morale étaient totalement régies par la pensée chrétienne.

En 1775, Blumenbach propose ainsi de créer l’ordre des «bimanes », qu’il oppose à celui des quadrumanes  Le pire côtoie parfois le meilleur, dans cette vague de libération des enseignements de la religion … 

A la fin du XVIII et au début du XIX siècle, on voit poindre l’idée d’une évolution des espèces  elle finira par bouleverser radicalement les conceptions que nos ancêtres avaient de la nature humaine. Elle ouvrira également la voie à la paléontologie (l’étude des fossiles) moderne. 

Dès 1809, le philosophe et naturaliste français Jean-Baptiste de Monet, chevalier de Lamarck, propose une théorie cohérente pour expliquer cette évolution. Il présente ses arguments dans un ouvrage réputé, Philosophie zoologique, sans toutefois rencontrer un grand écho. Son époque ne perçoit guère l’ampleur des conséquences de la théorie de Lamarck. 

Il faudra attendre Darwin pour que celte théorie commence à influencer les consciences. Mais, tout d’abord, qu’est-ce que l’évolution? Les scientifiques entendent généralement par cette notion la variation, au cours du temps, de la diversité et de l’adaptation au milieu des populations d’êtres vivants. 

Considéré comme l’un des plus grands biologistes de tous les temps, Charles Darwin a décidé de rompre avec les théories « fixistes » qui tenaient le haut du pavé scientifique. Il imagine un processus évolutif fondé sur la sélection naturelle !… 

D’une logique très rigoureuse et fortement étayée par de nombreuses observations personnelles, la théorie de Darwin sera exposée en délail dans De l’origine des espèces par voie de sélection naturelle, qu’il publie en 1859, Pour lui, tous les organismes qui vivent sur la Terre ont une origine commune. Donc, une ascendance commune. 

L’idée de reléguer l’Homme au niveau des formes de vie les plus primitives de la planète soulève la réprobation de la bonne société. On la considère alors comme une insulte impardonnable envers l’humanité. Elle déclenche les foudres du parti religieux et de certains philosophes. 

Pourtant, les preuves fournies par Darwin étaient des plus troublantes. Sa notion d’ascendance commune sera d’ailleurs si logique pour expliquer de nombreux phénomènes qu’elle ralliera bientôt la quasi-totalité du Monde scientifique. 

La vie a donc évolué … L’admettre n’aura pas été facile! 

Mais, comme on l’a justement fait remarquer, « classer et inscrire l’évolution de l’homme dans le monde animal, admettre  qu’II tire de son passé un héritage non seulement physiologique mais aussi psychique, ce n’est pas le rabaisser au rang de la bête. Dire que l’homme est un animal ne signifie pas qu’Il ne soit qu’un animal! » (La Politique du vivant, Club de l’Horloge, Albin Michel,1979). 

L’histoire de la formation du cerveau – et le l’esprit – humain illustre cette affirmation. C’est par l’utilisation de son cerveau que l’Homme  va devenir Homme. 

Comment est-il donc passé du singe à son état actuel ?