des médecins.

 

 

Non pas qu’il faille soutenir la rémunération de tous les médecins, mais il faut reconnaître qu’il y a de grandes disparités dans ce corps de métier. Il est libéral donc soumis à l’offre de soins de qualité mais aussi à la concurrence des coûts pour ceux qui adoptent cette politique. Le profit, puisque c’est de cela qu’il s’agit, est devenu le but majeur de ce métier pour beaucoup de praticiens, même si nombreux sont ceux qui le pratiquent encore par humanité et altruisme avec honneur à leur vocation. Mais, il devient de moins en moins libéral par nécessité, étant une composante majeure de la santé, par son devoir social. C’est la nation, les Français, qui permirent à ces médecins cet honorable savoir, et leur reconnaissance est de soigner les malades quelques soient leurs conditions sociales. Il faut reconnaître que c’est souvent loin d’être le cas. De nombreux praticiens ont oublié leur serment d’Hippocrate. La probité dont il est question dans ce serment est balayée par les dépassements d’honoraires devenant prohibitifs avec la crise, mais aussi par leur refus pour certains de soigner les indigents de la CMU. «Ils n’ont qu’à aller à l’hôpital, argument que l’on entend souvent !».

 

Ils savent très bien que l’hôpital ne remplit plus sa fonction sachant qu’il faut plusieurs semaines d’attente, que les urgences sont débordées, et que l’on vous renvoie chez-vous presque le ventre ouvert. Le libéralisme médical est donc en cours d’évolution. Plus aucun médecin de ville ne se déplace au domicile des patients. Devenus injoignables pour une visite d’urgence, ils vous envoie au Samu qui, de ce fait, se trouve également surchargé. La médecine que j’ai connue n’existe plus.

 

Depuis 2004 le second cycle des études de médecine en France s’achève en sixième année pour tous les étudiants par les épreuves classantes nationales, elles ont remplacées le concours de l’internat. C’est à la suite de ces épreuves que l’étudiant suivant son rang choisit sa spécialité. S’il veut être généraliste, la spécialité la plus demandée est de trois années supplémentaires. Le niveau d’études est donc de bac + 9 pour un généraliste. Pour les autres spécialités la durée des études s’accroît de 4 à 6 années, soit bac+ 11 en moyenne, et de ce fait, le spécialiste apparaît comme le meilleur médecin. Mais généraliste touche à tout et l’expérience aidant sa valeur sociale est bien plus appréciée que celle du spécialiste. Par contre, la différence de revenus est loin d’être en rapport avec cette différence si en plus on tient compte du service rendu. La Sécurité sociale classe les consultations à 23 € et 28 € pour le généraliste et le spécialiste. Le spécialiste en secteur 2 peut pratiquer des dépassements d’honoraires et donc d’augmenter ses revenus.

 

Le généraliste secteur 1 non seulement ne peut passer en secteur 2, mais de plus, il n’est pas autorisé aux dépassements d’honoraires, sauf pour certains qui sont encore titulaire du droit permanent de dépassement. Outre ce cas, le généraliste est donc doublement pénalisé. Cette situation conduit pour quelques praticiens du secteur 1 à des abus à l’égard du patient. Ils lui font payer la consultation à plus de 23 €, et le patient confronté au piège, dans le cabinet du médecin, n’ose refuser bien que celui-ci ne déclare pas ce dépassement à la sécu. Une telle situation est un abus de position dominante punie par le code pénal.

 

Le généraliste a pour vocation d’être le médecin de famille, il connait mieux que quiconque ses patients mais aussi, il est celui qui passe souvent le plus de temps auprès d’eux.

 

Le généraliste est le sacrifié pour le spécialiste.

 

Quand on sait qu’une consultation spécialisée de cardiologie, de rhumatologie, de gastro-entérologie, d’ophtalmologie coûte de 55 € à 100 € et qui n’est remboursée qu’à 70 % sur la base de 28 €, si cette consultation est dans le parcours coordonné, et au même tarif sur la base de 23 € si la consultation n’y est pas, il y a donc un problème de coût qui limite l’accès aux spécialistes, pour de nombreux patients, d’autant plus qu’en général des actes complémentaires à d’autres spécialistes sont à prévoir. Et puis se généralise, par suite de longs délais d’attente, des abus pour ceux qui peuvent payer afin de passer en priorité. Nous sommes revenus au temps de l’occupation Allemande, ceux qui pouvaient payer avaient de quoi manger. Mais ce n’est pas sur ces coûts que l’abus des sur-honoraires est le plus important. Il est sur les actes de chirurgie spécialisée en orthopédie, par exemple, dans les cliniques, ils peuvent atteindre plus de 1.000 euros que pour le chirurgien.

 

Les dépenses en sur-honoraires atteindraient 2,5 milliards d’euros d’après un article signé Michel Chassang dans l’édition d’abonnés du Monde.fr. Elles ne représenteraient que 1 % des dépenses de santé consenties par les Français. Elles montrent que les spécialistes profitent de l’insuffisance des soins publics ce qui obligent de nombreux Français à faire appel à eux. Cela montre la dérive de ce système libéral qu’il convient de maîtriser.

 

Le gouvernement veut encadrer les dépassements d’honoraires, légalement, il ne peut le faire et cela d’autant plus qu’il ne les rembourse pas. Chacun est libre de payer ce que demande un praticien. C’est Raymond Barre qui institua ces sur-honoraires en 1980 en créant le secteur 2. Il ouvrit une porte qui fit et fait la fortune des spécialistes. Voir Les médecins payés au mérite, mais aussi Le silence des politiques sur la recrudescence des maladies infectieuses.

 

L’argument de Michel Chassang est de déclarer que les complémentaires santé financent pour moitié le coût des dépassements d’honoraires. Mais, il oublie de dire que ces complémentaires sont de plus en plus chères. Le précédent gouvernement s’est appuyé sur elles pour répercuter les hausses de tarifs des praticiens, des médicaments et des actes médicaux et la réduction des remboursements sécu.

 

Selon Michel Chassang les rémunérations des médecins Français seraient les moins élevées de l’OCDE. Et il prend en outre la comparaison du tarif horaire d’un médecin par rapport à celui d’un plombier ou d’une heure de taxi. Mais il oublie de préciser les médecins sur lesquels cette comparaison s’applique. Si l’on peut considérer que parfois un généraliste est plus mal payé qu’un plombier, ce qui est une fausse vérité, c’est loin d’être vrai pour un spécialiste. C’est la raison pour laquelle il faut rééquilibrer les honoraires des praticiens non pas en les augmentant mais dans une plus juste répartition généraliste-spécialiste. Outre la limitation des sur-honoraires qui est une nécessité nationale en cas de crise, les tarifs du secteur 1 mériteraient d’être relevés plus souvent dans une enveloppe budgétaire constante. Les spécialistes doivent comprendre qu’en période de crise il est juste d’accepter une limitation de leurs rémunérations, et la sécu d’admettre que les généralistes ne soient pas ceux qui doivent supporter seuls le coût des dépenses de santé.

 

Il y a quelques jours un fut appel lancé par l’Association Girondine La santé un droit pour tous, il est une pétition qui circule pour limiter les dépassements d’honoraires du secteur 2 en honoraires libres. Ce manifeste est soutenu par les praticiens hospitaliers, des médecins de ville libéraux, des généralistes et spécialistes, mais aussi par une quinzaine de professeurs hospitaliers de Bordeaux.

 

Le texte condamne le fait que de grands malades se voient «taxés dans leur parcours de soins par les moins scrupuleux de nos confrères, qui agissent en toute légalité». Les médecins signataires prennent clairement position contre le secteur 2, alors que le gouvernement cherche simplement à en limiter les excès. «Nous craignons que cette frilosité gouvernementale, qui définit déjà, avant les concertations, un compromis insatisfaisant, laisse perdurer un système qui déconstruit notre système de santé solidaire et s’oppose à l’accès aux soins pour tous», déplorent les signataires.

Qu’il est bon de constater que des praticiens condamnent cette pratique de leurs confrères.