un document qui n’engage pas le PS ?

 

Comment peut-on réagir lorsqu’un parti important publie un document sur la politique étrangère qui, au stade ou il l’écrit, ne l’engagerait pas, mais qu’il pourrait mettre en œuvre, si bien entendu il était en charge de gouverner, c’est ce qui est écrit en première page et que l’on comprend dans l’analyse du texte de cet avant projet du parti socialiste ?

La première réaction est de se dire, comment peut-on écrire quelque chose d’important, mais attention, ce que nous écrivons ne nous engage pas, alors pourquoi l’avoir écrit ? Pour montrer probablement qu’on y pense, pour montrer que l’on a des choses à proposer, mais qu’en politique internationale, le contexte est aléatoire étant lié aux politiques des autres, et que, dans ce domaine il faut être très prudent sachant que l’on ne peut rien faire, sans accord, d’autant que nous sommes liés à l’Union Européenne et au contexte international. De plus, on sait très bien depuis la cinquième république que la politique étrangère est le domaine réservé du président, il convient donc d’être prudent, avant de s’engager sur une politique, mais exprimer des orientations reste possible ce qui, dans ce domaine, est déjà hasardeux. C’est aussi pour cela que le PS n’a pas proposé depuis 30 ans un texte sur la politique étrangère de la France, il n’est pas le seul d’ailleurs. Il faut reconnaître que le président est surtout élu sur l’aspect politique intérieur, et qu’il fait, ce qu’il veut, en politique étrangère. Sur l’Europe le PS n’a jamais été uni, et comme pour les autres partis, les ténors se sont affrontés. Le non au référendum constitutionnel Européen de 2005 soutenu par Laurent Fabius, Mélenchon, Emmanuelli l’aile gauche en somme l’a finalement emporté avec beaucoup d’autres sur les oui de la droite conventionnelle et des démocrates, Jospin, Aubry, Rocard, DSK….

Le texte que l’on peut consulter ici, a été élaboré par les spécialistes anciens ministres que sont Hubert Védrine, Catherine Trautemann, Alain Richard, Elisabeth Guigou, Henri Webert, Pouria Amirshahi, et Laurent Baumel. Les 20 pages du texte ont été rédigées par Laurent Fabius et Jean-Christophe Cambadélis, amendé et voté à près de 90 % par quelques 60.000 militants du parti. Il ne s’agit pas d’un texte pour faire plaisir mais d’un texte pour gouverner déclare Laurent Fabius. Ce qui paraît curieux que, dans ce texte, c’est finalement une relance de l’Europe, tant combattue, par une maîtrise de la mondialisation en rénovant le multilatéralisme et en agissant sur la paix. De grands mots qui ne veulent pas dire grand chose et dont le résultat des négociations dépend de la bonne volonté des partenaires. Or, le mot mondialisation fait peur parce qu’il est porteur de dérèglements, délocalisations et autres, et d’une perte d’indépendance, mais plus que cela, c’est l’inconnu qui prédomine quand on connait ce que les banques mondiales sont capables de faire. Prétendre maîtriser cette mondialisation est un challenge difficile, mais pourquoi pas ?

Le projet comprend trois grands thèmes, le déséquilibre de la mondialisation, les échecs de la politique extérieure de Sarkozy, et le message de la France dans l’Europe et le monde au XXIème siècle.

Les prétentions socialistes internationales sont immenses puisqu’ils veulent les placer au cœur du projet socialiste. Critiquant la politique Sarkozyenne d’intégration de la France dans l’OTAN comme si cela constituait un succès. Comme le décalage croissant avec l’Allemagne, sans définir lequel, constituait également un succès. Tout comme si l’ampleur des gesticulations de notre président pouvait être génératrice de résultats ? La politique Sarkozyenne est notablement lapidée, sur la crise, sous toutes ses faces favorisant les dogmes libéraux laissant faire, le laissé faire, plutôt que la régulation, favorisant le tout marchant à l’intervention publique, l’acceptation des inégalités aux injustices sources de violence, favorisant l’internationalisme aux égoïsmes nationaux.

Les socialistes reconnaissent l’émergence d’un monde nouveau porté par la Chine, l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud au détriment des puissances occidentales montrant par là une évolution mondialiste chaotique ne parvenant pas depuis la guerre froide à trouver ses équilibres. La mondialisation qui a favorisé le décollage des pays émergents par les échanges internationaux s’est accompagnée de graves inégalités apparaissant comme une source de dérèglement. Économiquement cette mondialisation n’aurait pas profité aux pays pauvres ce qui est une évidence, et ce n’est pas d’aujourd’hui. Politiquement la montée des tensions vers une violence diffuse dans les rapports internationaux ont conduit à aggraver les menaces entre le monde arabo-musulman et l’Occident sur fond du traumatisme des «attentats du 11 septembre 2001». C’est donc un climat international que dénonce le PS pour lequel Sarkozy n’aurait pas su apporter des réponses appropriées. Dénonçant sa politique étrangère faite de coups médiatiques et de postures changeantes, il n’aurait fait que de dégrader l’image de la France.

L’action du chef de l’Etat est également critiquée dans son élément moteur au sein de l’UE par le fait qu’elle ait été incapable d’agir dans la régulation de la mondialisation par ses déclarations plutôt que ses résultats. Cela est à nuancer, ses «6 mois de présidence de l’Europe» ont été un exemple du dynamisme de Sarkozy, il faut reconnaître ce qui est vrai. Son action dans le conflit russo-géorgien sur l’Abkhazie et l’Ossétie du sud ou il a développé un dynamisme allant de Moscou à Tbilissi pour négocier avec le président Russe Dmitri Medvedev, en présence du premier ministre Vladimir Poutine, est à donner en exemple. S’il est en Europe une personnalité montrant un dynamisme volontaire c’est bien Sarkozy au point qu’il dérange plutôt qu’il n’arrange.

Avant d’aborder la position du parti socialiste sur l’Europe, sa politique migratoire serait à l’opposé des déclarations présidentielles et gouvernementales récentes, qui se caractérisent par leur démagogie, «nous disons que la France est riche du renouvellement permanent de sa population que lui ont valu les immigrations successives auxquelles elle doit une part de sa force. La politique actuelle, fondée sur une hostilité systématique à l’égard des immigrés, nuit aux pays en développement, elle nie la contribution des transferts financiers des migrants à la croissance de leur pays d’origine, elle retarde les transferts de savoir-faire nécessaires à la croissance économique et sociale de ces pays. Mais, en altérant notre image et notre influence auprès de nos partenaires francophones, elle ne sert pas non plus nos intérêts». Les socialistes réaffirment le droit d’asile qui doit être sanctuarisé à l’échelle internationale et singulièrement en Europe.

Les socialistes veulent une Europe relancée vers la croissance l’emploi et le progrès social.

Pour eux, ce n’est pas l’Europe que la crise disqualifie, c’est une Europe prisonnière d’une idéologie de droite. C’est vite oublier que cette crise est celle des banques, et l’Europe quelque soit sa gouvernance ne peut rien faire sans une régulation de système bancaire. Et là, sans un gouvernement supranational Européen doté d’une banque forte, est sans arme pour imposer une régulation des échanges internationaux.

Le parti socialiste définit trois crises, confiance, solidarité, représentativité. Ces trois crises correspondent au fait que l’Europe telle qu’elle est, n’est pas celle que les populations espéraient, et cela est la conséquence que l’Europe de l’échange s’est construite alors que celle de la solidarité et de la représentativité se heurte au nationalisme des États membres, ce qui serait illusoire de penser qu’il puisse s’estomper, bien au contraire, plus l’Europe va mal, plus il est puissant.

Ce texte d’avant projet propose des mécanismes de gouvernance économique. Pour la solidarité la création d’un fond monétaire Européen financé par une capacité d’emprunt Européen qui serait sous une gouvernance économique. Pour le PS, le pacte de stabilité doit être dépassé par des mécanismes de concertation en amont de nos budgets nationaux, ce qui revient à dire que nous ne serions contrains de tenir compte des orientations budgétaires de l’UE dans l’élaboration de notre plan. Quand à la régulation financière le parti socialiste propose un renforcement des règles de prudence, d’encadrer les produits dérivés, d’améliorer la transparence et de créer une agence Européenne de notation.

Dans sa conclusion, le parti socialiste veut mieux défendre nos idées, nos valeurs et nos intérêts. Le ministre des affaires étrangères se trouvera renforcé pour rétablir son rôle pivot dans la définition et la mise en œuvre de la politique étrangère, les ambassades auraient plus de moyens pour cette politique. Quand au parlement, il verrait restituer son rôle d’évaluation et de contrôle politique de la stratégie internationale de la France, qu’il s’agisse de notre politique étrangère ou de notre action de défense.