Que y a-t-il de plus dangereux qu’une secte avec ses partisans zélés ? Des hommes ayant perdu tout sens de la raison et agissant selon les bons vouloir d’un maître à penser dont le seul soucis est de tirer profit de la détresse de ces gens. Parfois, ils sont endoctrinés de telle sorte qu’ils commettent l’irréparable en faisant des dommages collatéraux. Le suicide collectif d’adeptes est une chose triste mais cela ne regarde qu’eux, ils sont libres de leur vie et font ce qu’ils veulent avec. La chose la plus déplorable c’est quand dans leur délire exterminateur, ils entraînent des innocents vers la mort. Il y a 17 ans, dans le métro tokyoïte, un terrible drame se déroula. 

Le dernier membre de la fameuse secte Aum, encore en fuite, vient d’être arrêté par la police japonaise. Katsuya Takahashi, 54 ans,  a été appréhendé dans le sud de la capitale, près d’un "manga café", véritable refuge pour les adeptes d’animations japonaises où on peut y consulter des mangas, des videos, surfer sur internet, dormir et même manger. Quand les policiers sont venus le chercher, il n’a émit aucune resistance et à immédiatement reconnu les faits. Il s’est présenté à eux très élégamment vêtu, chemise blanche, bien coiffé, bien rasé, comme s’il devait se rendre à un entretien d’embauche. Un contrat à long terme dans une geole de quelques mètres carrés.

Il était  devenu l’objectif de toutes les polices du pays depuis l’arrestation, début juin, d’un autre ex-membre, Naoko Kikuchi, une femme de 40 ans. Les deux comparses étaient toujours en étroite relation. 

La chasse à l’homme s’est faite grace à des images de Katsuya Takahashi diffusées sur de nombreux médias. Des clichés, plus ou moins nets, pris par des caméras de surveillance de son bureau. En effet, il continuait sa petite vie tranquille, comme si de rien n’était, sous une fausse identité au guichet d’une banque. Takahashi n’était pas un membre lamba, il était un des instigateurs de l’attentat et un séquestreur aux méthodes tortionnaires. Il avait enfermé chez lui et fait subir les pires supplices au frère d’un membre déserteur de la secte. 

 

Pour se remettre dans le contexte, nous sommes le 20 mars 1995, le quai du métro est bondé par des salary men, des office ladies, dans leur uniforme bien propret, se rendant au travail et par des jeunes allant en cours. Soudainement, les adeptes décident de frapper. Ils disposent des sacs remplis de gaz sarin sur cinq rames du métro en direction du quartier des ministères. Ce produit létal, plus nocif que le cyanure, a été crée durant la Seconde Guerre mondiale par les forces de l’Axe pour occire leur ennemis. La panique s’installe, le composé chimique volatile empoisonne des milliers de personnes. Malgré les efforts pour tenter de regagner la surface, la trappe se referme sur les victimes. Au total, on déplore 13 morts et plus de 6.000 blessés. Les responsables : la secte Aum. 

 

Aum, groupuscule religieux influencé par des préceptes bouddhistes et hindouistes teintés de prévisions apocalyptiques, a vu le jour en 1984. Le père de ce rassemblement mystique, Shoko Asahara, était un simple professeur de yoga, atteint d’une cécité légère mais au fort charisme. Un éloquence telle qu’il rassemblait plusieurs milliers de personnes à chacune de ses conférences. Il s’est laissé emporter par l’engouement et enivré par l’argent, il a perdu la raison. Avec tous les yens entassés sur le dos des faibles gens, il a investi dans une usine chimique dans les environs du Mont Fuji, là où il fut arrêté en 1995. Une arrestation procédé à temps, car ses desseins étaient funestes, la mise en place d’une quantité astronomique de gaz dans le but d’assassiner plus de 3 millions de personnes.

Avant l’attentat du métro, elle avait déjà tâtée le terrain un an plus tôt à  Matsumoto. Un acte criminel, lui aussi avec du gaz sarin et qui avait provoqué  la mort de huit personnes.

 

En mettant la main sur Takahashi, c’est  la fin d’une longue traque menée sans répit, que les policiers japonais ont mené avec brio. Au final, elle aura fait juger 189 ex-membres en 16 années de procédure, dont 13 ont été condamnés à la peine capitale. Cependant aucun n’a encore eu la corde autour du cou. Il peut paraitre étrange que dans le pays du zen et de la tolérance, la peine de mort soit toujours appliquée. Ce sujet est un vrai débat de société, alors que la Justice nippone s’orientait vers une abolition pure et simple de cette sentence irréversible au début des années 1990, l’attentat du métro a provoqué un revirement massif de l’opinion public. 

Même si Aum est décapitée, son leader étant sous les verrous, la loi ne l’a pas démantelée. Cependant, ses faits et gestes sont épiés de près par les forces de l’ordre afin d’éviter un nouveau dérapage mortel. Elle a même change de nom, comme le ferait un criminel en fuite, désormais il faut parler de la secte Aleph dont la politique du nouveau gourou se veut diamétralement opposée à celle d’Asahara. Le gouvernement japonais a une bonne occasion à saisir pour faire de même en revenant sur sa position vis à vis de la peine de mort.