Les affaires se suivent, et finalement se ressemblent, ou du moins se relient du point de vue des méthodes, des protagonistes… Il y a toujours eu, et sans doute hélas en sera-t-il toujours ainsi, des affaires de financements étouffées, de contrats détournés de leur objet, &c. Mais certaines, moins spectaculaires, mais qui peuvent ressurgir, donnent un coup de projecteur sur les pratiques du ministère de l’Intérieur… la maison Poulaga, comme certains la surnomment. Va-t-on vers un Poulagagate ?
La reparution, annoncée enfin cette troisième semaine de février 2011, du livre de Jean Galli-Douani, Clearstream-Eads, le syndrome du sarkozysme, aux éditions belges Oser dire de Marco Pietteur, va sans doute permettre d’intéresser le public aux coulisses du ministère de l’Intérieur. Ce n’est pas le seul intérêt de cet ouvrage, mais outre les affaires spectaculaires et largement médiatisées, il jette un coup de projecteur sur certaines pratiques des hauts-fonctionnaires du ministère de l’Intérieur.
L’affaire Clearstream rebondira encore, avec les procès en appel visant notamment Dominique de Villepin, à Paris, mais aussi, à lui avec les appels du journaliste Denis Robert visant cette fois Clearstream Banking, la chambre de compensation luxembourgeoise. On croyait l’affaire EADS enterrée après l’avis de l’Autorité des marchés financiers, elle reprend vigueur avec, après celle du groupe Lagardère, la mise en examen du groupe Daimler. Pour le Woerthgate, Mediapart avait estimé que le volet politique et fiscal (ayant profité à Liliane Bettencourt) pourrait s’enliser : « comme l’enquête portant sur le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy, ce versant de l’affaire est toujours d’actualité d’un point de vue judiciaire, même si, pour l’instant, les investigations sont mises en sommeil. ». C’était début décembre 2010. Deux mois plus tard, des perquisitions étaient effectués dans des locaux et bureaux tant d’Éric Woerth que de Patrick Ouart, le conseiller élyséen pour la Justice.
Il est de vieilles affaires, remontant à fort loin, qui, elles, concentrent l’attention sur le ministère de l’Intérieur. Chez le même éditeur, Marco Pietteur, était paru en 2005 un essai singulier, Qui a peur de Loïc Le Ribault ? Loïc Le Ribault est l’auteur de plusieurs livres, et il a été notamment l’un des informateurs d’Olivia Recasens, Jean-Michel Décugis et Christophe Labbé qui avaient fait paraître chez Laffont le fameux Place Beauvau, la face cachée de la police. Il était déjà question dans divers livres du laboratoire d’investigations scientifiques de Loïc Le Ribault, le Carme (Centre d’applications et de recherches en microscopie électronique). Sur son site, Loïc Le Ribault résume : tout aura été mis en œuvre pour, sinon vraiment le faire disparaître en tant qu’électron libre et gêneur, mais pour récupérer – au profit d’autres – certaines de ses initiatives et de nombreux contrats : « vol de brevets et d’inventions, la contrefaçon, le plagiat, la diffamation, la falsification de documents, la censure, la privation de droits civiques et même l’emprisonnement arbitraire. ». Dans son cas, d’autres intérêts que ceux de certains hauts-fonctionnaires du ministère de l’Intérieur et d’hommes politiques intervenaient. Ayant mis au point un médicament, il s’attira les foudres de l’Ordre des pharmaciens. Mais alors que son laboratoire, Le Carme, était, à la fin des années 1980, très sollicité par la police et la gendarmerie pour des analyses scientifiques, puis qu’il met au point une sorte de kit, la Valise PPM (de prélèvements pour microanalyse), puis un véhicule d’intervention sur les scènes de crimes, il est, selon son Loïc Le Ribault « condamné à mort dès 1990 ». La faillite du Carme, estime-t-il, était programmée, elle interviendra en septembre 1991. «Certaines des oraisons funèbres qu’elle suscite prouvent que les journalistes ont compris les raisons de son assassinat. Désormais, après l’élimination du C.A.R.M.E., toutes les affaires délicates dans lesquelles l’État pourrait (ou est) impliqué sont traitées par des experts d’État, payés par l’État, faisant travailler du personnel d’Etat utilisant du matériel d’Etat dans des laboratoires d’État… ». En fait, tous les laboratoires auxquels la police scientifique a recours ne sont pas, par exemple, le seul I.R.C.G.N. (Institut de Recherches Criminelles de la Gendarmerie Nationale), qui a d’ailleurs récupéré, en liquidation judiciaire, des matériels du Carme.
L’affaire du Carme est complexe mais n’est point sans évoquer celle de Sud-Accueil, la société crée par Jean Galli-Douani pour prendre en charge les déplacements des fonctionnaires de l’Intérieur. Dans Clearstream-Eads, J. Galli-Douani révèle qu’il a été sommé de concéder des rétrocommissions au ministère de l’Intérieur. N’ayant voulu s’exécuter, son dispositif a été repris par une autre société, l’américaine Carlson WagonLit. S’ensuivent toute une séries de péripéties, des menaces, &c.
C’est pourquoi d’ailleurs, après avoir remis ses dossiers au président de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, Jean Galli-Douani a saisi le procureur Marin et le parquet de Paris d’une plainte visant nommément Alexandre Jevakhoff, signataire de certains documents officiels. Alexandre Jevakhoff était à l’époque des faits un haut-fonctionnaire du ministère de l’Intérieur. Sa carrière s’est poursuivie auprès de Michel Alliot-Marie en tant que chef de cabinet à la Défense, la Justice, et à présent aux affaires étrangères.
Jean Galli-Douani a déposé plainte récemment pour « faux en écriture publique, usage de faux, entrave à la justice, commis par une personne détentrice de l’autorité publique… » Le numéro d’ordre est le 1104191096 pour le bureau ÉCOFI (écomonique et financier) du parquet du TGI de Paris. On verra quel sort sera réservé à cette plainte.
Le livre Clearstream-Eads avait tout d’abord été imprimé par les éditions Bénévent. Par l’intermédiaire de Mario Stasi, ancien bâtonnier du barreau de Paris, Alexandre Jevakhoff était intervenu auprès de ces éditions qui n’ont jamais diffusé cet ouvrage. Une suite de tergiversations de l’éditeur, qui, dans un second temps, s’était engagé à faire diffuser ce livre, ont conduit l’auteur à s’adresser à une maison d’édition belge.
Comme l’avait naguère estimé La Voix du Nord à propos d’une audience Écofi du parquet de Lille, « la question clef pourrait être : combien faut-il détourner de millions pour mériter la prison ferme ? » (VdN, 7 août 2009). Les chambres spécialisées des tribunaux traitent notamment « des montages financiers labyrinthiques. ». Dans le cas de Sud-Accueil et de Carlson WagonLit, qu’en est-il exactement ? C’est notamment le sujet de la première partie du livre Clearstream-Eads. On l’a vu, des affaires judiciaires s’enlisent, d’autres finissent par la mise hors de cause de tous les protagonistes (ainsi, pour Eads, du fait de l’Autorité des marchés financiers, instance aussi judiciaire), mais certaines se prolongent ou renaissent. Ne préjugeons pas de l’issue de cette plainte. Relevons simplement que c’est peut-être aussi l’opinion publique et les médias qui ont sans doute, dans une mesure incertaine mais notable, influé dans le désaisissement du procureur Courroye au profits de magistrats instructeurs bordelais.
Le sous-titre de Clearstream-Eads est éloquent : le syndrome du sarkozysme. Pour l’auteur, dans diverses affaires, la sienne et, avance-t-il, beaucoup d’autres, le moteur est le financement politique mais aussi divers profits relevant du favoritisme. On aura pu s’étonner du maintien de Michèle Alliot-Marie au gouvernement et le Canard enchaîné a pu considérer que la révélation des détails du voyage du Premier ministre, François Fillon, en Égypte, était utilisée en tant que contre-feu. Difficile de remercier MAM sans dissoudre totalement. La question que beaucoup se posent, c’est de savoir pourquoi il est si crucial de maintenir MAM-la-Gaffeuse en place, et depuis si longtemps. Cela tient-il à elle-même ou à son entourage ?
Pour résumer, va-t-on vers un Poulagagate qui ouvrirait, ou au moins entrouvrirait, d’autres portes dérobées ?
Ah ben, d’abord j’avais les commentaires (cet interface) avant l’article.
Maintenant j’ai la fin de l’article d’abord, puis l’interface des commentaires, puis le début de l’article…
Lu sur Mediapart, cette appréciation de Julian Assange (WikiLeaks). Toute ressemblance entre un pays ou un autre, une situation ou une autre, un gate ou un autre, serait évidemment fortuite :
« [i]En réponse au Cablegate et à nos autres révélations, nous avons vu la réalité crue du pouvoir washingtonien qui essaie de se sauver, d’une façon qui avait été difficile à déceler jusque-là. C’est comme un éclair qui éclaire brièvement une pièce sombre et, un instant, la lumière montre les silhouettes dans la pièce. Nous avons vu une censure pire que celle qui sévissait au temps de l’Union soviétique. On pensait que cela n’existait pas à l’Ouest. C’est faux: la censure existe en Occident, elle s’exprimait jusqu’alors de manière plus subtile. Mais la force de la réponse a été telle qu’elle s’est exercée de façon plus grossière qui fait qu’on peut la constater clairement.[/i] ».
Et pour vous remémorer certaines mésaventures du journaliste Denis Robert, au Luxembourg et en France :
« [i]nous voyons qu’il n’y a pas de séparation entre les banques et le pouvoir à Washington. Le réseau bancaire peut être utilisé comme outil de censure. Et des individus comme Hillary Clinton ne craignent pas d’utiliser ces moyens de pression. Alors même qu’ils se plaignent du grand firewall de Chine, ils ne craignent pas d’ériger la grande muraille financière autour des Etats-Unis. [/i] ».
TOUT EST COMPLOT !
on est les esclaves de Metropolis .
Lang était vraiment un visionnaire.
voir Robert BOULIN et « Le Grand » !
les pièces-preuves qui disparaissent.
Les Suisses refusent de déposer leurs armes !
finalement, ils ont peut-être raison !!!