de Charles Millon.

Document Le Monde.fr

L’ex-ministre de la défense de Jacques Chirac a confirmé l’existence de rétrocommissions qui auraient été versées jusqu’en 1995 en marge d’un contrat de vente au Pakistan de sous-marins Français selon l’AFP, et le Nouvel Observateur. La bombe Millon titre le Nouvel Obs. C’est une bombe en effet, une information de première grandeur et c’est devant le juge Van Ruymbeke chargé de l’affaire que cette révélation a été faite. Elle confirme qu’il y a bien eu des rétrocommissions qui ont, peut être, été gérées par le gouvernement Balladur entre 1994 et 1995, elles mettraient aussi en cause Nicolas Sarkozy comme le directeur de campagne de Balladur et ministre du budget de l’époque. C’est le 15 novembre que Charles Millon a été entendu par ce juge concernant le contrat Pakistanais. «En ce qui concerne le contrat Pakistanais, a poursuivi Charles Millon, au vu des rapports des services secrets et des analyses qui ont été effectuées par les services du ministère, on a eu l’intime conviction qu’il y avait eu des rétrocommissions». L’ultime conviction n’est pas une affirmation, mais avec les soupçons déjà révélés, le dossier est déjà très lourd, il est probablement certain qu’il y a eu des rétrocommissions, auraient telles servis au financement de la campagne d’Édouard Balladur lors de la présidentielle de 1995 avec la complicité de Nicolas Sarkozy ? La levée du secret défense qui entoure cette affaire devrait permettre d’affirmer ou d’infirmer les faits déjà soupçonnés.

Un sous-marin Agosta en août 2002 à Karachi, document Le Monde.fr

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Rappelons les faits qui sont relatés dans un rapport d’information par la Commission de la Défense Nationale et des Forces Armées, sur les circonstances entourant l’attentat du 08 mai 2002 à Karachi à lire ici. Quelques extraits de ce rapport,

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Comme complément on peut se reporter également a l’article «l’affaire Karachi», ici. Compte tenu de cette révélation, dont on peut lire l’intégralité de cette révélation sur le site le site du Nouvel Obs.com ici, les familles des victimes ont demandé l’audition en tant que témoins de Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac et Dominique de Villepin en tant qu’ancien secrétaire général de l’Élysée par le juge Van Ruymbeke. C’est l’avocat des familles Me Olivier Morice, qui lors d’une conférence de presse, a déclaré que cette demande est la conséquence de la déposition de Charles Millon. C’est lui, qui en 1995, a été chargé de mettre fin aux versements de commissions sur certains contrats d’armement.

«Les parties civiles insistent également sur le fait qu’une audition de Nicolas Sarkozy est possible même s’il est couvert par une immunité présidentielle. Il faut que Nicolas Sarkozy lève toute ambiguïté», a ajouté l’avocat.

L’affaire est éminemment très grave politiquement, elle touche les plus hautes autorités de l’État, s’il s’avérait que l’arrêt de ces commissions illicites a été la cause de l’attentat suicide de Karachi provoquant la mort de 14 personnes dont onze employés et ressortissants Français. Les députés socialistes ont demandé mercredi 16/11/10 par les voix de Messieurs Jean-Marc Ayrault et Bernard Caseneuve que soient entendus Jacques Chirac et Dominique de Villepin par la commission de la défense de l’Assemblée nationale. Ils ont également redemandé que le président de l’Assemblée nationale transmette les procès verbaux des auditions à un juge qui en a fait la demande. Ils ont également souhaité qu’Alain Juppé ministre actuel de la défense, mais premier ministre à l’époque de Jacques Chirac puisse donner toutes explications sur cette affaire. Quand à François Bayrou, il a réclamé la levée du secret défense, ce sont des affaires qui pourrissent la vie politique depuis des décennies a-t-il déclaré.

Jean-Louis Debré, président du Conseil constitutionnel, refuse de divulguer les documents. Cette information vient corroborer les conclusions d’un rapport effectué en 2002 par un ancien agent de la direction de la surveillance du territoire, DST, qui jugeait lui aussi que l’arrêt du versement de ces commissions avait conduit à l’attentat de Karachi. Or, les autorités Françaises n’ont jamais divulgué les conclusions de ce rapport, avant qu’il ne soit révélé par Le Point en 2008. Durant toutes ces années, la piste suivie par les enquêteurs était celle d’un attentat commandité par Al-Qaïda.

Un dépôt d’argent liquide de 10 millions de Francs avait été effectué sur le compte de campagne d’Edouard Balladur. Selon son équipe, il s’agissait de sommes correspondant à la vente d’articles publicitaires en marge de la campagne. Une explication pour le moins vague. Les comptes de campagne ont pourtant été validés par le Conseil constitutionnel. Le juge Trévidic et l’avocat des familles de victimes ont demandé à Jean-Louis Debré d’ouvrir ces archives. Par deux fois, celui-ci a refusé, arguant du «secret des délibérés» du conseil. Quinze ans après les faits, l’argument peut paraître étrange, qui faut-il sauver ? S’il n’y a aucune irrégularité pourquoi ne pas ouvrir les dossiers ?

Le Conseil constitutionnel aurait t-il été abusé ?

Roland Dumas alors président du Conseil constitutionnel déclare ne se souvenir d’aucune irrégularité !

Cette affaire se présente un niveau de gravité politique bien plus important que l’affaire Woerth-Bettencort, qui somme toute n’est que du conflit d’intérêt, de financement et de fraudes fiscales sous couverts politiques, et une vente douteuse d’une parcelle de la forêt de Compiègne. Il s’agit là d’un réseau monté de vente d’armes, qui met en œuvre des sociétés offshore pour négocier ces ventes, et cela se fait par des transferts d’argent en paiement au travail effectué, ce qui est logique, mais qui conduisent bien souvent à des arrangements sur les sommes engagées favorisant des «reconnaissances» conduisant à des rétrocommissions pour ce que j’en ai appris. Si l’on stoppe les versements les intermédiaires ne sont pas contents.

Qui serait en définitive responsable de la mort des onze Français ? On ne peut reprocher à Jacques Chirac d’avoir fait annulé le versement des commissions, l’aurait-il fait par vengeance ? A cette époque l’entente entre les deux hommes était plutôt à la vengeance. Dans ce cas, pourquoi Jacques Chirac au fait de l’affaire ne l’a-t-il pas mise à jour ? Aurait t-il jugé suffisant l’arrêt de ces rétrocommissions afin de ne pas mettre dans une situation politique intenable son parti politique ? De même on ne peut, non plus, accuser Édouard Balladur et Nicolas Sarkozy de la mort de ces personnes, donc, ils ne seraient coupables que si ces rétrocommissions auraient servis au financement de la campagne Balladur avec la complicité de Sarkozy, ce qui bien entendu était interdit. Rien n’est sûr, et rien ne permet actuellement de tirer des conclusions accusant précisément qu’Édouard Balladur ait touché ces retrocommissions. Le problème est que les familles veulent connaître la vérité, et là on doit leur en donner la possibilité. La réponse de Nicolas Sarkozy qualifiant de «fable» cette affaire est intolérable et en dessous de toute responsabilité envers ces familles, il doit s’expliquer et permettre la levée du secret défense.