J’ai reçu une lettre…

C’est le premier jour de l’hiver, qu’elle m’est parvenue. Elle n’était pas rédigée en vers, ç’aurait été inattendu…

Dans l’interphone, la voix du facteur, monocorde et blasée, m’annonce la couleur…

Oui, c’est bien moi. Oui, c’est toujours au 3ème… Il faut dire qu’avec moi, l’homme a pris 8 mois fermes…

Oui, ça fait huit mois, huit mois que j’entretiens une correspondance avec celui qui me paye, qui se paie ma tête, et que je tiens à distance.

Alors, le facteur monte les étages, et j’accuse réception… Quand le temps est à l’orage, tombent les allégations…

Je reçois, je lis, je m’offusque, parfois. Je classe, je réponds, j’en appelle à la loi.

Cette vie toute épistolaire, je la savais heureusement éphémère. Elle m’aura au moins inspiré ces quelques vers. Des vers pour témoigner que tout endurer ne rime à rien. Tomber sur un os, ne condamne pas à une vie de chien !

Une vie professionnelle n’est pas éternelle. Etre bafoué peut être mortel…

C’est le premier jour de l’hiver, et j’y suis parvenue… Envers et contre tout j’ai mis fin aux abus. Aujourd’hui, peut-être ne suis-je plus celle que je fus…

Et pourtant c’est bien moi. Oui, j’habite toujours au 3ème. Je ne sais pas pourquoi, mais je me sens plus zen. Car j’ai reçu ma lettre. Ma lettre de licenciement. Vous trouvez ça inattendu, peut-être un peu dément ? Mais je manquais d’air, moi ! Je n’avais plus l’air de rien. Plus envie de me lever le matin, plus envie de rentrer la mine chagrin. Plus envie d’entendre des mots plein de dédain. Plus envie de croire que je ne valais rien. Juste envie d’être un être humain.

C’est le premier jour de l’hiver. Je suis officiellement une chercheuse d’emploi. Qui suis-je ? Que puis-je ? Que faire ? Où me tourner ?…

Sur le sommet de mon sapin qui clignote, j’ai mis une grosse étoile dorée. Je ne sais pas si c’est la bonne, mais en tous cas, elle n’est pas prête de filer… !