On ne saura jamais si Rachida Dati interprétant ingénument Lust in Translation aura ou non sciemment confondu « fellation » et « inflation » pour recouvrir une notoriété internationale. En revanche, il n’y a pas que de la « petite mort » en Palestine et Israël mais les va-t-en-guerre de l’Hexagone, des deux camps, s’emploient à travestir les réalités pour essentiellement obtenir de la notoriété.

Tout devient bon à Risposte laïque pour se faire la cantinière et le fourrier de Jeanne-Marine Le Pen. Factuellement, je n’arrive pas à croire que l’éditorialiste Cyrano, de RP, n’ait pas volontairement rajeuni une déjà vieille histoire : « Le 10 juin 2010, le Brussel (sic) Journal publiait un article hallucinant, intitulé : “Les talibans m’ont violée, mais ils m’ont respectée”. C’était une interview de Joanie de Rijke, une journaliste néerlandaise de gauche qui s’est rendue en Afghanistan pour faire une interview sympathique avec les talibans djihadistes qui venaient de tuer dix soldats français… »

 

Consultez le site du Brussels Journal et vous serez bien en peine de trouver un entretien à cette date. En revanche, si vous vous reportez à l’article de Tom Landen en date du premier août 2009, vous trouvez un récit d’une toute autre facture. Et pourtant, ce Brussels Journal qui appuie la régie publicitaire du Conservative Blog, n’est pas tendre avec Joanie de Rijke. Mais Tom Landen s’efforce de rester factuel. Cette journaliste résidant en Flandre belge travaille généralement pour une sorte d’Elle ou Lui ou Cosmopolitan local mâtiné d’Entrevue, P-Magazine. On peut certes être « de gauche » et travailler pour ce type de presse tout comme des syndicalistes de L’Aurore sont passés au Figaro. Tom Landen cite le livre de Joanie de Rijke d’où il ressort que les « talibans » sont en fait un groupe ayant certes des arrangements avec les groupes religieux afghano-pakistanais, mais surtout un clan de trafiquants (contrebande ? prises d’otages certainement). Leur chef proposera à la journaliste une séance de triolisme avec l’une de ses épouses, ce qui n’est pas trop islamo-mahométan radical. En aucun cas il ne s’agit de djihadistes, ou alors, c’est bien mal connaître l’Afghanistan.

 

Mais peu importe à l’éditorialiste Cyrano. Les faits ne sont que prétextes à falsifications pour fustiger les « voyous issus de la diversité » dont il s’accommoderait sans doute si les mêmes, rétribués (pourquoi pas par ses soins : cela se vit en 1968-1969 quand des « démocrates chrétiens » alliés à d’anciens OAS rétribuaient des bandes de délinquants notoires pour rosser les étudiants), cassaient du « bobo-gaucho ». En fait, la délinquance est un prétexte. Il s’agit, comme Valérie Pécresse, d’éradiquer ce qui subsiste de l’université d’Edgar Faure post-1968, comme Copé-Bertrand, de revenir sur les 35 heures, et si possible les congés payés du Front populaire… Le Front national, qui comprend une tendance judéophile, n’a qu’un intérêt fort limité pour le conflit israélo-palestinien, mais s’en servir pour stigmatiser toutes les Palestiniennes et tous les Palestiniens (qui ne sont pas toutes et tous au Hamas, loin de là…), c’est commode.

 

Ce dont rêvent les groupuscules d’extrême-droite, ceux de la communauté juive française comme les autres, dont les antisémites au sens premier, c’est d’abord de flanquer des raclées aux « gauchos ». Comme c’est plus risqué que de ratonner à l’occasion, de temps à autres, ils se défoulent sur le voisinage « basané » ou lors d’expéditions plus lointaines.

 

Pour simple info, SOS-Sexisme me transmet un appel intitulé « Mobilisation générale : Touche pas à ma sénatrice ! ». Il s’agit de la sénatrice Alima-Boumediene-Thiery (Écologiste) qui, avec Omar Slaouti (NPA), comparait devant le TGI de Pontoise le jeudi 14 octobre prochain « à la demande du fanatique maître-chanteur Sammy Ghozlan (dont il faut absolument lire la prose raciste et haineuse) ». Ghozlan serait partisan, en son for intérieur, de gazer tous les Juifs qui s’opposent aux colons radicaux et à l’extrême-droite israélienne que, en lisant sa prose, on pourrait s’en persuader. Pour lui, « Barak Obama a lancé la troisième Intifada ». Sans commentaire.

 

Les signataires de l’appel, CAPJPO-EuroPalestine, appellent à une massive présence devant le tribunal et plus généralement à une mise en quarantaine (un boycott) des achats de produits israéliens. Tout comme Riposte laïque, mais sur un tout autre ton, EuroPalestine se targue de représenter une large majorité (silencieuse ?) de la population française.

 

Parfois, la même véhémence caractérise les antagonistes. Delanoë est qualifié de collabo-pétainiste, de complice d’un État assassin. Et Ben Ali, le Tunisien, alors ? On le sait, à gauche, nombre de militants estiment que les dictatures du monde arabo-maghrébin s’inventeraient un Israël s’il venait à disparaître. Mais cela peut aller plus loin. Si un Théodore Herzl palestinien émergeait, prônant des idéaux socialistes, et demandant à coloniser une partie d’un État arabe ou maghrébin, on se demande si ces mêmes militants ne deviendraient pas anti-arabes. Certes pas racistes : des coptes d’Égypte peuvent se considérer islamophobes (et on peut les comprendre) sans être pour autant racistes, ou « antisémites » au sens où une partie de la communauté juive veut restreindre le terme. L’ennui avec certains pro-palestiniens c’est que dérive en dérive, ils finissent par s’accommoder de tout « ennemi de leurs ennemis ». La réalité est en fait beaucoup plus nuancée à gauche, qui compte ses islamophobes ; tout comme, en face, même à l’extrême-droite, des islamophobes sont très loin d’être anti-arabes.

 

Je suis longtemps resté très réservé à l’égard de Riposte laïque. J’ai quitté une manifestation pro-palestinienne dès que j’ai perçu des « Allah-ou-Akbar » scandés ; je ne considère pas que toute expression laïque « musclée » (en propos) soit excessive. Envers et à l’encontre de Riposte laïque, en fonction de son évolution, mon opinion est à présent faite : infréquentables ! Jusqu’à nouvel ordre.

 

Les crimes des uns n’exonèrent pas les crimes des autres. Nous avons au moins les souvenirs de la guerre d’Algérie pour nous le remémorer. Ce qui est sûr, c’est que si l’un comme l’autre camp se targue d’exprimer la voix ou le sentiment d’une majorité de l’opinion, cette même majorité ne ressent aucune envie de se retrouver transformée, à son esprit et corps défendant, en « harkis » de l’autre ou l’un des camps. Cela n’implique pas une neutralité « apolitique… donc de droite », comme il est dit par certains (en face, l’apolitisme marque l’acceptation passive à un mythique socialo-communisme « ambiant »).

 

Mon propos n’est pas ici de me prononcer pour ou contre un État palestinien ou israélien viable, ou de botter en touche (certes, idéalement, un seul État… plus idéal que la Belgique…). Mais cette question ne doit pas occulter le nécessaire débat (à défaut de vrai dialogue) qu’il va bien falloir instaurer entre la gauche et la droite, y compris avec certains partisans de Jeanne-Marine Le Pen, parce que les sympathisantes et sympathisants du FN ne sont plus tout à fait aujourd’hui les mêmes qu’hier. Les analyses électorales, en divers pays européens, doivent y inciter.

 

Du point de vue de l’application de la loi Gayssot, le cas d’Alima Boumediene-Thiery peut évoquer celui de Vincent Reynouard (militant négationniste, sur le cas duquel Noam Chomsky s’est exprimé). Sur un tel débat comme pour d’autres, gardons-nous d’instrumentaliser tant les Israéliennes que les Palestiniens, tant les Israéliens que les Palestiniennes.

 

Mais ne soyons pas neutres pour autant. Pour conclure en évoquant autre chose, et un peu « élargir », je signale que la pétition « Nesma, réfugiée libyenne lesbienne, doit rester en France », a été lancée. Les encore fréquentables sympathisantes et sympathisants de Riposte laïque, même s’ils sont modérément homophobes, vont-ils la signer ? En compagnie, de par exemple, le Mouvement des Jeunes Socialistes de Charente Maritime ? Et le Collectif du PCF contre les discriminations des personnes LGBT ? On verra… En tout cas, ce ne sera pas aux côtés de  Forsane Alizza (groupe islamiste qui dissuade tout démocrate de se joindre aux manifestations pro-palestiniennes qu’il « anime »).