Maintenant que l’après Moubarak se dessine en Egypte,il reste à en tirer les conclusions géopolitiques pour les pays voisins. Israël, plus particulièrement, s’active pour que ne se réalise pas le scénario diplomatique du pire pour lui.

Face à l’accélération des évènements égyptiens Israël a du improviser une politique pour tenter de contrer les éventuels désagréments géopolitiques en réponse à la situation égyptienne.

Dans les faits la posture israélienne s’est construite en trois temps, et alors que s’amorce le troisième, l’Etat hébreux voit ressurgir le possible spectre d’un néo-nassérisme qui lui serait potentiellement hostile.

En effet dans un premier temps il a fallu s’atteler à essayer d’adopter l’attitude la plus juste vis-à-vis des revendications du peuple égyptien. Il pouvait être dans l’intérêt israélien de voir se poursuivre le statut quo politique, mais devant la détermination du peuple égyptien, l’Etat hébreux a du s’adapter, sans pouvoir intervenir sur la scène intérieure égyptienne.

Une fois Moubarak partit il fallait régler d’urgence les questions de sécurité immédiate que cette nouveauté engendrait. C’est ce à quoi s’attèle le pouvoir israélien depuis la fin de semaine dernière. En premier lieu tacher de se voir confirmer que le gouvernement par intérim poursuivrait dans le sens d’une paix froide vis-à-vis de l’Etat hébreux. Mais aussi chercher les moyens pour sécuriser le Sinaï. Le Hamas, voire même des agents d’Al Quaïda s’étant précipités dans la zone mitoyenne aux deux Etats sitôt le chaos égyptien avéré. Devant les troubles urbains frappant le pays les forces de police égyptiennes ont eu tendance à délaisser la surveillance du Sinaï. Pour juguler le problème Israël est allé jusqu’à, exceptionnellement, autoriser le déploiement de quelques soldats égyptiens sur la zone.

Mais pour Israël le risque est bel et bien politique. Avec en point de mire les craintes de voir se reproduire le scénario de 1952. Déjà en premier lieu sur la fin de règne de Moubarak c’est après concertation avec Omar Souileiman, nouvel homme fort du régime de transition et assez proche des cercles dirigeants israéliens, que l’Etat hébreux s’est convaincu du bien fondé d’un coup d’état militaire déposant l’ancien tyran puis laissant la direction des affaires à l’armée.

Mais si cette solution rassure dans l’immédiat, puisqu’elle met fin aux manifestations et donc aux risques de chaos, elle n’augure en rien d’une normalisation politique à venir. Déjà dans l’hypothèse, très probable, d’une sortie de l’intérim politique par des élections reste toujours la menace du parti des frères musulmans.

Mais surtout Israël n’oublie pas que le coup d’Etat des officiers libres de 1952 avait déposé le roi Farouk pour, là aussi, offrir le pouvoir à un conseil révolutionnaire. On croyait alors le général Naguib suffisamment fort pour normaliser la situation, mais c’est un jeune officier, alors totalement inconnu, qui avait su tirer les marrons du feu. Il s’appelait Gamal Abdel Nasser.

Or, Israël l’a constaté, l’armée égyptienne d’aujourd’hui souffre, comme celle de 1952, de la gérontocratie de ses structures et du manque de charisme de ses plus hautes personnalités.

Si des élections se font rien n’empêche de voir de nouveau un jeune militaire professer un discours populiste, panarabe et pourquoi pas anti sioniste qui soit en phase avec certaines attentes de la société égyptienne. Bien que la révolution égyptienne se soit montrée revendicatrice d’un nationalisme et d’un  panarabisme non antidémocratiques, non antiaméricains et non antisionistes, le risque de voir réémerger de telles revendications peut, malgré tout exister.

Mais reste pourtant un garde fou de taille à cette marginalisation de l’armée, par l’un de ses membres : le fait que la quasi-totalité des officiers ait été formée aux Etats-Unis. De même l’aide financière que l’Oncle Sam apporte chaque année à l’armée peut apparaitre comme un frein à toute envie émancipatrice d’un officier. Mais ceci était vrai du temps de la dictature. Car nombre de personnes ont été choqué par la façon avec laquelle les Etats-Unis se sont empressés de lâcher leur allié de trente ans. Avec en ligne de mire, pour ceux qui méditent sur le sort de Moubarak, l’idée que si les Etats-Unis l’ont fait une fois, alors ils pourront le refaire.

Ainsi semble pouvoir se redessiner tout un Moyen-Orient encore plus hostile à Israël en réponse à une plus grande méfiance vis-à-vis de l’allié américain de la part de certains Etats de la région. Et là le grand gagnant pourrait bien être l’Iran. Déjà l’Arabie Saoudite a laissé entendre qu’elle pourrait envisager l’ouverture de relations diplomatiques et militaire avec la puissance perse.

On le voit donc Israël est loin d’avoir toutes les réponses sécuritaires et diplomatiques que le changement de régime au Caire exige.

http://www.lexpressiondz.com/article/5/2011-02-15/86097.html

http://www.letempsdz.com/content/view/53212/1/

http://www.dna.fr/fr/infos-generales/edito/info/4624157-Jean-Claude-Kiefer-L-autre-grand-defi

http://www.cyberpresse.ca/international/dossiers/crise-dans-le-monde-arabe/201102/13/01-4369861-egypte-les-medias-israeliens-hesitent-entre-lespoir-et-la-crainte.php

http://www.rfi.fr/moyen-orient/20110212-revolution-egyptienne-prisme-pays-bassin-mediterraneen-tour-horizon