Interview d’un agent secret américain (2)

David Gaubatz est un ancien agent fédéral de l'OSI, la "superpolice" de l'armée de l'air américaine

INTERVIEW EXCLUSIVE "LE BLOG DRZZ" David Gaubatz est un ancien agent fédéral de l'OSI, la "superpolice" de l'armée de l'air américaine. Spécialiste en contre-terrorisme et contre-espionnage, Gaubatz a mené plusieurs missions d'infiltration en Irak et a également travaillé pour le compte de l'ISG, la commission chargée par le Congrès de trouver les Armes de Destruction Massives du régime de Saddam Hussein. Plusieurs fois primé par le Pentagone, il a quitté l'armée en 2003 pour devenir inspecteur spécial auprès du laboratoire médico-légal de la ville de Dallas (Texas). David Gaubatz a accepté de devenir un expert scientifique pour le compte du "blog drzz" pour les questions relevant du terrorisme et du monde du renseignement. Ne manquez pas la première partie de cet entretien : Exclusif : Interview d'un ancien agent fédéral Questions et traduction de ADAMASTOR ——————————————————————————– SPECIAL lecteurs du blog drzz : Posez VOS questions à David Gaubatz en écrivant ICI. Je les relayerai auprès de lui et un article vous transmettra ses réponses. ——————————————————————————– ADAMASTOR : Comment avez-vous analysé les positions et prises de paroles françaises et européennes (ONU etc….) à l’égard de la politique américaine et de la guerre en Irak ? GAUBATZ : Depuis mon retour d'Irak en 2003 et mes rencontres avec de nombreux hommes politiques, j'accorde peu d'attention à la presse et aux médias télévisuels. Ce qui se passe derrière les portes closes est souvent bien différent de ce que l'on dit publiquement. A part cela, je crois qu'être allé en Irak en 2003 était une bonne chose, mais je suis d'accord, il y a eu beaucoup d'erreurs commises. Des erreurs continuent d'être faites et je pense que les Etats-Unis devraient commencer désormais les préparatifs pour quitter l'Irak. Les guerres seront toujours affreuses et de nombreuses personnes innocentes auront à en souffrir, mais il ya des moments où c'est la seule option. Lorsque cette option est choisie comme en 2003, la guerre devrait être faite sans tenir compte du politiquement correct et sans se battre à 25%, comme au Vietnam. La guerre en Irak a réalisé exactement ce que les terroristes islamiques ont toujours voulu. Elle a divisé l'Amérique plus qu'à n'importe quel autre moment de notre histoire, elle a provoqué des tensions avec nos amis de France, Allemagne et Royaume-Uni, pour n'en mentionner que quelques-uns. Je pense que la plupart des Américains sont d'accord avec l'opinion générale en France sur le fait de quitter l'Irak, mais comment en sortir avec élégance et ne pas avoir le souvenir d'un autre Vietnam empêchera ceci d'arriver avant plusieurs années. ADAMASTOR: Vous critiquez comme étant tardive la nouvelle stratégie en Irak. Pour autant pensez-vous que la pacification soit en bonne voie, et sinon y aurait-il d’autres solutions ? GAUBATZ : En 2003 d'autres agents fédéraux et moi-même avons souligné dans nos rapports au Département d'Etat américain et à notre administration que les Iraniens entraient dans le sud de l'Irak par milliers. Leur objectif était de monter une guérilla contre les forces de la coalition et provoquer une guerre civile entre les Sunnites et les Chiites. On nous a ignorés. Cette guerre est différente de tout celles dans lesquelles l'Amérique ou la France ont été engagées. L'ennemi n'a aucun respect de la vie et il ne porte l'uniforme d'aucun gouvernement. J'ai travaillé plus de 25 ans dans le contre-respionnage et le contre-terrorisme. Je me demande tous les jours: "Y at-il réellement une solution"? Cette guerre n'est pas contre l'Irak, c'est juste qu'elle se livre en Irak. La guerre se livre contre les terroristes islamistes et leurs partisans. Elle ne s'arrêtera jamais pour nous, contemporains. Finalement les États-Unis pourront quitter l'Irak, mais la guerre se poursuivra. Nos enfants et leurs enfants verront plus le terrorisme en Amérique, en France, en Allemagne et au Royaume-Uni. Des enfants innocents de tous les pays souffriront. En Irak et en Arabie Saoudite j'ai demandé à de nombreux musulmans, "y at-il une solution à la crise entre Israël et la Palestine ?" 100% ont répondu "seulement si les Israéliens quittent Israël" (et pas seulement Jérusalem ou d'autres régions). Nous savons tous que ça n'arrivera jamais. Quitter l'Irak ou rester en Irak ne marquera pas la fin du débat, cela n'indiquera qu'une seule chose: le lieu des combats changera. ADAMASTOR: Comment interprétez-vous la NIE ? GAUBATZ : Le rapport de la NIE ne signifie pas grand-chose concernant le véritable problème. "Ont-ils eu un programme interdit ou est-on au bord du cataclysme nucléaire" ne sont pas les questions dont l'Amérique, la France ou l'ONU devraient débattre. La vraie question est : "est-ce que l'Iran veut une bombe nucléaire?" Les Iraniens veulent l'arme nucléaire et cela devrait tous nous préoccuper. L'Iran est actuellement sous le contrôle d'un partisan du terrorisme et, si jamais il obtient l'arme nucléaire, il n'hésitera pas à l'utiliser contre des innocents. ADAMASTOR : l’Arabie Saoudite est-elle fiable ? GAUBATZ : L'Arabie Saoudite et le Soudan sont les deux nations islamiques les plus alignées sur la charia. Au cours des derniers mois, je me suis procuré de la documentation distribuée par l'Arabie saoudite dans des Centres islamiques aux États-Unis. Ces documents soutiennent de nombreux terroristes et le "djihad" contre tout pays ou personne qui ne suivent pas l'Islam. Quand je mentionne "djihad", je fais référence au djihad Qital (le combat physique) et non le "djihad" interne vu comme "prière". Les lecteurs intéressés à mieux comprendre la charia devraient consulter mes récents travaux sur www.mappingsharia.com. Je tiens à souligner que notre équipe de recherche dans ce projet de cartographie de la charia est composée de professionnels musulmans, chrétiens, juifs. De nombreux musulmans ne veulent pas vivre dans un État islamique, ni sous la charia. ADAMASTOR : comment gardez-vous la foi, l’idéal, le sens du devoir ? Et naguère, sur le terrain ? GAUBATZ : C'est certainement la plus simple et la plus difficile de toutes les questions. Je garde la foi et mon sens du devoir en sachant qu'il y a beaucoup, beaucoup de personnes honnêtes dans le monde. J'ai rencontré de nombreux Irakiens en 2003, que j'aimerai toujours et qui auront toujours de l'importance pour moi. A plusieurs reprises, les Irakiens ont sauvé non seulement ma vie, mais ont celles de nombreux membres des forces de la coalition. J'ai été, de mes propres yeux, témoin de la tristesse des enfants irakiens au cours de la phase initiale de la guerre. J'ai vu des enfants qui ont souffert après le 11 septembre 2001. Nous devons tous garder à l'esprit que les enfants sont innocents, ils n'ont pas de colère contre telle ou telle personne ou tel ou tel gouvernement, ou tel ou tel croyant. Les adultes insufflent cette haine dans l'esprit des enfants. Voilà comment je garde mon sens du devoir. Je veux donner tout ce qu'il m'est possible de donner pour leur sécurité. ADAMASTOR : Que pensez-vous de tous ces anciens responsables du renseignement qui sortent des ouvrages critiquant leur pays en guerre, livrent des informations dans la presse, se dédouanent de toutes responsabilités ? GAUBATZ : Je pourrais répondre par du "politiquement correct" et dire que d'anciens fonctionnaires ne devraient jamais dire quoi que ce soit de critique, mais je ne le ferai pas. Je crois qu'un citoyen devrait toujours soutenir son pays, surtout en temps de guerre. Cela ne veut pas dire qu'ils ne doivent pas être en désaccord. Être critique, c'est au sens large du terme. Par exemple, je crois qu'on a eu raison de partir en guerre en 2003, mais je pense (comme la plupart des gens) que des erreurs ont été commises. Cependant, si mon président (Démocrate ou Républicain) me demandait de retourner en Irak conduire des missions de contre-espionnage, je le ferais sans aucune hésitation. Je crois que tout citoyen de son pays ferait de même, ou devrait faire de même. Un jour peut-être, j' écrirai un livre. Ce ne sera pas pour l'argent mais pour l'histoire. Ces cinq dernières années, j'ai tenté de répondre aux questions de nombreuses personnes au sujet de mon expérience en Irak. Parfois, certaines d'entre eux n'ont pas aimé les réponses, mais on ne m'a jamais reproché d'être politiquement correct. L'époque que nous sommes en train de vivre est très dangereuse. Il n'y a pas de pays qui soit exempté d'une éventuelle attaque, chimique, biologique, ou nucléaire (bombe sale) par des terroristes.