Gaz de schiste : les vaches protestent aussi

José Bové va apprécier, Arnaud Montebourg beaucoup moins. Les vaches, le bétail en général, et sans doute plus largement la faune, n’apprécient pas du tout la fracturation permettant d’extraire le gaz de schiste. C’est en tout cas ce qu’il apparait aux États-Unis où des études sur l’état sanitaire du cheptel domestique ont été conduites. Les vaches ont des vapeurs, et meurent, les veaux naissent difformes.
Et cette fois, oui, les vaches folles tournent vraiment foldingues, avec de très nets troubles neurologiques
.
Mais, plus graves que les cas des enfants des écoles, ceux des toutous et des minous qui sont aussi atteints…

Certes, Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, ne se déclare pas favorable à l’exploitation immédiate, par fracturation extractive, du gaz de schiste. Mais, nuance, pour la poursuite de recherches afin de trouver des solutions moins polluantes. Il devrait en parler à son cheval (s’il en était, ou son chien ou chat, voire hamster) et l’assigner à résidence près des sites expérimentaux.

Robert Oswald et ses collègues de Cornell University, spécialisés en médecine moléculaire, se sont penchés sur la question de 24 faits survenus aux cheptels se trouvant à proximité d’installations d’extraction de gaz de schiste, réparties sur six États. Ils relèvent une corrélation entre divers incidents touchant à la reproduction, au comportement, aux décès (par insuffisance respiratoire) d’animaux exposés aux produits chimiques et effluents résultant de l’exploitation de ce type de gaz.

Des difformités ont été constatées, des décès aussi, mais également des troubles neurologiques. Seraient-ils dus au mode d’extraction du gaz ? Les coïncidences, lorsqu’il s’agit d’exploitations situées sur six États différents, n’en sont plus tout à fait. En tout cas, elles ne peuvent plus être considérées fortuites. Soit les vaches vêlent moins, soit leur progéniture présentent des tares, soit elles meurent. Et on ne sait si leurs voisines survivantes sont ou non entrées dans la chaîne alimentaire humaine en état réellement satisfaisant.

Bien évidemment, les exploitants agricoles et leurs familles sont tout autant exposés que le cheptel.

Dans la revue britannique The Ecologist, il a été fait état des résultats des investigations de Robert Oswald et de sa collègue, Michelle Bamberger, une vétérinaire. L’extraction du gaz de schiste ne favorise pas que les flatulences des animaux. Sur une exploitation de Pennsylvanie, la moitié du cheptel (70 vaches sur 140) sont mortes de manières liées aux effluents de l’extraction. 
L’étude, publiée initialement dans New Solutions (vol. 22, 2012), intitulée Impacts of Gas Drilling on Human and Animal Health, n’avait pas fait beaucoup de bruit de ce côté de l’Atlantique. Bovins, ovins, canins, &c., mais aussi volailles et humains sont affectés. Pour les humains, passe encore, mais des chiens, pensez donc ! Un seul cas chez un chat a été constaté, mais il en suffit d’un, n’est-il pas, pour les associations de protection des animaux… Il y a eu aussi un cas d’enfant humain, hospitalisé, traité à la morphine pour des douleurs abdominales, délirant sur son lit de souffrance (le delirium n’a pas été qualifié dans l’étude). 

Des victimes se sont plaintes, ont obtenu des compensions assorties de clauses de confidentialité (non-disclosure agreement), notent les rapporteurs. Les compagnies extractives n’ont pas voulu communiquer, faisant état de secrets de fabrication.

En Grande-Bretagne, la NFU (National Farmers Union, l’équivalent de la FNSEA) n’a pas vraiment tenté de divulguer cette étude. Elle a préféré insister sur la concurrence des compagnies extractives en cas de sécheresse : il faut beaucoup, beaucoup d’eau pour la fragmentation, autant de moins pour l’irrigation.

Son homologue de l’Ulster (UFU) ne se prononce pas encore mais relève qu’elle souhaite une plus large enquête d’utilité publique. Bref, consommer des fruits, légumes, de la viande provenant d’une zone d’exploitation de gaz de schiste peut alarmer les consommateurs, obliger les hypers et supers à ne pas renouveler des contrats.

Si Oswald et Bamberger ont eu depuis un plus large impact, ils sont rejoint par d’autres chercheurs  et médecins nord-américains dont la Dr. Theo Colborn, du Colorado, une endocrinologue qui a envoyé une lettre ouverte à la présidence des États-Unis. Elle a étudié le site de Garfield County (Col.) et considéré que les rejets influaient sur le système nerveux de toute personne (ou fœtus) ou animal exposé. Les Pro-Life (généralement financés par les industriels) vont-ils s’inquiéter, le Vatican va-t-il se prononcer, et Christine Boutin embrayer ?

La qualité de l’air est aussi en cause. Erie (18 000 âmes), au Colorado, est cinq fois plus polluée que Pasadena ou Dallas. En cause, rapporte EcoWatch, sa proximité avec le Wattenberg Field. Les fuites de méthane ne sont pas seules en cause.

Au cas ou la FNSEA, la Confédération paysanne et d’autres organisations ne seraient pas déjà au courant, l’Independent et The Ecologist répercutent la mise en garde du Dr Oswald à leurs homologues britanniques : l’industrie agroalimentaire risque très, très gros avec l’exploitation du gaz de schiste.

Les risques sont en particulier élevés en zones inondables. Or, le Colorado, qui compte déjà plus de 18 000 puits, a été lourdement inondé la semaine dernière. Une bonne partie de cet État risque de très fortes contamination des eaux et CBS News s’en est inquiétée. Or, des catastrophes naturelles, les États-Unis en connaîtront d’autres… Dans le Colorado, il y a bien sûr des écoles, mais aussi des élevages de chiens et chats, des refuges d’animaux domestiques : une hécatombe pourrait bien avoir raison de l’extraction du gaz de schiste en Amérique du Nord.

 

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

2 réflexions sur « Gaz de schiste : les vaches protestent aussi »

  1. Tous comptes faits, autant laisser les US faire l’expérience, et tout le temps que les news tourneront autour des effets secondaires de l’extraction du gaz de schiste, en France peut être y aura-t-il un sursaut, les écologistes menaceront de quitter la majorité.
    Bref un nouveau « bordel » dans ce Gouvernement « fantome »

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