Le JezzBall était inclus dans un « Entertainement Pack » de Microsoft vendu dans les années 1994-1995 (mais il remonte à 1992). Vous en trouverez encore des clones (Jeez Ball ou JeezBall) en graticiel et même, sur un site mémorial d’abandonwares (jeux informatiques retirés du commerce), une version originale assortie de son fichier d’aide localisé en français. Il vous est donc encore possible de gâcher des journées et des soirées entières à tenter de coincer des « atomes » (de petites boules) en alternant clics droits et gauches (et souvent bien « gauches ») de votre « mulot ». À l’occasion, les particules élémentaires du JezzBall vous porteront à la méditation sur le sens de l’existence, le destin de l’univers, et le refroidissement rapide du thé ou du café dans la tasse qu’à force de jouer vous oubliez que vous l’aviez préparée.
Le but est d’emprisonner les atomes au plus proche de leur circonférence et d’éliminer le plus possible de carrés et fractions de carrés qui composent la lice des combats. C’est coton. Je ne sais combien ce jeu possède de niveaux (cinquante, en fait, mais arriver au sixième tient déjà de l’exploit) , n’ayant pour le moment jamais dépassé le douzième (et échoué avec un résultat de 207 009 points, à raison 70 points par carré éliminé, et 140 ou 196 respectivement par colonne – ligne verticale – ou ligne horizontale tracée). Si vous éliminez les trois-quarts de la surface, vous passez au niveau suivant. Vous bénéficiez aussi de deux types de bonus, à partir de 80 ou 90 % de carrés effacés, ce qui complique la réflexion décisionnelle : tenter de les atteindre amplifie tant le risque d’élimination que celui, par inadvertance, de se retrouver en-deçà d’une honorable réussite à 77 ou 79 %. On croit tenter un 99 %, on se retrouve avec un piètre 75 %.
Par la suite, le découpage implique un choix de stratégies diverses, adaptées aux circonstances, et il s’agit d’en doser l’emploi selon les risques qu’elles impliquent. Qui trop embrasse mal étreint les petits atomes. C’est peut-être pourquoi Wikipedia le qualifie de « jeu de réflexion ». Sur la fuite du temps, les aléas de l’instant, la procrastination (des tâches plus essentielles), voire la volatilité des marchés (passés aussi avec soi-même), assurément.
Vous vous retrouvez sans cesse soumis aux affres du paradoxe du capitaine Haddock (« barbe en dessous, barbe en dessus ? », du drap), soit scinder d’un coup de ciseau horizontal ou vertical (au plus large, le plus délicat, ou au plus court, plus réaliste mais moins rémunérateur en points). Un rien suffit pour que l’atome heurte le trait du ciseau.
Tout fondu-fêlé d’activités ludiques ou sportives, de celles qui lui valent subventions, parrainages, primes, et à tout le monde de devoir financer des stades, des circuits, de surpayer des produits de première nécessité pour couvrir les coûts de la publicité télévisuelle ou autres, vous assurera que sa lubie est une véritable « école de la vie ». Il en est de même du JezzBall qui, tout comme les échecs, rend formidablement intelligent pour… jouer au JezzBall. Les échecs sont toutefois largement plus lucratifs. Certes bien peu en regard de la balle au pied, qui exige sans doute moins de réflexion, de dextérité, de sens des opportunités, mais tout autant parfois une bonne dose de chance, comme l’existence. À l’instar des échecs, le JezzBall de haut-niveau n’est sans doute pas à la portée de tout un chacun et n’est certes pas estimé aussi spectaculaire et dispendieux-chic que la course automobile de Formule 1. Mais toutes choses égales par ailleurs, sa pratique est aussi addictive que le poker ou le tennis. La JezzBall phalangite et ses cohortes de désagréments guette tout autant que le tennis elbow ; s’y adonner peut entraîner beaucoup plus de pertes (de temps, de convivialité, d’occasions plus profitables) que de gains (de productivité découlant de la dextérité à dominer les interfaces des logiciels, par exemple).
Au JezzBall, tout vient à qui sait attendre… ou pas… et la fortune sourit ou grimace aux audacieux car leur témérité provoque leur perte. Les subtilités étant foison, il convient de composer constamment et instantanément. Une manœuvre risquée peut vous faire perdre deux « vies » à la fois et l’inexorable décompte des secondes restantes ne doit pas vous détourner de l’indispensable vérification récurrente du pourcentage déjà atteint ou du nombre des coups encore possibles. Dima Ravlovsky, de Marjacq Micro Ltd., qui l’a conçu pour Microsoft, l’a doté d’une animation de démonstration propre à vous induire en erreur : les phases initiales sont reproductibles, les suivantes plutôt fallacieuses pour qui voudrait passer à temps au niveau suivant et réaliser un résultat honorable. C’est un peu comme en politique : on lance quelques idées simples et séduisantes, sans trop se soucier des effets pervers, et une fois élu, on se débrouille autrement, au gré des circonstances qu’on feindra d’avoir prévues ou organisées. Trop rester le nez collé sur les indices pour maintenir le cap empêche la réaction prompte, habile et opportune, et comme tout bon manœuvrier politique vous vous reprocherez alternativement d’avoir été trop timoré ou aventureux. Parfois, l’histoire vous ressert le même plat (ici, un atome venant docilement se faire piéger à la suite d’un autre au même emplacement), à d’autres, confiant d’avoir amadoué un adversaire (un atome suivant une trajectoire paraissant convenue), vous oubliez le traitre au comportement insolite qui vous poignardera dans le dos.
Rédiger un manuel du JezzBall obligerait, tout comme un Lao Tseu ou un grand maître du jeu chinois du go à ciseler des formules sibyllines ouvrant ou refermant une large variété d’interprétations. Et comme il est apparu que Napoléon fut parfois un piètre stratège ou que Staline ne dût qu’à Stalingrad une victoire estompant ses multiples erreurs antérieures à tout autre fatales, la lanterne du niveau réussi au JezzBall n’éclaire que le chemin parcouru avant la chute inéluctable. Car une chose est sûre : vous perdrez, et les petits atomes du JezzBall finiront, tels des asticots, par avoir raison de vous et de vos succès passés. L’important reste d’avoir participé. Ou plus assurément, d’avoir su à bon escient passer à autre chose. À Super Tetris Holobyte 1991, un prédécesseur tout aussi diabolique, par exemple. La contemplation de bambins jouant inlassablement à la marelle devrait pouvoir vous convaincre que, pour l’art de perdre son temps, le JezzBall et tant d’autres jeux informatiques ne sont qu’un perpétuel recommencement.
Qui voudrait en partager ses fameux « trucs et astuces » pour inlassablement commenter cette trop succincte présentation. Un mémorial du JezzBall serait un silo de caractères et de pages qui ferait de la Bible un mince roman de gare et la documentation technique d’un sous-marin ou d’une navette spatiale (dont les pages empilées toiseraient les plus hauts immeubles de Dubaï) une bluette pour lecteur désœuvré. La futilité de l’entreprise ne vous échappera pas. Je m’y remets pourtant, tentant d’améliorer mon palmarès et repoussant sans cesse le moment de m’atteler à la rédaction de ce qui sera à jamais le manuel de JezzBall (car malgré tout, remplir une feuille d’impôts, faire quelques emplettes alimentaires, assurer ma mie que, non, en dépit des apparences, et de mon silence dû à mes prenantes occupations, tout n’est pas déjà fini entre nous, peut s’expédier vite fait entre deux parties). Je songe à un chapitre définitif sur l’option « son », déconcentre-t-elle, sert-elle de précieux indicateur de l’arrivée d’un atome dans un tunnel ? Les modulations du scratch chirurgical du ciseau fendant l’aire d’évolution sont-ils un indicateur fiable ? Marylin vos Savant (« le plus haut cœf intello attesté au monde », avec 186) saurait-elle trancher ces points délicats ? Allez savoir… Car quelque chose cloche là-dedans, et j’y retourne immédiatement !
Super article, merci!!!
Merci CuweuilPistache.
Pour qui voudrait tenter de s’adonner à ce jeu, voir, dans l’article ci-dessus, les commentaires des fenêtres (les survoler : ce qui nécessite l’activation de Java pour les voir apparaître). Pour faire des commentaires qui apparaîtront en mode survol du curseur sur l’image, voyez l’interface des images de Joumbla (l’éditeur de Come4News). Pensez aussi à ne pas avoir défini trop de pixels (mode « solid », couleur Web « blanche ») de bordure (en général, cinq suffisent pour bien détacher l’image du texte).
Bonjour..
Pourquoi ne peut-on pas télécharger votre Jezzball.Par une mauvaise manipullation j’ai perdu ma Jezzball et j’aimerais tant la reccupérer. La nouvelle Jezzball de Luxe ne m’interesse pas. Guidez moi pour me dire que faire pour retrouve ce jeu que j’aime vraiment beaucoup. Répondez moi en mail. Merci par avance
Cordialement,
Marina
Bonjour.
J’écris à nouveau.!! Je me suis abonnée à C4N, je suis donc devenue mambre, mais je ne crois pas que cela servira à grande chose. Ils ne répondent même pas aux mail que j’ai écrit à leurs attention. Je ne sais que penser…Je vois aussi que personne n’est passé par ici depuis le 23 mai 2010…Peu sérieux à ce que je vois.
J’attends tout de même votre réponse à mon premier commentaire..
Marina
pour Marina : http://www.jeuxgratuit-flash.com/jouer/jeux-adresse-et-agilite/jezzball/