N’est-il pas un peu tôt pour le dire ?

 

François Hollande à l’Élysée le 26 novembre document pure people.

 

Support Wikipedia En tout cas c’est très loin de ce qu’avait été le sakozysme. Rien d’étonnant, François Hollande fut principalement élu pour battre Sarkozy plutôt que pour la politique qu’il pouvait engager. D’ailleurs, il n’a vaincu Sarkozy que de moins de deux points. Il est donc loin d’avoir la même aura, la gauche ne fait aucun culte de la personnalité, elle ne glorifie pas François Mitterrand, seule personnalité qui la porta au pouvoir depuis 1981, pas comme la droite qui glorifie le général de Gaulle. La droite est fière de ce qu’elle fait, la gauche, toujours divisée, critique par dogmatisme. Démocrate socialiste de gauche, il se trouve dans le même milieu politique que celui de Bayrou qui est à droite, c’est à dire dans un centre dont on ne connait pas précisément la politique qui sera appliquée.

C’est toute l’ambiguïté d’un centre démocrate qu’il soit de droite ou de gauche, par rapport à la droite ou à la gauche. L’exemple d’Arcelor Mittal est révélateur. Une partie de la gauche était pour la nationalisation ainsi qu’une partie de la droite, François Bayrou ne l’était pas tout comme François Hollande. Cette opposition à ne pas vouloir nationaliser, indépendamment du bien fondé ou pas, montre la cassure de François Hollande avec son électorat. Même plus, avec son propre parti, Arnaud Montebourg en est le parfait exemple, avec Marie-Noëlle Lienemann qui critiqua ouvertement l’orientation prise balayant les emplois préservés.

Les attaques qu’il reçut des syndicalistes d’Arcelor Mittal, des accusations de ne pas respecter sa parole, bien qu’il ne se soit jamais engagé à préserver la filière chaude, mais seulement à préserver les emplois, accusations qui n’ont jamais été prononcées aussi intensément contre un président de la république, sans même provoquer la moindre réaction de la direction du parti socialiste.

On voit bien l’isolement de François Hollande, il n’y a pas d’hollandisme dans son parti. L’aversion de Martine Aubry, secrétaire nationale du parti socialiste, que l’on constata lors des primaires socialistes, témoigne de l’anti-hollandisme de certains mammouths du PS.

Que représente-t-il en potentialité électorale ? La droite du centre au FN est contre lui, la gauche du milieu des socialistes à l’extrême gauche ne lui apportent pas de soutien. Sa cote de popularité est de l’ordre de 40 % selon un sondage BVA réalisé les 13 et 14 décembre, donc après sept mois d’exercice. On voit bien que le hollandisme n’est qu’un mot. Les écologistes au gouvernement ont un pied dedans et l’autre dehors, ce qui fait désordre. L’argumentaire qui consiste à dire que l’appartenance à une majorité n’engage pas à toujours être de son avis ne fait que le nid de l’opposition. N’est-ce pas, avant de s’engager qu’il faut savoir ce que l’on veut, après c’est trop tard. Le parti de gauche de Mélenchon et les communistes n’hésitent pas à voter contre, même le budget, et le pacte de compétitivité qui sont pourtant loin d’être de droite.

Dans notre 5ème république, qui n’est plus un régime de partis, crées des tensions qui n’existeraient pas si l’hollandisme était la culture des politiques de cette majorité.

Ce que l’on peut dire c’est qu’il fut pris à la gorge dès son arrivée. L’Europe et Angela Merkel ne l’ont pas appréciés. Sa prise de position en forme d’ingérence pour Sarkozy pendant la campagne présidentielle, et les propos de François Hollande sur une renégociation du traité par l’introduction d’un volet croissance avec la mutualisation des dettes, n’ont rien arrangé.

François Hollande est le fruit de Jacques Delors, et de François Mitterrand, donc un Européen, il ne pouvait être question pour lui de provoquer un conflit, il négocia donc au mieux pour ce volet croissance en s’appuyant sur l’Italie et l’Espagne, de la stratégie intelligente. Cela mit Angela Merkel en difficultés. Il n’obtient que 120 milliards pour ce volet qui furent jugés ridicules par la gauche, mais probablement durs à négocier. À la suite de cela, il adopta la règle d’or, puis le TSCG qui fit éclater, à gauche, une partie de sa majorité. Mais, il ne fut pas arrêté par ce chantage à gauche.

Là dessus, il veut restituer une gouvernance respectueuse des institutions, ce qui tranche avec celle de Sarkozy. Il réduit son salaire et celui des ministres, et prend le train, fait respecter les feux rouges à son chauffeur ce qui fait la risée d’une bonne partie de la droite sans pour autant que son parti le soutienne, et que l’opinion approuve, cela fait petit pour un président de la république. Autant d’actions qui n’activent que des critiques journalistiques, attendant le moindre changement de comportement par nécessité de temps et de distance, pour enfoncer un clou sur la présidence normale. Si ces faits apparaissent futiles, par rapport à Arclor Mittal, ils n’en n’ont pas moins un impact, qui, à force, démoralise sont électorat.

Ce qui frappe dans sa méthode c’est la recherche permanente du compromis, de l’équilibre. Cela manifestement ne plait pas. On n’arrête pas d’entendre qu’il ne sait pas ou il va. Mais c’est la seule politique raisonnable et la plus démocratique.

Elle tranche avec celle du bulldozer Sarkozy, qui a fait beaucoup de vent, sans résultat.

Sera-t-elle plus incisive sur les transformations en profondeur ? Il apparaît souvent indécis, l’équilibre des choses l’impose, peser d’un coté ou d’un autre demande de la réflexion, du temps. Est-ce de l’indécision, ou de l’intelligence, la peur de faire, on peut trouver toutes sortes d’hypothèses, mais une chose apparaît certaine, il veut être ferme tout en paraissant souple. Il est insaisissable. L’expérience d’Arcelor Mittal montre son calme devant cette tempête, combien seraient révoltés devant les accusations.

Les trois élections partielles du 09/12/12, sont un premier avertissement pour la majorité, elles montrent bien la défection de son électorat ainsi que le manque d’enthousiasme à son parti de soutenir ses candidats. Cette morosité d’ensemble montre que pour le moment le hollandisme n’existe pas.

L’état dans lequel se trouve la France, fit qu’il fut contraint à s’éloigner de son discours du Bourget, il dut agir dans la rapidité. Les emplois tombent comme de la grave-lotte, le chômage vient encore de s’aggraver au troisième trimestre de près de 41.700 emplois principalement dans l’emploi marchand et l’intérim, portant sur un an la perte de 56.000 emplois. Bien que ce chiffre soit très inférieur au 165.000 emplois perdus au seul premier trimestre 2009, il fut important de donner des gages aux industriels pour marquer que ce sont eux qui embauchent et qui font l’économie, d’autant que les impôts ont été notoirement augmentés, et que la taxe à 75 % fait un grand nombre de mécontents.

Cette période transitoire est un calvaire pour la majorité, ses réformes demandent du temps entre le passage du sarkozysme au hollandisme. La réforme de la fiscalité, la mise en place de la banque d’investissement, le volet de compétitivité aux entreprises ne peuvent se faire immédiatement. Le budget vient d’être voté les sénateurs l’avaient rejeté. Là dessus il faut soutenir les plus fragiles. Les augmentations de l’énergie, essence, gaz électricité, (elle augmentera de 2,5 % début 2013), minent le moral des Français, et perdent confiance dans la possibilité pour François Hollande de remettre le pays en croissance, donc d’inverser la courbe du chômage.

Il vient d’annoncer une année 2013 extrêmement difficile, la croissance prévue de 0,8 % ne sera pas maintenue d’après le FMI et les experts économiques, l’INSEE prévoit 0,1 % pour les deux premiers trimestres de 2013, mais ne prévoit pas de récession.

Le gouvernement vient aussi d’annoncer une augmentation du RSA de 10 % sur cinq ans, en plus sur l’indexation annuelle sur l’inflation, ainsi que la création de 8.000 places d’hébergement supplémentaires, ainsi qu’un crédit aux particuliers afin de lutter contre le surendettement, et un relèvement du plafond de la CMU-complémentaire pour couvrir 500.000 personnes. Le RSA est de 474, 93 € pour une personne seule sans abattement logement, 10 % en cinq ans une misère, 9,5 euros par mois. Cette indexation prise en charge par les départements sera compensée intégralement par le gouvernement. Une dépense qui serait de l’ordre de 2,5 milliards sur la mandature. Serait-ce du hollandisme, oui si le hollandisme est aussi de penser aux plus fragiles.

Mais alors ou peut-on trouver du hollandisme ?

Emmanuel Todd en trouve un de révolutionnaire quand il déclare à Marianne le 16 octobre 2012 «dans cinq ans François Hollande sera un géant ou un nain».

Le moral du pays est au plus bas et nous sommes en plein «Hollande blues».

«Je suis historien et toujours dans le bonheur d’être débarrassé de Sarkozy. C’est quand même quelque chose qu’on peut déguster, non ? Si le président sorti avait été réélu, nous ne pourrions pas aujourd’hui débattre des problèmes économiques de la France. Nous serions encore en train de piapiater sur l’identité nationale, les Roms, les musulmans, les enseignants, les chômeurs et autres boucs émissaires, oubliant la débâcle industrielle et le déficit commercial. Vous vous rendez compte qu’Hollande a gagné la présidentielle malgré l’affaire Merah, malgré l’affaire du droit de vote des étrangers aux élections locales ? Comment être pessimiste dans ce pays qui a compris que les ultra-riches, plutôt que les pauvres, les fonctionnaires ou les étrangers, étaient responsables de la crise, dans cette nation qui a rejeté, il y a cinq mois, le côté obscur de la force. S’il le veut, quand il le voudra, Hollande pourra s’appuyer sur des forces sociales profondes et positives.

Je voudrais rappeler comment mon hypothèse d’un «hollandisme révolutionnaire» avait été formulée pour maintenir sa validité : j’avais évoqué un mitterrandisme à l’envers. En 1981, Mitterrand arrive au pouvoir avec un programme très à gauche, de nationalisations, d’augmentations des salaires et des avantages sociaux. En 1983, tournant de la rigueur, adhésion du socialisme français au néolibéralisme, probablement inévitable dans le contexte mondial……».

Mais encore, ou peut-on trouver du hollandisme ?

Dans la mise en valeur des diplômés de l’ENA, ceux de sa promotion Voltaire. Pas un ministre du privé, mais des conseillers. À ceux qui ont reçu le savoir de l’état, et qui ont aguerris leurs connaissances pendant ces longues années dans l’opposition, de l’exercer. Toute cette logistique tranche avec celle de Sarkozy, le retour aux valeurs de la république. On entend parler de réformisme de gauche, balayé l’idéologie pour le pragmatisme devant les difficultés du moment. Si le hollandisme n’est pas encore instauré, cette gouvernance marquera un tournant politique, elle aura vu une gauche responsable, volontaire, faire face à une situation qu’aucun gouvernement n’eut à subir.