Je me souviens, à l’été 1967, de ce petit-déjeuner au yoghourt. Tout un saladier. Le jeune fils de la maison avait recueilli pour la nuit un nomade français. Sa mère avait servi deux louches de yoghourt. Je ne saurait dire où c’était, entre Varna et Burgas, sans doute, en Bulgarie. En fait, peut-être s’agissait-il d’une famille rrom sédentarisée ? Dommage que Manuel Valls n’ait pas vécu cette expérience. Dommage que Raluca, une Roumano-Française, qui lui réplique sous forme de lettre ouverte après ses déclarations sur les Rroms, n’ait vécu que 16 ans en Roumanie… 

J’approuve et désapprouve à la fois les propos de Manuel Valls sur les Roms (ou Rroms). Peut-être parce que je sais un peu plus et un peu moins que lui ce que j’évoque. Un peu plus car, sans être Rrom, du temps où on lisait encore au Royaume-Uni “No French, no dogs”, je me suis senti un peu Rrom : pas de domicile fixe, pas d’emploi stable, pas d’emploi stable ou même peu stable, pas de domicile, même parfois temporaire.

Et puis, si je ne connais, depuis 1967, après un court séjour aussi vers 1985, que fort mal la Roumanie, je crois pouvoir me targuer de fréquenter assidument le Banat. D’avoir d’autres visions des Rroms que celles les plus généralement véhiculées en France, Italie et Espagne (pays dont je consulte la presse, sur place ou à distance).

Pour ce qui se rapporte à la situation des Rroms en France, je m’en rapporte à ce qu’en dit l’auteur des Nouveaux cons (nous nous y reconnaissons souvent), Étienne Liebig, dans son De l’utilité politique des Rroms (éds Michalon). Qui fréquente Come4News sait ce que je pense de cet ouvrage : ce n’est pas l’amicale dédicace qui m’a incité à l’approuver et le désapprouver à la fois.

Une lettre ouverte à Manuel Valls, j’en garde une sous le coude. Bien sentie. Qui aura consulté sir Come4News mon point de vue sur le rattrapage des dossiers de naturalisation (Naturalisations : le bluff total de Valeurs actuelles) devinera sa teneur.
Raluca, une homonyme de la gymnaste Raluca Haidu (peut-être un patronyme dérivé d’Haiduk ou Haidouk, soit bandit d’honneur, Cartouche, Mandrin…), publie une adresse au ministre de l’Intérieur sur Rue89. Sujet : les Roms.

Fort bien. Raluca, née en 1967, se dit germanophone et magyarophone. Sans doute, dans ce cas, plutôt une Saxonne qu’une Souabe (donc, davantage de Transylvanie que du Banat). Elle arrive âgée de 16 ans en France et sera naturalisée en 1987, lors de la « première cohabitation », du temps où Philippe Séguin était ministre des Affaires sociales et de l’Emploi. Séguin, que j’avais rencontré à l’époque, avait l’ascendant sur Charles Pasqua (Intérieur), quant à ces questions de naturalisation.

Elle a été apatride et réfugiée politique, tout comme Dinu C., puis Adriana, et enfin leurs enfants, Andreï et Radu (que je bise au passage), mes cousines et cousins et petits-cousins par alliance, décédée depuis ou retournés en Roumanie. Qui songent parfois à revenir, et ils seront fort bien accueillis, tant familialement que professionnellement, sans formalités, ils sont aussi des Français.

Dire que, des Rroms, nous connaissons le problème, est totalement faux. Énoncer que, de Rroms, nous n’ignorons pas divers problèmes, est parfaitement vrai. Il s’agit de connaissances, d’amis, de partenaires ou adversaires (en affaires, immobilières par exemple), de proches, de familiers, &c. D’ailleurs, comme beaucoup de Rroms avaient opté pour le patronyme de Noël (C***), des membres de ma famille sont parfois pris pour des Roumains d’origines rroms.

Mon amie Emilia H-S*** n’aime pas les Rroms en général, mais apprécie ses collègues de travail. En Italie, pays dont elle parle fort bien la langue (comme six autres), qu’elle connaît un peu mieux que l’Espagne ou le Portugal ou de nombreux autres pays européens (ses fonctions à l’international en faisaient une nomade d’occasion, tous frais payés), elle a peur. De se dire roumaine. Enfin, pas dans les universités. Mais dans la rue. Bon, Emilia est un peu pétocharde, mais quand une infirmière se fait exécuter sous un abribus parce qu’elle est une Roumaine, donc assimilable à une Rrom, évidemment, il y a de quoi être inquiète.

Dans sa lettre ouverte sur Rue89, Raluca veut faire gober à Manuel Valls que, de ce point de vue, et de sa faute, la France de Cioran, Ionesco, Traian Vuia, Mircea Eliad, Isodore Isou, Tristan Tzara, Paul Goma, Virgil Gheorghiu, &c. (et même etc., etc.), comme l’Italie majoritairement, assimilerait Roumain·e·s ou Bulgares aux Rroms. Toutes et tous des Jean (Django) Reinhardt (un Belge d’origines sintis, soit manouches) ou des Gheorghe Zamfir (flutiste roumain, version naï ou Pan, époux de la Parisienne Marie Noëlle, exilé fiscal en Roumanie par la suite, peut-être un peu rrom sur les bords, mais guère davantage). Cinq fois décoré en France, Zamfir a quelque peu incarné la musique roumaine dans le monde des années 1970-1980, ce qui est fort réducteur.
Pour Raluca, Manuel Valls incarne la France, et lui porte « un réel préjudice au quotidien ».

« En entretenant sciemment, vous aussi, une confusion voulue entre Roms (…) et Roumains et Français d’origine roumaine (…), au point de semer le trouble dans l’esprit des Français, vous me portez un réel préjudice au quotidien… », écrit-elle au (à son, à nôtre) ministre de l’Intérieur.

Quel est le terme moins fort que « baliverne », déjà ? Non point calembredaine, peut-être faribole, mais la perception des significations évolue avec le temps. Valls, comme autrefois l’était Bernard Stasi, est aussi interpellé, plutôt judicieusement, de temps à autre, sur ses origines. Raluca se sort bien de l’exercice. Visiblement, la com’, ses méthodes, ses travers qui passent, ses trucs qui marchent, elle connaît.

Bien sûr, Manuel Valls ne s’exprime pas tel un Michel Rocard du temps où il dirigeait un gouvernement : Valls a appris la leçon. Raluca n’a pas tout à fait tort non plus. Cohn-Bendit a bien raison : dans les années 1930, Juifs et Roms, c’était kif-kif « crouillats » car pauvres, voir très pauvres, pouilleux, crasseux, prolifiques en gamins aux guenilles douteuses, &c. Je ne vous parle pas des « odeurs » de la cuisine juive car je n’étais pas né. Quand j’évoque les palais roms de Roumanie, et leurs propriétaires, et leurs relations avec élus ou magistrats et fonctionnaires corrompus, j’éprouve aussi du mal à ne pas évoquer Gringoire, Candide ou Je suis partout. Pas tendres, ces hebodmadaires, avec les israélites ou les Juifs, métèques, apatrides, rastaquouères, j’en passe…

Bref, parfois difficile de frôler la ligne jaune (à présent, blanche) sans la franchir. Valls a cependant à la fois raison et tort. Raluca évoque que la France du maréchal Pétain s’en prenait aux Romanichels, Gitans, Roms et Tsiganes et non aux « Roumains » (ou Bulgares). Eh, bien sûr, la Roumanie était alors du bon côté, celui de l’Axe, le roi Michel avait été déposé, avant de repasser au mauvais (soit de fasciste à communiste).
Là, évidemment, Valls ne s’en est pas pris aux Roms des usines Dacia-Renault qui fournissent des Logan, volent des emplois aux Français, &c. Car des Roms, chez Dacia, je mettrais (presque) ma main au feu qu’il s’en trouve, comme dans la plupart des usines des multinationales implantées en Roumanie, et parfois mieux payés que des Roumaines ou Roumains.

N’empêche, ce « c’est illusoire de penser qu’on réglera le problème des populations roms à travers uniquement l’insertion » ne me semble pas totalement outrancier. Ce qui me semble outré, abusif, c’est la vision que Raluca véhicule. Sans doute de bonne foi, ou parce que, dans une lettre ouverte, un article, il faut « résumer », ne pas perdre le lectorat en affinant, en analysant, mais qu’il convient de synthétiser au plus simple, accessible, Raluca fait des femmes, hommes et enfants roms des nomades à perpétuité.
D’une part, on n’a rien demandé aux enfants, d’autre part, de multiples autres exemples montrent que l’aspiration à l’itinérance, au nomadisme, n’est pas plus inéluctable ou enracinée que celle des Francs, Goths, &c. Même les Helvètes n’étaient pas tous des « Suisses » (pas ceux des églises, mais les mercenaires d’antan, ceux du duché de Milan, largement inférieurs en nombre, qui faillirent faire tourner la bataille de Marignan au désastre).

Énoncer « leur vocation est le nomadisme », c’est (en partie) stupide. Réfuter catégoriquement cette assertion le serait tout autant. Je ne sais qu’elle est la vocation des Bretons, des Écossais, des Catalans. Pour les Tchèques et les Slovaques, non plus vraiment, d’ailleurs. Pour les Croates, les Bosniaques, les Serbes, je n’ai pas non plus des lumières prédictives éclatantes.

Arno Klarsfeld qui, en octobre 2011, préconisait un contrôle des naissances pour les Rroms (qui seraient en partie responsables de leur sort et « devraient s’abstenir d’avoir huit enfants »), s’exprime à présent dans Atlantico. Ses impressions touristiques en valent d’autres. J’ai franchement ri quand il a évoqué ce roublard d’élu du Banat qui lui aurait dit : « les Roms, on les déteste ». Alors qu’on en est, à tous niveaux de toutes les sphères, le plus souvent complice, surtout dans les hautes sphères, surtout si on peu faire des affaires avec les plus riches d’entre eux.
Arno Klarsfeld s’est fait balader. Ce qui ne veut absolument pas dire que ses vues partielles de divers problèmes individuels de (et non des ou « du peuple Rom ») Rroms soient farfelues. On peut s’y tromper. Tous les « palais des chefs mafieux roms à Timisoara » ne sont pas perdus au milieu de nulle part, fort loin de là. Ni tous déserts. Si d’ailleurs, son rapport n’était pas si juteux, le plus vaste palais rom de Timi (qui est de facture antérieure), serait peut-être autrement occupé : il s’agit du consulat d’Allemagne, l’un des plus grands et hauts immeubles anciens de la ville, loué fort cher, me suis-je laissé dire (mais ce n’est peut-être qu’une rumeur).

« Valls ou Guéant, c’est peu ou prou la même politique envers les Roms et les mêmes non-dits », poursuit Arno Klarsfeld. Il n’a pas tout à fait tort. Pour le moment, en tout cas…

Cela étant, c’est finalement, en dépit des dissonances, un substrat commun de discours. Les Rroms, le peuple Rom… Alors qu’un Rrom magyarophone de Roumanie n’a pas du tout les traits communs, les aspirations supposées qu’on l’on prêtera au Rrom bulgarophone de la même Roumanie, au Rrom de l’un des pays des Balkans pratiquant un autre vernaculaire.
Des Rroms sont tout à fait prêts à se sédentariser en France, au Royaume-Uni, en d’autres pays d’Europe occidentale. Ou, à exercer des activités itinérantes, mais dans des conditions acceptables, après formation professionnelle. D’autres Rroms peuvent préférer se fixer en Roumanie, Bulgarie, Hongrie, et d’autres pays. Ou pas. 

Les Rroms sont caricaturés, il est vrai. Ils et elles se caricaturent parfois elles et eux-mêmes (surtout qui à l’oreille des pouvoirs publics, obtient des subventions, des fonds). Mais évoquer les Rroms en les faisant des Yéniches (comme les « Vanniers » alsaciens et romands) tels des Gitans andalous, c’est quelque peu ahurissant. On lit n’importe quoi. Qu’il n’y a pas la moindre population nomade au Luxembourg (pays qui ne compte que moins de 3 000 Yéniches revendiqués plus ou moins tels), pour ne citer qu’un exemple devenu récurrent. 

On prend souvent les Rroms pour des Rroms comme l’on confond Valaques et Valaques (multiples interprétations selon que l’on se trouve en Roumanie, dans le Banat serbe, en Bulgarie, ou selon les époques, depuis celle des Volques)

En commentaire, Raluca précise avoir « écrit à chaud ». Bon, moi aussi. Il ne faudrait pas. Son commentaire sur Rue89 me semble, « à chaud », relever de l’historiographie évolutive. Des Saxons qui ne seraient pas « même de nos jours » considérés « Roumains à part entière » ? Sauf que Peter Haller ne fut pas élu maire d’Hermannstadt ou Nagyszeben (Sibiu) que par des Saxons ou des « Hongrois », que je sache. Mais, effectivement, n’être pas « roumain de souche » (autre invention historiographique) et pas trop pionnière, communiste grand teint (ou faisant fort bien semblant, même si encore royaliste), pouvait présenter de nets inconvénients.
Elle poursuit : « j’ai aussi décidé de ne pas entamer diverses procédures afin de récupérer des possessions roumaines perdues par ma famille » (comprenez, confisquées). Je ne sais si des Rroms, avec diverses complicités bien placées, se les sont appropriées ou non, mais des Rroms (et non « les ») sont fort coutumiers du fait, tant bien même les biens seraient-ils encore occupés par les descendants des véritables propriétaires antérieurs.

« Mon fils, né en France de père français, a essuyé il y a peu des commentaires désobligeants (limite xénophobes/racistes) de ses camarades de lycée. Tout simplement pour avoir précisé que sa mère était née en Roumanie ! ». Ah, là, je comprends mieux son appréciation des propos de Manuel Valls. Breton, donc « tête de con », devenu « tête de chien » (parisien), j’avais peut-être une aptitude à répliquer qui manque à son fils.

Comme je le subodorais, elle est d’origine transylvaine. Se souvient de son enfance lorsque les Roms « étameurs et forgerons » (d’autres étaient couvreurs) dressaient un campement. Moi, c’était les petits Maghrébins, titis de Marseille, que j’avais appréciés. Certains ont bien tourné, d’autres non, tout comme mes petits camarades d’école, bon français, Français de la vraie France, de la France « vraie », celle qui s’invente les traditions et repères identitaires qui lui font plaisir (et sont donc parfois fort contradictoires).

C’est vrai que les Françaises et Français s’y entendent assez fort pour faire des Bretonnes ou des Bretons parfois, tandis que d’autres veulent en faire des Françaises et Français dont rien ne dépasserait du moule. En raison du discours de Valls (et « grâce », surtout, aux antérieurs d’autres), Raluca, avant-hier encore une Française par excellence, très peu une Roumaine dans son esprit, se sentira peut-être, après-demain, encore plus une Roumaine. Peut-être se retrouvera-t-elle un·e vague ancêtre rrom. Pourquoi pas ?
Mon propos n’est pas antagoniste : je peux fort bien comprendre (et totalement entendre) Raluca.

Valls va fabriquer des Rroms nés Français de parents et grands-parents et aïeux nés Français, au train où il risque de s’enferrer. Car Rrom, d’accord, c’est rare, mais on le devient aussi. Il convenait aussi de le lui signifier.

Lu ce « magnifique » (et si banal) : « ce n’est pas à la société française d’intégrer les Roms, c’est à eux de s’intégrer ». Bien d’accord. Supprimons l’école laïque, réservons l’école aux enfants de qui peut payer, de même pour la sécurité sociale, n’entretenons plus que des routes payantes, laissons les autres se détériorer, réinstaurons des octrois un peu n’importe où, restreignons les accès de tout à qui montre patte blanche, et ceux qui parviendront à s’intégrer seront forcément les meilleurs. Cet argument, c’est celui de la sélection naturelle, c’est rarement celles et ceux qui ne bénéficient pas le mieux des avantages et publics et privés qui le tiennent.

N’accordons d’ailleurs plus la nationalité française à des Raluca : la guerre froide est derrière nous, pas de bouches inutiles, surtout pour qui critiquerait un ministre français (on commence par critiquer un ministre français socialo-communiste, on critiquera son successeur libéro-dirigiste…).

Simplement, il faut savoir raison garder, donc se méfier de comparaisons hâtives, ne pas se gargariser d’arguments convenus, tenter de saisir la complexité et de se préserver de traitement des causes uniformes. Or, « le » problème rrom, c’est souvent un traitement du genre « petit coton, petite lotion, petit badigeon » (tant pour le mal de gorge que pour traiter les hémorroïdes). Alors qu’il y a de multiples problèmes concernant des Rroms et d’autres.

Il n’y a d’ailleurs pas que les gadjos non-Rroms qui tombent dans le folklore. Ainsi de l’enterrement de l’auto-proclamé – autointitulatul – « roi des Rroms » de Roumanie. Le cortège de Florin Cioaba a été suivi par des centaines de Rroms qui n’étaient nullement dupes, mais on saisit l’occasion de célébrer une cérémonie en partie folklorique.  Et on a lu un peu partout : « la communauté rom de Roumanie est en deuil ». Tu parles, 2 500 éploré·e·s, selon Mediafax ? Aussi cocasse que le message convenu de condoléances à la famille du défunt diffusé par la présidence de Traian Basescu.
La succession du « roi », revendiquée par « l’empereur » Iulian Radulescu ( Rădulescu), est fortement contestée par les deux « princes », Daniel et Dorin.
Le sociologue de Cluj-Napoca, Vasile Dancu, fait état d’un traitement médiatique de type « reality-show ». Renforçant des stéréotypes négatifs. Des positifs aussi. L’essentiel, c’est toujours de simplifier l’approche pour en fait, évacuer tout problème de réception. En quelque sorte, le bruit chasse le « bruit » (parasite, au départ, mais le sens est plus large).
Les silhouettes et figurants rroms ont joué leur partition à la perfection, il était inutile de leur dicter leurs répliques. 

Pour qui lit le roumain, c’est là, sur Adevarul.

Une fille ou un fils de Rrom deviendra peut-être ministre en France. Nous n’avons pas trop entendu les Poniatowski s’inquiéter du « plombier polonais », que je me souvienne…

Benoît Hamon s’est inquiété : « certains s’égarent dans des formes de transgression qui ne me plaisent pas ». Il a incité à ne pas mettre tout le monde dans le même sac, « l’oppresseur avec l’opprimé, le mafieux avec la femme et son enfant contraints de mendier » (évidemment, la femme et les enfants du mafieux ne mendient pas, eux). Henri Emmanuelli a évoqué la peine de mort, abolie après vingt ans de sondages concluant à son maintien.

Le plus odieux, finalement, c’est François Fillon, qui approuve Valls mais regrette en substance l’aide (prime) au retour de Giscard d’Estaing. Qui a fait de fillettes turques ou maghrébines des déracinées complètes, puis des quasi-esclaves, vendues par leurs parents à des maris désignés. Qui a fait des fils se sentant totalement étrangers dans les pays de leurs ascendants. Certes, il ne parlait que des reconduites en Roumanie et Bulgarie. Mais il a bien la mémoire courte.
Rappelons que l’aide n’a pas été supprimée, mais limitée à 50 euros par adulte et à 25 par enfant.

Vasile Dâncu

Citeste mai mult: adev.ro/mt607s

Vasile Dâncu

Citeste mai mult: adev.ro/mt607s

Valls, sur BFMTV, craint qu’on n’ajoute « de la misère à la misère ». C’est un fait. Mélenchon surenchérit en accusant Valls de dire « la même chose que l’extrême-droite ». Sur BFMTV, Éric Cotti fait semblant de croire que l’Union européenne n’existe plus, que ses décisions pourraient ne plus s’appliquer (sur la libre circulation des salariés et des entrepreneurs).

Il faudrait surtout se détacher justement, des clichés. Le Dagens Nyheter (Suédois) révèle que la police a fiché 4 000 Rroms roumains, dont des enfants. Certes, mais la mesure n’est pas que policière, mais aussi sociale, de protection de l’enfance.

Il y aurait en France environ 17 000 Rroms, dont des Hongrois. Le chiffre antérieur admis (20 000) classait la France au cinquième rang européen (derrière Espagne, Italie, Allemagne et Suède). Eh bien, certaines se sentiraient peut-être mieux en Roumanie, Hongrie ou Bulgarie, pour d’autres, ce serait dans leur pays de (faible) accueil. D’autres, peut-être, tiennent vraiment à un mode de vie itinérant.

Ce jour, s’est ouvert à Nancy le procès de trois familles : 27 Rroms de Croatie, dont les enfants ou d’autres leur ayant été confiés ou cédés participaient à des cambriolages (une centaine) dont le produit servait notamment à la construction de palais à Slavonski-Brod (en Croatie, équidistante de Zagreb et Belgrade). La doyenne, passant pour chef de clan, 66 ans, sera jugée après le 15 octobre (date prévue de la fin du procès). C’est aussi une réalité.

Valls a conclu : « à force de vouloir faire l’ange, on finit par faire le jeu de la bête ». Cette bête, ce n’est pas, de loin, que le Front national. Ne lui en déplaise. On se laisse parfois contaminer. Personne n’est exempt (sauf peut-être Mélenchon ou Duflot, que je n’ai pas vus loger en plein milieu des ghettos rroms roumains).

Mais sur une telle série de problèmes divers, variés, à différencier, s’invectiver ne résoudra rien. Quant à savoir les solutions à donner, c’est à la fois très compliqué et simple ; car des solutions semblant bonnes sur le papier pourront se vérifier mauvaises, et sans doute, inversement, ce qui semblait peu crédible, ou risqué, ou peu conforme, peut s’avérer bénéfique. Soutenir ou critiquer Valls n’avance pas à grand’ chose. Proposer et vérifier la validité des diverses mesures possibles, à déployer en parallèle (s’il y avait une « solution finale » pour l’intégration des Rroms, cela se saurait), c’est une autre paire de manches.

Je voudrais quand même rassurer Raluca. Son crémier ou sa crémière, peut-être un·e Franco-vietnamien·ne, ouvrira encore des yeux ronds si elle lui demande un yoghourt rrom… Tandis qu’un bulgare, cela se conçoit encore. Mais elle obtiendra sans doute au mieux un yaourt « goût bulgare » (sauf, peut-être, dans une épicerie turque). Le monde évolue, la perception de l’autre, des autres, varie, se module…