Officiellement premier ministre du pays, Vladimir Poutine attend patiemment 2012 pour avoir de nouveau le droit de briguer la présidence. Mais pour qui en douterait encore Poutine reste toujours le patron du pays et du jeu politique. Le récent verdict de la justice russe sur le cas de Mikhaïl Khodorkovski l’illustre.

 

La justice moscovite a enfin trouvé le temps de trancher sur le cas Khodorkovski. Il aura fallu attendre le 30 décembre, veille des congés de fin d’années en Russie, pour que la justice russe rende son verdict au sujet de la condamnation de l’ancien oligarque. Et sans trop de surprise celui-ci a de nouveau été condamné à 6 ans de prison supplémentaires.

L’intérêt dans le cas Khodorkovski n’est pas tant dans l’intransigeance de la peine ni même dans la nature de ce qui est pénalement reproché à l’ancien dirigeant de Ioukos. Khodorkovski est tout sauf un saint. Il est incontestable que l’origine de sa fortune est douteuse voire criminelle. Les accusations de fraude fiscale le concernant sont, à n’en pas douter vraies. Mais il n’y a là que comportements d’habitude et de normalité de la part d’un ancien oligarque. Tous ont appliqué les mêmes méthodes que Khodorkovski, mais seul ce dernier a pu, un jour, avoir l’ambition de concurrencer politiquement Vladimir Poutine. Pour cette vanité et cette prétention l’ancien président et actuel premier ministre russe le harcèle et s’acharne à le faire payer. Cette sentence confirme bel et bien que Khodorkovski continue d’être victime de Vladimir Poutine. Car il est incontestable que cette prolongation de sa peine est d’origine purement politique. Les raisons de cet acharnement sont ici au nombre de trois.

Tout d’abord s’il avait été libéré en 2012, comme ça aurait été le cas sans cette nouvelle condamnation, sa sortie de prison se serrait fait à quelques mois de la présidentielle. Et parions que Poutine, de nouveau éligible à ce poste, n’était pas près à affronter un homme qui n’a pas forcément renoncé à ses ambitions présidentielles. D’autant qu’auréolé de sa posture de martyr du pouvoir poutinien, Khodorkovski se serrait montré un candidat coriace.

Pour se laisser les chances d’une éventuelle réélection en 2016 Poutine a même réussit à repousser la libération de l’ancien oligarque à…2017.

Mais ce verdict est aussi riche d’enseignements pour ce qu’il raconte de la relation entre Dmitri Medvedev et son premier ministre. Les appels à la clémence pour Khodorkovski avaient surtout pour origine les pays occidentaux, appels que Medvedev n’a jamais réellement condamnés. Car à travers le cas Khodorkovski se jouait aussi l’affrontement entre un Poutine peu enclin à l’ouverture à l’Ouest et un Medvedev plus prompte à occidentaliser et moderniser le pouvoir russe.

Aucun des deux camps n’étant assez fort pour totalement imposer ses vues à l’autre il était normal que le verdict se décide dans une sorte de compromis. Que la peine ne se soit prolongée « que de 6 ans » montre un clan Poutine toujours dominant sur celui des modernistes que mène Medvedev. Mais incontestablement cette peine montre que le camp Poutine a du composer avec son adversaire. S’il n’y avait eu que lui la peine aurait, assurément, été plus lourde.

Mais en continuant de s’imposer comme leader du camp dominant Poutine envoie clairement comme message celui qu’il reste encore le vrai patron de la Russie d’aujourd’hui.