Information de l'AFP indiquant que malgré le temps et l'histoire, les hommes resteront toujours aussi ignorants et ne tireront que rarement les leçons du passé.

Marque fétiche des jeunes Allemands d'extrême droite, le logo "Thor Steinar" s'affiche à la devanture d'un petit magasin récemment ouvert à Rostock (nord-est): dans plusieurs villes d'ex-RDA, les boutiques vendant des symboles du Reich nazi ont le vent en poupe.

Plusieurs boutiques se sont ainsi établies récemment à Rostock, Schwerin, Wismar et Magdebourg, provoquant de vives réactions au sein de la population et des organisations de gauche.



Pour une somme modique, on peut ainsi s'offrir un poster de Rudolf Hess dans sa pose la plus avantageuse, l'ancien dauphin d'Adolf Hitler devenu l'icône de ce milieu bien particulier. On peut y écouter un album des "Landser", groupe skinhead interdit en Allemagne, avec leur air culte "Das Reich kommt wieder" (le Reich revient).  Mais, dans des villes estudiantines comme Rostock et Schwerin – où les idées de gauche sont également influentes – une résistance plus ou moins organisée se met en place face à ces magasins faisant office de points de ralliement et d'enrôlement pour une jeunesse désorientée et durement touchée par le chômage. 

Voilà trois mois que des skinheads ont ouvert le magasin "East Coast Corner" à la périphérie de Rostock. La ville vit depuis une tension diffuse. Beaucoup considèrent l'arrivée du magasin dans un quartier majoritairement de gauche comme une "provocation volontaire". Certains jeunes gauchistes ont plusieurs fois brisé la vitrine pendant la nuit. 

Le NPD, parti néonazi qui a fait son entrée l'an dernier au parlement régional où il compte six députés, organise en réponse des "marches solidaires" de soutien aux crânes rasés. Julian Barlen, jeune militant socialiste, a fondé l'association "Schöner leben ohne Naziläden" (La vie est plus belle sans magasins nazis). Habitants et commerçants s'y sont rapidement ralliés, suivis par nombre d'associations et partis politiques. Des concerts associatifs sont régulièrement organisés: "Du rap contre la droite", "soirée Antifa" (soirée antifasciste), juste à côté du magasin. 

Toutefois, les nazis ont la dent dure et ont collé une affiche sur la devanture: "no surrender" ("nous ne nous rendrons pas"). Magdebourg, autre ville moyenne de l'ex-RDA, connaît également une tension croissante entre gauchistes et néo-nazis: la porte du magasin vendant la marque "Thor Steinar" a déjà été complètemente détruite lors de manifestations. A Wismar en revanche, petite ville hanséatique à une centaine de kilomètres de Rostock, le rapport de force est loin d'être le même. Les réseaux d'extrême droite sont déjà bien enracinés: ils ont essaimé avec trois boutiques, dont l'une située dans le quartier historique inscrit au patrimoine de l'Unesco. Une de ces boutiques vend sur internet les produits à la gloire du nazisme à travers toute l'Allemagne.

Le phénomène est plus alarmant dans ces petites villes, qui, sans université, n'ont pas les moyens d'organiser de réelles manifestations de protestation, constate Julian Barlen. Il y a un an, à Wismar, un policier a dû utiliser son arme de service pour empêcher les skinheads de se jeter sur les manifestants avec des battes de base-ball. Et, dénonce Horst Krumpen, membre du "Réseau pour la démocratie, l'humanité et la tolérance", collaborant avec les partis de droite CDU (chrétiens-démocrates) et FDP (libéraux), les agents de police n'osent plus verbaliser les voitures des propriétaires du magasin "Werwolf", pourtant en permanence stationnée dans une rue piétonne.

Dernièrement, lors d'une fête organisée par la ville, on a laissé défiler librement des jeunes brandissant des banderoles à l'effigie de l'organisation néo-nazie interdite "Blood and Honour".