C’est dans un village non loin du Caire, qu’est né Abdelhalim Chabna, alias Abdelhalim Hafez, dernier d’une fratrie de quatre enfants. Aussitôt après l’avoir mis au monde, sa mère mourut ; elle l’abandonna à l’aube même de sa vie, seul aux prises avec les affres de la séparation. Sa belle-mère essaya, du mieux qu’elle put, de combler ce vide assassin, marqueur de séquelles. Mais le malheur ayant un temps, jeté son dévolu sur cette modeste famille, le père à son tour ne tarda pas à s’éclipser. 

Le môme sera recueilli par son oncle qui le prendra sous son aile. On raconte que  l’histoire de cet orphelin d’infortune émut tout le village et plus particulièrement les mères si bien qu’il finit par devenir frère de lait de tous les autres enfants du quartier. Très tôt, alors qu’il fréquentait encore et bien assidûment l’école primaire du bled, un des ses professeurs décèlera en lui la graine de star.  Il lui faudra, alors qu’il était âgé d’une dizaine d’années, prendre son baluchon, quitter lieux et  famille d’adoption pour  l’Ecole Nationale de Musique du Caire. 

Il croisera sur le chemin de sa formation, de grands compositeurs parmi lesquels Mohammad Abdel Wahab, lesquels flaireront le talent de l’artiste en herbe : de pierre en pierre ils participeront à l’ascension de sa carrière. L’Egypte sera définitivement conquise par la voix bouleversante de celui qu‘on surnommera, Al 3andalib al asmar, « Le rossignol brun » . Ses chansons ne se cantonneront pas au pays des pharaons, elles traverseront les frontières et séduiront tant de monde. Que sa voix  a pu animer les rues de Beyrouth à l’époque où elle ne voulait pas se laisser mourir ! 

Pour avoir sans doute été si tôt confronté à la fugacité des choses, il y a quelque chose de profondément émouvant dans sa voix d‘écorché vif ; comme un brin de mélancolie venu des confins de ses souvenirs . Son répertoire est vaste :  il fait référence aux luttes anti-coloniales, au nationalisme arabe, il y a surtout l‘amour . La passion et ses turbulences : « ichtaktou ilayka fa 3alimni an la achtak »; démuni, déboussolé, il supplie sa bien aimée : je me languis de toi, apprends-moi à ne pas avoir mal ! Apprends moi comment arracher en profondeur les racines de cette souffrance. Dis, comment meurt la larme, comment meurt l’amour, et comment se suicident les passions ? Ô toi qui m’a dépeint ce monde comme un poème, plantant ta blessure au cœur de mon âme,  abolissant en moi toute notion de patience, apprends-moi comment guérir de toi ! Si tu tiens à moi, ne me laisse pas enchaîné dans ce néant. Si je savais vraiment la teneur des soubresauts de l‘amour, je n’aurais pas aimé ; si je savais les abysses de la mer, je n’aurais pas nagé ; et si je savais la fin, je n’aurais pas commencé.

 "Awil mara théb ya albi," il prend le contre pied de la précédente : « que ne m’a-t-on pas mis en garde contre les turpitudes de l’amour et de ses coups de tonnerre ; je ne lui trouve que plénitude, ô va, célébrons ensemble ce premier amour que ni toi, ni moi ne revivrons une autre fois, etc, etc…. Et que dire de "Sawah", une de ses plus belles chansons. Il y est ce vagabond tourmenté qui erre absent du monde qui l‘entoure ; il parle d’exil, il parle d‘absence, de douleur. Et tant d’autres…

Abdel Halim avait eu la malchance de contracter vers l’âge de 11 ans,  la bilharziose contre laquelle il se battra sa vie durant. C’était comme aujourd’hui un  30 mars de l’année 1977 à l’âge de 48 ans, il mourait des suites de sa longue maladie. Plus de deux millions de personnes étaient venues lui rendre un dernier hommage. Une grande pensée pour ce « Rossignol brun »devenu référence dans le monde arabe et qui continue toujours de gazouiller ses mélodies partout dans le Machrek et ailleurs…

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