Trop vite fait, trop mal fait. Après une longue nouvelle conversation avec Me Canoy et l’évocation des affaires Vivendi, Messier, Chirac (emplois fictifs), et d’autres, je voulais obtenir du parquet quelques tuyaux de mieux sur les suites judiciaires de la mise en examen du groupe Lagardère. Ben, je m’y suis pris trop tard, la porte-parole était occupée, indisponible au téléphone, et n’a pas eu le temps de répondre à ses multiples courriels. Eh oui, l’état des effectifs de la magistrature (voir par ailleurs, à Nantes) ; donc, je ne vous fais pas un dessin. Mais attendez-vous (bientôt, demain ?) à savoir que…

J’aurais bien sûr aimé savoir si, après la mise en examen du groupe Lagardère, celle de Daimler, actionnaire d’EADS, était à l’ordre du jour. Et s’il avait été procédé à d’autres placements en tant que témoins assistés. Mais on ne peut courir plusieurs lièvres de la foire (d’empoigne boursière et autre) au moulin (judiciaire). Voici donc tout ce que j’ai pu glaner, et ce n’est pas grand’ chose.
Noël Forgeard rejoint le financier et banquier April en tant qu’associé senior et membre du comité de direction. C’est un peu comme Jean-Marie Messier, ex-maître du monde, qui a opéré un assez prompt rétablissement.
L’action Lagardère n’a pas poursuivi son dévissage avec une perte inférieure à 0,30 % ce jour. Pourtant, je serai actionnaire (et le suis petit-petit, cela depuis le temps de la loi Méhaignerie), je m’inquiéterai. Ce n’est pas fastoche pour soumissionner, répondre à des appels d’offres, faire des affaires, quand on a une mise en examen sur le râble. Mais bon, quand on est un demi-frère Sarkozy, au moins de sang (enfin, plutôt du sol, fais-je), cela facilite certaines choses.
On le sait, Arnaud Lagardère devrait prendre la présidence d’EADS en 2012. Si l’on en croit le Faz (Frankfurter Allgemeine Zeitung), une feuille considérée sérieuse et fiable, il risque de ne pas siéger avec une pointure de chez Daimler. Chez Daimler, on n’a pas confirmé son intention présumée de se dégager du guêpier EADS, beaucoup moins juteux à présent : il y a beaucoup moins de miel à prendre. Lagardère en est tout aussi conscient, mais relations présidentielles obligent peut-être encore, en dépit de la perte d’influence de Sarkozy, il n’ose opter sur quel pied danser (en tout cas, sa supposée intention de se retirer à petits pas a été formellement démentie, mais les démentis, on sait ce qu’il faut parfois en penser).

Daimler, c’est 15 % du capital d’EADS (contre 7,5 à Lagardère), mais c’est en fait quand même un peu davantage car un retrait du groupe allemand risquerait d’entraîner quelques autres défections.
Rigolo, Le Figaro a pompé l’essentiel de la dépêche de Reuters, mais sans trop insister sur les conséquences d’un retrait de Daimler. La chute ayant été un peu escamotée, on vous la reproduit :

« Le groupe français a fait savoir qu’il ne comptait pas vendre sa participation avant 2012, année au cours de laquelle un accord avec le consortium arrive à échéance, mais a clairement indiqué qu’il ne se considérait pas comme un partenaire éternel. Des analystes soulignent que Paris et Berlin éprouvent des difficultés pour trouver des partenaires industriels désireux de remplacer Daimler et Lagardère… ». Ben, voui. Certains se sont gavés, et derrière, on ne se bouscule pas au portillon pour reprendre la suite et embarquer en Airbus ou Eurofighter. « À ce stade, je ne peux pas rendre public le moindre développement, » aurait déclaré le porte-parole du gouvernement allemand. Du parquet de Paris, je risque d’obtenir une réponse fort similaire. On s’en contentera le cas échéant.
Commentaire plus général de Me Canoy, sur diverses affaires. « On ne tient pas trop à ce que je fasse jurisprudence en obtenant des compensations pour trop de petits actionnaires et de ce point de vue, le Medef est peut-être, majoritairement ou minoritairement, je ne sais, derrière diverses sociétés pour obtenir des députés et sénateurs le blocage des dispositions sur les class actions, » avance-t-il prudemment. C’est un sentiment dont on lui laisse la paternité mais dont, comme l’écrirait Reuters, des analystes pourraient souligner qu’il n’a pas tout faux en l’exprimant ainsi. Je ne suis pas analyste, mais je serais plutôt d’accord avec eux.
Selon La Tribune (et d’autres) « l’idée d’une "golden share" est relancée » assortie d’un droit de veto pour les États allemand et français. À force de prôner le libéralisme, les dénationalisations, on se retrouve à la merci de… de qui au fait… Bon, c’est en tout cas un dossier à rebondissements. Boeing, boeing, en quelque sorte.