Fermer la porte, ouvrir la porte, laisser la porte ouverte… opération que chacun répète chaque jour sans y prêter attention.
Un rayon de soleil et la porte est grande ouverte, pour laisser entrer chaleur et bonne humeur. Comme l’hiver est long et étouffant de s’enfermer dans ses murs… Impression d’être enchainée dans sa propre vie. Adieu les bruits extérieurs, si plaisants quand ils viennent de la nature, bruits d’oiseaux, bruits félins, bruits enfantins…
Au boulot, j’oscille entre la porte grande ouverte caractéristique de mon accueil sans borne, chaleureux et apaisant, synonyme de ma disponibilité et de mon écoute, à la porte fermée, close dès l’entrée de l’enfant, de la famille, du partenaire professionnel.
Porte close synonyme de confidentialité, de secret enfoui qui va pouvoir s’échapper jusqu’à mes oreilles, et soulager celui qu’il torturait depuis tant de temps… Secret qui ne sortira pas ou peu, secret qui va être entendu, décortiqué, puis bichonné comme son auteur afin de pouvoir repartir serein. Secret qui bien souvent me heurte, me blesse, m’enrage, me désespère de l’espèce humaine… mais qui pourtant sera compris à défaut d’être excusé.
La porte doit être solide, tantôt ouverte, tantôt fermée, rarement entre deux. Elle doit rester fidèle à cette contrainte professionnelle, sans exception.
Parfois il m’arrive de trouver porte close. Synonyme d’échec, de non compréhension du rôle aidant et non jugeant, je frôle le doux rêve que plus jamais cela n’arrive. Mais je comprends, ouvrir sa porte est un viol, une intrusion dans son univers, son espace, et chacun a le droit d’y faire entrer qui il veut.
Ouvrir la porte de son cœur, de son âme, de son esprit n’est simple pour personne. Pourtant, chaque jour j’ai accès à des bribes de vies, de sentiments, d’histoires douloureuses. C’est une lourde responsabilité, une lourde tache, un fardeau à porter à mon tour. Je suis reconnaissante de toutes ces personnes qui osent entrouvrir la porte de leur vie derrière la porte de mon bureau, dans un but commun de mieux être. Mais je comprends oh combien c’est parfois difficile, voire impossible.
Chaque jour il faut refermer la porte pour paraitre "normal". Entrer dans la norme sociétale, et cacher avec hontes ses "folies".
Je rêve d’un monde où toutes les portes restent ouvertes. Sans lourd secret, sans rejet, sans jugement, sans tristesse à cacher, sans amour à refouler. Un monde sans porte.