La corruption est un phénomène bien connu. Généralement, on l’associe à d’autres pays. Il y a toujours pire que soi et se regarder dans le miroir est assez réconfortant. Mais pour ne pas se faire peur, mieux vaut encore ne pas regarder de trop près car la corruption est présente à tous les niveaux et l’Union européenne tant décriée est loin d’être une blanche brebis.


Prompte à dénoncer ce qui ne va pas chez les autres, l’Union européenne a un peu plus de mal à se regarder en face et à dresser des constats qui s’imposent. La corruption est endémique à Bruxelles et prend des proportions hallucinantes chez certains Etats membres. La corruption fait partie du folklore pour les moins regardants. Un folklore qui coûte cher, très cher. 120 milliards d’euros au bas mot… La lutte contre la corruption serait donc une solution éthique et efficace pour remettre d’aplomb une Union moribonde. Sur le papier oui, mais s’en prendre à la corruption c’est aussi prendre le risque de détruire un château de cartes qui arrange beaucoup d’élites.

 

La corruption comme déclencheur de la crise de l’euro 

 

Qui ne se souvient pas des heures d’apocalypse annoncées sur toutes les ondes, et journaux avec une Grèce à deux doigts d’exploser et d’entraîner avec elle le reste de la zone euro ? A chaque « réunion de la dernière chance » les Européens faisaient mine de colmater les brèches béantes du navire nommé Grèce. Le pays est finalement resté dans l’euro, mais a connu une récession catastrophique avec des années 2011 et 2012 à -7 % de croissance. Chômage, misère, désespoir et fins tragiques sont venus illustrer une gestion de crise in fine très mauvaise.

 

Mais derrière la crise se cache une corruption généralisée qui touche la Grèce depuis des années. Entrée dans l’UE en 1981, elle devait par cette adhésion s’asseoir à la table des pays démocratiques et honnêtes. Le pire est que l’Union européenne a participé du système de corruption totale en Grèce. Comptes publics truqués ? L’UE ferme les yeux en toute connaissance de cause. Enrichissement indécent de certains hommes politiques de premier plan ? L’UE laisse faire. Economie souterraine et bakchichs à tous les niveaux ? L’UE a d’autres chats (plus innocents) à fouetter. Un laissez-faire coupable qui a entraîné la crise économique la plus grave de l’histoire récente d’un pays et d’un continent plurimillénaires.

 

La leçon a été retenue peut-on penser. Que nenni ! La corruption en Grèce est devenue presque culturelle. Elle s’est imposée dans les mentalités et les réflexes d’une bonne partie de la population. Les secteurs où l’argent coule à flots sont les plus touchés. Forcément. Le malaise devient carrément nauséeux quand deux sphères aussi touchées par la corruption que la politique et le football se rencontrent. Les paris truqués dans le foot sont monnaie courante et les grands instigateurs ne sont jamais inquiétés par la justice. Le président du club le plus puissant – l’Olympiakos FC – Evangelos Marinakis fait toujours la pluie et le beau temps sur le football grec malgré un faisceau d’indices pour le moins troublant concernant ses activités. Comment est-ce possible ? Un gros chéquier et des appuis politiques qui remontent haut.

 

La Grèce d’un Papandreou complètement corrompu n’a pas été emportée par le raz de marée de la crise. Seuls les plus modestes et les classes moyennes ont payé les pots cassés. Le FMI et l’Union européenne venant jouer aux pompiers après avoir laissé le feu se propager avec une violence sans précédent. Si la Grèce est l’exemple le plus caricatural au sein de l’UE, bien d’autres pays ne peuvent pas se revendiquer comme de bons élèves. La Bulgarie et la Roumanie ont des bilans bien pauvres en matière de lutte contre la corruption (malgré la « surveillance » de l’Union européenne), l’Italie n’est plus à présenter et un pays comme la France, où la République est « irréprochable », génère un taux de corruption alarmant.

 

La France doit aussi balayer devant sa porte

 

Les Français estiment en majorité (62 %) que pour réussir dans les affaires il est nécessaire d’avoir des connexions politiques. Difficile de ne pas les comprendre quand on voit un Xavier Niel prendre la direction de plusieurs médias et décider du sort médiatique de tel ou tel ministre. Les hommes politiques font copain-copain avec les grands patrons, un deal gagnant-gagnant qui peut entrainer de sombres histoires de corruption. Marchés publics bidons comme ont pu le constater avec dégoût les électeurs (PS) du nord Pas-de-Calais. Exemple là encore frappant qui n’est pas isolé. Selon un « Eurobaromètre » 73 % des patrons jugent que le favoritisme et la corruption entravent la concurrence entre les entreprises. Autrement dit, il vaut mieux vaut avoir l’oreille attentive des élus si l’on veut exister dans les affaires…

 

Chaque semaine apporte son lot d’affaires scabreuses dans lesquelles ceux qui sont censés donner l’exemple se couvrent d’infamie et se rendent coupables de pratiques qu’on aurait pu penser dépassées. Mais non ! Et la corruption a un coût – comme toujours – et l’Union européenne l’estime à 120 milliards d’euros et doit s’approcher de sommes encore plus folles. Les pays les plus corrompus sont aussi ceux qui ont d’autres indicateurs de richesse et de développement peu enviables. La crise persistante en Europe pourrait bien se voir corréler à une augmentation de la corruption et à du favoritisme. La nouvelle Commission de Jean-Claude Juncker sera-t-elle sensible à ce problème ? Les raisons de douter sont fortes tant l’UE s’est distinguée pour mener des combats idiots ou allant à l’encontre des intérêts de ses citoyens. Réguler au millimètre près le calibre d’une pomme ou priver les producteurs de vendre leurs produits en Russie est plus important que la lutte contre la corruption…