V

ous aviez suivi dans le premier article les diverses raisons qui peuvent pousser quelqu’un à entamer une démarche d’apostasie (fait de se faire débaptiser) et la première lettre à envoyer. Après un long mois d’attente, j’ai reçu une réponse.

J’avais envoyé une lettre (sans recommandé, envoi simple) à mon évêché le 2 septembre de cette année (2009). Voici le contenu dans son intégralité :

Monsieur  <nom de votre abbé, ou autre responsable de votre paroisse de baptême>,

 

Ayant été baptisé(e) en la paroisse de <nom de votre paroisse> sous le nom de <votre nom>, peu après ma date de naissance le <xx/xx/xxxx>, je vous serais reconnaissant de bien vouloir rayer mon nom de vos registres, ne souhaitant plus faire partie de votre église. Je demande donc à être radié du registre des baptêmes, c’est-à-dire que mon nom et toutes les données à caractère personnel me concernant soient effacés des fichiers manuscrits, par tout procédé adéquat permettant de les rendre illisibles, et, s’il y a lieu, effacés des fichiers automatisés.

 

Veuillez noter que légalement votre église ne peut refuser une requête en ce sens, qu’au titre de la réglementation de l’Article 40 de la loi N. 78-17 du 6 janvier 1978, consolidé par la loi du 6 août 2004 s’appliquant à la rectification des données personnelles :

 

« Toute personne physique justifiant de son identité peut exiger du responsable d’un traitement que soient, selon les cas, rectifiées, complétées, mises à jour, verrouillées ou effacées les données à caractère personnel la concernant, qui sont inexactes, incomplètes, équivoques, périmées, ou dont la collecte, l’utilisation, la communication ou la conservation est interdite. »

 

L’information périmée dont il est question est ma comptabilisation parmi les membres de votre église et que je renie par la présente. Plus généralement, toute information pouvant laisser entendre un lien quelconque entre moi et votre église est également périmée et je vous demande de remédier à cette situation par une rectification de vos registres comme le prévoit la loi :

 

« Si une donnée a été transmise à un tiers, le responsable du traitement doit accomplir les diligences utiles afin de lui notifier les opérations qu’il a effectuées conformément au premier alinéa. »

 

La conservation de ces données périmées étant interdite, je demande un effacement de mes données personnelles. Je compte sur votre honnêteté pour effectuer la modification demandée de façon exhaustive. Il est ainsi de votre ressort de répercuter cette demande dans les lieux où seraient entreposés les registres me concernant au sein de votre organisation (diocèse, etc.). Toute information me concernant devra être rayée et/ou rendue illisible. Merci de ne porter aucune mention en regard de mon nom sur vos registres, inscrite sans mon accord, elle constitue un traitement illégal de mes données personnelles.

 

« Lorsque l’intéressé en fait la demande, le responsable du traitement doit justifier, sans frais pour le demandeur, qu’il a procédé aux opérations exigées en vertu de l’alinéa précédent. »

 

Je vous demande également comme le prévoit l’Article ci-dessus de bien vouloir m’adresser, sans frais, une copie de tout document me concernant, avant et après modification afin d’attester de "l’enregistrement modifié", à l’adresse suivante : <votre adresse>

 

Dans l’attente de votre confirmation écrite, je vous saurai gré d’accepter mes sentiments les plus sincères,

 

 

Fait à <lieu, date>.

<signature>

 

 

J’ai reçu, hier (20 septembre 2009), un courrier daté du 17 septembre, soit 2 semaines après mon premier courrier, une réponse de l’évêché, ici en intégralité (entre parenthèses et en noir figurent mes commentaires) :

Chancelier

                Mr…

                Monsieur,

                Votre déclaration d’apostasie a bien été classée dans le dossier prévu à cet effet. Une mention au crayon sur votre acte de baptême a été mise faisant référence à ce dossier de manière à ne pas délivrer d’acte de baptême dans l’avenir (note de moi-même : j’avais demandé qu’aucune mention ne soit inscrite, bien au contraire).

                Votre demande d’inscrire « a renié son baptême en date du… » n’est pas recevable (note : je n’ai jamais demandé cela), en effet le registre de baptême ne concerne pas l’adhésion actuelle de la personne à la foi chrétienne mais est et demeurera une trace historique d’un événement. Cette trace est ineffaçable (note : je pense que c’est du sens figuré, et je suis d’accord). De ce fait les registres de catholicité ne permettent pas de faire des listes de chrétiens et ne sont pas concernée par la loi informatique et liberté dont vous faites référence. Chaque fois qu’un tribunal a été saisi d’une affaire semblable, il s’est déclaré incompétent pour traiter de cette question. (note : est-ce vrai ?)

                Je me permets d’ajouter que l’Eglise n’a jamais poursuivi de demandes ou relances diverses des personnes ayant été baptisées, à la simple vue de leur acte de baptême… L’Eglise catholique est respectueuse de vos choix et ne vous empêchent pas de changer de religion ou de ne pas en avoir, elle vous laisse libre. (note : j’apprécie ce paragraphe, que je trouve honnête et très respectueux. Je note cependant la majuscule sur le mot église et les minuscules pour le nom de la loi Informatique et Liberté au paragraphe précédent… Lapsus révélateur du sentiment de domination du spirituel sur le temporel ?)

                D’autre part, il n’existe aucune liste de chrétiens…, il existe des listes de donateurs ou des listes d’inscriptions à des activités diverses, ces listes sont toujours provisoires (pour la durée de l’activité, 3 ans pour les listes comptables) et ne sont jamais divulguées. Toutes personnes voulant être rayées de ces listes, le peuvent bien évidemment (hormis les listes comptables qui doivent pouvoir être mises à la disposition de l’administration pour une durée de 3 ans)… mais ce n’est pas votre cas car vous ne figurez sur aucune liste.

                Je m’en tiendrai donc à ce que nous faisons en pareil cas (voir premier paragraphe).

                Soyez assuré, Monsieur, de l’expression de mes salutations respectueuses.

Maintenant, j’ai donc un choix : dois-je continuer cette correspondance parce que :

1)      N’a pas été fournie avec la lettre une quelconque preuve de ces modifications (photocopie de la mention au crayon évoquée au premier paragraphe, que je n’avais pas demandé, puisque je souhaitais que tout soit rayé et rendu illisible)

2)      Ce qui a été fait ne correspond pas à ce que j’ai demandé.

Pourtant non, je vais m’arrêter là. Pour une raison très simple : ce mot « apostasie », écrit dans le premier paragraphe, toute première phrase. Même sans « preuves », sans photocopies, ce mot, écrit dans un courrier, par le chancelier (le secrétaire ?) de l’évêché du Havre, me suffit.

Il constitue, pour moi, le symbole que j’ai bien quitté l’église catholique, que je ne suis plus chrétien.

Pourtant, cette réponse que j’ai reçu est perfectible, et est complètement contraire à tout ce que j’avais demandé. Mais je suis désormais un apostat. Donc je peux tourner le dos à l’église sereinement, même si mon nom est encore écrit sur les registres de baptême.

Je ne suis plus catholique.