Syngué Sabour, pierre de patience, est une adaptation par Atiq Rahimi et Jean-Claude Carrière du livre de même nom de Atiq Rahimi, lauréat du prix Goncourt 2008. Syngué sabour, c’est le nom persan d’une simple pierre magique et d’après une légende, elle aurait la cote auprès des Afghanes. Démunies face à leurs soucis, elles en font leur meilleure confidente et lui égrènent  leurs souffrances en guise de litanie. Un beau jour à force de recueillir tant de lamentations, la pierre explose. Elle part en miettes et à ce moment là, survient la délivrance de toutes les souffrances. 

Le film se passe presque à huis clos dans une pièce insalubre, nue, où à même le sol, gît un homme. Il est dans le coma. Il a une balle dans la nuque. A son chevet, sa femme s’efforce du mieux qu’elle peut de le maintenir en vie. Dehors la guerre fratricide fait rage. Tout est désolation dans ce bled logé au pied des montagnes d’Afghanistan où  les façades sont éventrées, les voitures devenues carcasses et où résonnent sans cesse des explosions, des coups de feu. 

Alors qu’elle lui tamponne le visage, le corps, avec une serviette imbibée d’eau, elle prie Dieu de le secourir. Elle lui en veut surtout de s’être laissé prendre par son propre piège de héros, mettant ainsi en péril sa propre survie. Puis contrainte un jour à se prostituer avec un homme qu’elle trouve attachant et auquel elle prodigue une certaine éducation sexuelle, la femme prend tout à coup conscience de son pouvoir. 

Peu à peu, elle semble devenir plus vindicative et y va crescendo dans les reproches jusqu’à faire de son mari inerte sa syngué sabour, cette pierre qui absorbe tout avant d‘éclater pour lui rendre sa liberté. De son abnégation passée, de sa vie avortée, il ne reste plus qu’amertume rendant désormais intarissable cette parole si longtemps bafouée. 

Des bribes de phrases pour dire sa détresse. Dire ses frustrations, ses humiliations, sa condition, son asservissement. Les tabous ayant sauté, elle va loin dans les confessions face à ce corps inanimé, avouant l‘inavouable. Un monologue monocorde, inépuisable qui gravite autour de la sexualité, des frustrations, de la condition féminine. 

Dans un cadre dépouillé où seuls les mots font office d’action , la caméra bouge  au gré des paroles de Golshifteh Farahani. Malgré son talent  et celui exceptionnel du mari (Hamidreza Javdan), tous deux presque sans nom, perdus dans un lieu en guerre presque anonyme, on est submergé par ce flot redondant de paroles macérées dans la douleur. 

Il y a aussi comme un profond malaise de voir pendant presque 1h30 cette femme avec beaucoup de théâtralité régler ses comptes devant ce mari devenu loque humaine. A vrai dire, le film dérange plus qu’il ne touche. Quant au suspense qui demeure jusqu’à la fin nous dévoilant la magie de la pierre de patience, la syngué sabour, il ne produit pas l‘effet escompté. Loin s‘en faut !

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