Lors d’une conférence de presse à Paris, le patriarche syriaque d’Antioche, Ignace Youssef III venu cette semaine pour rendre visite aux rescapés hospitalisés, de l’horrible attentat perpétré le 31 octobre au sein  de la cathédrale syro-catholique de Bagdad, a lancé un appel à la communauté internationale l’exhortant à s’impliquer dans la protection des chrétiens et des minorités d’Irak. Et les autres, non chrétiens ne sont-ils pas logés à la même enseigne, happés par la même spirale infernale de violence ? Est-il vraiment adéquat de parler dans cet Orient arabe de communautés minorisées persécutées par un islam intolérant et qui attendent leur salut de l’Europe ?

Un bref coup d’oeil sur les évènements majeurs de cette région démontre que le déclin démographique des chrétiens est lié à des périodes de fortes turbulences ne mettant pas particulièrement en cause leurs  persécutions par des musulmans. Première vague d’exode du Mont-Liban, province de l’Empire ottoman vers la fin du XIXième siècle (1840-1860) suite à des massacres interconfessionnels entre Druzes et Maronites, suite à l’effondrement de l’économie rurale. Depuis, l’histoire de l’exode ne cesse de se répéter par vagues successives si bien que l’on finit par croire que tout est fait pour rendre cette région invivable ou que les populations se laissent enliser dans une sacrée léthargie !

 Sous l’Empire ottoman, les chrétiens étaient loin d’être exclus mais détenaient plutôt des positions importantes dans divers secteurs notamment économiques, culturels. Prépondérance économique renforcée par le soutien des Européens via les capitulations. De plus, l’apport des Eglises catholiques et protestantes d’Occident en terme d’éducation a joué le rôle de catalyseur leur conférant aussi une avance par rapport à leurs concitoyens.

L’exode des chrétiens et des non chrétiens s’est amplifiée pendant la première guerre mondiale au moment de l’effondrement de l’empire ottoman. Période marquée par des répressions contre le mouvement panarabe naissant mêlant citoyens de toutes confessions, par des dégradations des conditions de vie.

 

 Leur destin étant le même, l’histoire les a vus côte à côte, syriens, libanais, chrétiens et musulmans héros de la lutte pour le nationalisme arabe contre le colonialisme européen se battre mais ils ont échoué. Aussi pour sauvegarder la Palestine, les Palestiniens de toutes les confessions unis dans la colère se sont soulevés contre l’implantation du foyer juif. Et, contre la domination britannique, contre l’absolutisme royal, coptes et musulmans d’Egypte, ensemble derrière le parti Wafd ont combattu. Seuls, les Assyriens d’Irak feront l’objet de persécutions pour s’être laissés enrôler par les Britanniques dans des brigades spéciales chargées de mater la révolte des tribus chiites. Diviser pour régner !
Aussi les années soixante du siècle dernier ont vu l’Orient arabe se dégarnir d’une partie de ses communautés les plus riches hostiles à la mise en place de politique économique de type social accompagnée de nationalisation d’entreprises, propriétés de familles égyptiennes, syriennes, irakiennes. Mesures appliquées sans discrimination aux musulmans comme aux chrétiens.

Et la guerre du Liban (1975-1990), l’invasion de l’Irak en 2003 ont apporté leurs lots de misères incitant à l’émigration des citoyens de toutes confessions.

 

Aujourd’hui, le visage de certaines zones de cet Orient s’est modifié en raison de l’importance des effets découlant de l’émigration des musulmans qui ont fini par rompre à la fois, un certain décalage entre communautés, et le monopole des chrétiens à l’occidentalisation. Par conséquent, l’avance culturelle des chrétiens impulsée par le soutien des occidentaux assurant leur primauté par rapport aux musulmans s’est largement estompée, le développement de l’enseignement public aidant aussi. De ce fait, la configuration des sociétés s’humanise extrayant des groupes humains de la marginalisation et  ya-til lieu de s’en inquiéter ?

 

 Peut-on parler aujourdhui de discrimination des chrétiens lorsque dans presque chaque famille chrétienne et musulmane sans nulle discrimination, depuis le fameux boum pétrolier, les portes de la péninsule arabique leur sont ouvertes, leur offrant de gigantesques opportunités d’enrichissement avec parfois des positions d’influence auprès des dirigeants de ces pays exportateurs de pétrole. La faille ne viendrait-elle pas d’ailleurs ? Concernant les Egyptiens, entre coptes et musulmans empreints d’une forte religiosité, il y’a "du pain et du sel" mais la détestable misère conduisant jusqu’à des émeutes du pain, à des luttes pour le partage des ressources matérielles ne porterait-elle pas sa part de responsabilité ?

 

L’émigration massive des chrétiens d’Irak aussi tragique soit-elle ne s’insère-t-elle pas dans une tragédie globale touchant la population irakienne dans son ensemble ? L’attentat déplorable perpétré au sein de l’Eglise syriaque ne s’inscrit-il pas dans la logique meurtrière récurrente n’épargnant ni mosquées ni musulmans. L’assise démographique musulmane étant largement supérieure à celle des chrétiens aurait sans doute pour effet d’aggraver ce sentiment de fragilité chez la communauté chrétienne.

 

On apprend aussi, aujourd’hui qu’un groupe lié à Al-Qaïda, les brigades d’Abdallah Azzam, appellent les musulmans sunnites du Liban à se soulever contre le gouvernement et contre le Hezbollah. N’est-ce pas là une preuve que l’extrémisme est sans foi ni loi et frappe tous azimuts ?

 

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