Le développement d’internet et des jeux vidéo a déjà créé un premier fléau au Japon: les hikkikomoris  (http://www.hikikomori.be/rubrique,qu-est-ce-qu-un-hikikomori,59878.html) qui passent leur temps à jouer en réseau, se coupant volontairement du monde et ne faisant rien d’autre. Estimés à un million, les familles qui ont un de ces hikkikomoris chez elles ont peur de l’avouer tellement elles ont honte d’avoir un enfant, généralement un fils, qui ne veut pas travailler. Mais ces hikkikomoris ne sont pas le seul fléau créé par le développement rapide des nouvelles technologies dans les années 80: les jeunes hommes rebelles au mode de vie traditionnel japonais se font de plus en plus nombreux et sont appelés "herbivores".

C’est la sociologue Maki Fukasawa qui a trouvé ce terme: «En japonais, explique-t-elle, le caractère utilisé pour décrire l’acte sexuel ressemble à celui qui veut dire “manger de la viande”. Je me suis aperçue que beaucoup de jeunes Japonais ne sont plus des “carnivores”.»

La société se transforme: les jeunes filles deviennent de plus en plus indépendantes et sûres d’elles, s’affirmant toujours plus. Elles ne veulent plus se contenter du rôle d’épouse docile de leur mère. Pour les "herbivores", les femmes font peur, même s’ils les respectent. Agés de 20 à 34 ans, ces jeunes refusent de faire de longues études, refusent les emplois qualifés dans les grandes sociétés, en réaction au père traditionnel qui passe des journées interminables au bureau sans se préoccuper de sa famille. L’"herbivore" aime ses amis, sa famille et souhaite passer du temps avec eux. Il vit d’ailleurs très longtemps chez ses parents, même après avoir trouvé un travail modeste mais qui permette de vivre. Un drame complété par un look d’asexué: exit le costume-cravate de luxe, vive les jeans et les t-shirts à la mode mais peu chers. Une coiffure androgyne, un peu de maquillage pour homme et des crèmes en tout genre: c’est une version nippone du "bobo" européen ou du métrosexuel (http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9trosexuel).

 L’"herbivore" apprécie aussi les desserts issus de l’agriculture biologique compliqués à base de coulis de différents fruits: il fait vraiment tout pour ne pas paraître viril et macho, pour être à l’opposé de ses parents. Aussi se voit-il rejeté par le reste de la société qui ne comprend pas son comportement choquant.

L’"herbivore" est une personne fragile qui, comble de tout, refuse les femmes et les relations sexuelles. Non pas qu’il soit particulièrement gay, mais pour ne pas répéter les erreurs d’un père trop souvent absent. Les femmes lui font même peur et il veut ainsi prendre son temps avant de les fréquenter. Il n’est pas pressé.

Mais dans un pays où la chute de la natalité va bientôt se faire ressentir sur l’économie, cette crise identitaire des jeunes ne fait que compliquer une situation déjà très délicate. Il reste à voir si les jeunes européens, très friands de culture nippone, vont se mettre à copier ce style de vie.